Bruxelles budget
David Leisterh a rencontré chaque parti convoqué pour élaborer un budget à Bruxelles et organisé des bilatérales. © BELGA

A Bruxelles, les négociations autour du budget en mode «soft launch»

Sylvain Anciaux

Démarrées concrètement ce lundi, les négociations pour le budget (sans gouvernement) débutent timidement à Bruxelles. Le gouvernement en affaires courantes est appelé à la rescousse aussi bien par les négociateurs que par le secteur associatif.

Lundi matin, David Leisterh, formateur bruxellois, a apporté quelques croissants aux négociateurs réunis à la Bibliothèque Solvay, dans le parc Léopold. Ce ne sera pas suffisant: les discussions démarrent lentement, trop lentement pour certains, mais sûrement selon d’autres.

La Bibliothèque Solvay, dans le parc Léopold, où les négociateurs de six partis politiques se sont rencontrés en début de semaine. © Michael Zegers

Depuis lundi, l’enjeu est de définir le point de départ du travail budgétaire à Bruxelles. Le MR et l’Open VLD estiment que le déficit budgétaire annuel s’élève à 1,241 milliard d’euros alors que les autres formations aimeraient définir ce chiffre à hauteur de 1,555 milliard. C’est important, car si tous les partis s’accordent pour réaliser un milliard d’économies structurelles en 2029 (cela veut dire que le milliard d’économies ne sera pas atteint avant 2029), le déficit annuel serait reporté à 241 millions dans un scénario, et à 555 millions dans un autre. Et c’est une sacrée différence aux yeux des négociateurs. Lundi, l’agence Standard & Poor’s s’est invitée au cabinet Gatz pour son inspection des budgets bruxellois, et le cabinet du ministre du Budget a assuré que ce déficit s’élevait à 1,241 milliard d’euros. Une manière aussi d’alléger le bilan du gouvernement sortant de 300 millions.

Embryons

Une fois ce point de départ défini, et puisque l’objectif est connu, les vraies discussions budgétaires pourront commencer. David Leisterh a déjà organisé des bilatérales avec chaque parti (MR, PS, Les Engagés, Groen, Vooruit et Open VLD) pour prendre le pouls, tandis que des groupes techniques thématiques se mettent en place. Pour l’instant, aucune décision budgétaire n’a été entérinée. Dans un certain sens, ce n’est pas une mauvaise nouvelle car une fois la première ligne écrite, il ne faudra plus compter sur le CD&V pour rejoindre la formation et lui permettre d’obtenir une majorité au sein du collège néerlandophone au parlement bruxellois. Le leader centriste, Benjamin Dalle, a pourtant fait savoir qu’il «n’était plus disponible pour se joindre aux discussions» budgétaires. Mais les négociateurs espèrent encore le ramener à la table avant de négocier les mesures.

Ceci dit, un premier test a eu lieu, dès lundi. Cet été, les ministres régionaux wallons et flamands ont revalorisé les titres-services afin de mieux rémunérer les travailleurs. En affaires courantes, le gouvernement bruxellois ne pouvait pas imiter la mesure mais expose dès lors la région à une fuite des travailleurs de titres-services. Le ministre sortant, Bernard Clerfayt, a proposé à son exécutif une piste qui consiste à augmenter de 1,2 euros le prix des titres-services, le tout via un mécanisme complexe qui permet aux travailleurs de bénéficier d’une augmentation similaire à ceux des autres régions. En Flandre, cette augmentation coûtait 85 millions au budget 2026. Via un mécanisme complexe, le schéma de Bernard Clerfayt coûtait 8,5 millions à Bruxelles en 2025, mais se remboursait en 2026. Le ministre régional bruxellois sortant a donc été convié à la Bibliothèque Solvay pour défendre son projet et s’assurer qu’il obtiendrait une majorité parlementaire afin que le texte devienne effectif au plus vite. Bien engagée, la piste a échoué faute d’une opposition venue du camp libéral, confie le ministre bruxellois au Vif. D’autres évoquent un accord de principe qui aurait été passé: celui de l’abstention sur les grosses manœuvres tant qu’une vision plus claire sur les compte de 2025 n’est pas définie. Autour de la table budgétaire, certains appuient toujours pour qu’il n’y ait «aucune nouvelle taxe» mais il n’est pas exclu d’optimiser les rentrées fiscales via des taxes qui ne sont «pas ou mal perçues» pour le moment.

Un budget bruxellois 2026 suspendu qui pèse sur l’associatif

Ce jeudi, 40 associations bruxelloises actives dans le secteur de la sécurité et la prévention ont poussé un nouveau cri d’alerte, tout aussi inquiétant. Sans déblocage politique ni garanties, «des projets vitaux pourraient cesser dès janvier», alors que le secteur a déjà dû licencier au moins 75 personnes pour des raisons budgétaires. Depuis janvier 2025, le budget bruxellois est défini par douzièmes provisoires, ce qui empêche pour rappel des augmentations budgétaires dans n’importe quel domaine. «Sauf que pour les six derniers mois, le ministre Gatz a déjà raboté nos subventions de 15%, soupire Charlotte Bonbled, porte-parole de l’ASBL Dune (un dispositif de réduction des risques liés à l’usage de drogues en milieu précaire). Et pour les trois derniers mois de 2025, il n’est pas encore exclu que cela soit raboté.» Contacté, le cabinet Vervoort répond que la reconduction du financement tel que prévu dépend d’un gouvernement de plein exercice. «Vu l’absence actuelle de ce gouvernement, le cabinet du ministre-président a donné instruction à son administration de préparer une nouvelle prolongation des subventions. Celle-ci devra être entérinée par le gouvernement en affaires courantes. Dès son approbation, les associations bruxelloises spécialisées en sécurité et prévention (…) pourront bénéficier de subventions en 2026.»

Mis à part ça, le monsieur Boulier à Bruxelles –tant que la situation reste bloquée– se nomme Sven Gatz. Il prépare des douzièmes provisoires pour 2026, mais aucun budget complet n’est à l’ordre du jour pour le moment. Les négociateurs espèrent y voir plus clair pour les vacances de Toussaint (qui commencent le 18 octobre). Il ne s’agira certainement pas d’un budget, encore moins d’un gouvernement, mais simplement d’un éclaircissement dont il faudra se contenter.

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