Un accord a été trouvé par le gouvernement fédéral concernant la taxe sur les plus-values.
Il y avait comme un parfum de habemus papam, dans la communication du ministre des Finances, Jan Jambon (N-VA), quand celui-ci a posté lundi à 9h12 sur X «Accord sur la taxe sur les plus-values!». Une fumée blanche ponctuant une réunion entamée la veille à 20 heures avec les autres vice-premiers. Le nationaliste le sait, le gouvernement tient sa réforme charnière, la garantie de garder Vooruit à long terme (du moins en théorie) dans la formation. Son annonce, deux heures plus tard, du feu vert à la limitation des allocations de chômage dans le temps, à la réforme des pensions, au durcissement de la politique d’asile et à l’accroissement des investissements dans la Défense, en est la preuve. En attendant la conférence de presse du ministre prévue mercredi, durant laquelle on devrait connaître les détails de la mesure, les lignes du projet suscitant les plus grandes interrogations sont connues.
Pour les plus-values, c’est l’inconnue
Concrètement, dès le 1er janvier 2026, chaque plus-value réalisée sur la vente de produits financiers (des actions ou obligations, ou sur des cryptomonnaies) sera taxée à hauteur de 10%. Les dix premiers milliers d’euros de ces plus-values ne sont pas concernés (l’exonération annuelle peut augmenter de maximum 1.000 euros par an, pour atteindre un maximum de 15.000 euros si aucune plus-value n’a été réalisée au cours des cinq dernières années). «Jusque-là, l’absence d’une taxe sur les plus-values relevait d’une bizarrerie belge, pointe Maxime Fontaine, économiste de l’ULB. Et, bien sûr, dans un pays où bien d’autres choses sont taxées.» Reste à savoir combien de personnes bénéficieront de cette exonération, la Belgique ne disposant pas encore (publiquement) de relevé du nombre de Belges réalisant plus de 10.000 euros de plus-value par an.
«Ce n’est donc pas une taxe sur le patrimoine, avertit Maxime Fontaine. Cette taxe n’a pas d’impact sur la fortune si cette fortune ne change pas de mains. Il ne s’agit donc pas d’un impôt sur la fortune, mais sur le revenu». Chez les plus riches, la fortune est en grande partie composée d’actions, «c’est ce qui permet les rendements les plus élevés à long terme, tout en restant relativement liquide. Mais il faudra donc attendre que les actions soient vendues pour que la taxe soit perçue.»
Pour ceux qui détiennent au moins 20% d’une société, un taux réduit et progressif est prévu. «Pour ces entrepreneurs, une exonération d’un million d’euros est accordée sur une période de cinq ans», complète le cabinet Jambon. L’objectif est ici de récompenser les parties prenantes aux plus petits commerces plutôt qu’aux spéculateurs. «Personne ne détient plus de 20% d’une entreprise comme Apple ou Amazon», illustre Maxime Fontaine.
Les produits d’épargne-pension et les assurances groupe sont exclus du champ d’application de la nouvelle taxe. Cela signifie donc que les pensions complémentaires du deuxième et du troisième pilier ne seront pas taxées davantage.
La classe moyenne réellement préservée?
Cette nouvelle mesure fiscale relevait du numéro d’équilibriste pour les membres de l’Arizona. D’un côté, le MR (principalement) scandait son opposition à cette mesure, «dans le pays le plus taxé du monde», dixit son président Georges-Louis Bouchez. De l’autre, Vooruit a mis une pression monumentale, et a même menacé de quitter la formation Arizona si le projet de loi n’avançait pas sérieusement.
A la sortie du kern, David Clarinval (MR) affirmait avoir épargné la classe moyenne. «Prenons un couple avec deux salaires, propriétaire de sa petite maison, en plein dans la classe moyenne, qui touche un petit héritage de 200.000 euros et qui décide de l’investir. Dans ce cadre, l’exonération de 10.000 euros peut paraître intéressante… Mais s’ils font fructifier ce placement au-delà des 6%, ce qui n’est pas impossible du tout, c’est déjà plus de 10.000 euros», nuance Maxime Fontaine.
L’autre catégorie censée être préservée par les négociations de l’Arizona était celle des indépendants. Par le truchement de leur Syndicat Neutre (SNI), «cet impôt sur les plus-values aggravera encore la position concurrentielle des entrepreneurs belges par rapport à nos pays voisins et pourrait entraîner une fuite des talents et des investissements».
L’Arizona espère récupérer 500 millions d’euros via cette taxe une fois son rythme de croisière atteint, quitte à corriger le tir si la mesure ne produit pas les effets attendus.