Le ministre de l’Intérieur veut interdire les groupes radicaux en Belgique, prenant l’exemple du Collectif contre l’islamophobie en France. Pour les Engagés, ce projet de loi toucherait «à des libertés fondamentales».
Le projet de loi du ministre de l’Intérieur, Bernard Quintin (MR), qui permettrait au gouvernement de prononcer une interdiction administrative des « associations ou groupements de fait constituant une menace grave et actuelle pour la sécurité nationale ou la pérennité de l’ordre démocratique et constitutionnel » continue de diviser la majorité.
Jeudi en séance plénière de la Chambre, des divergences sont à nouveau apparues, cette fois entre le MR et les Engagés. »On touche à des libertés fondamentales. Si l’on regarde l’ensemble des avis -collège des procureurs généraux, constitutionnalistes-, nous devons être prudents », a averti Benoît Lutgen (Les Engagés). À ses yeux, il est préférable d' »incriminer les personnes pour les mettre hors d’état de nuire » plutôt que de prononcer des interdictions d’associations, qui se reconstitueront aussitôt sous un autre nom.
Le MR, par la voix de Denis Ducarme, ne partage pas cette analyse. « L’accord de gouvernement est clair. Nous l’avons négocié ensemble. Il faut interdire les groupes radicaux dans notre pays! », s’est-il exclamé. « Nous attendons que l’ensemble des partis de la majorité suive cette feuille de route. » Pour le député réformateur, la Belgique a 15 ans de retard dans ce dossier.
Le cas du Collectif contre l’islamophobie
« J’en profite pour recentrer le débat. Ce n’est pas ce que vous avez fait », a lancé Bernard Quintin au député centriste. La France, l’Allemagne et les Pays-Bas disposent de lois similaires et « le risque est bien réel que ces associations (interdites) s’installent dans notre pays ». Le ministre a cité le cas du Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), interdit en France depuis 2020, mais présent en Belgique.
Selon le ministre, le projet de loi vise bien les associations « qui portent atteinte aux droits fondamentaux de nos citoyens » et certaines, comme les syndicats, sont exclues du champ d’application. La décision serait prise par l’ensemble du gouvernement, sur proposition du ministre de l’Intérieur, et sur base d’avis de la Sûreté de l’État ou encore de l’Ocam. « Ces services sont constitués de personnes capables qui font leur travail avec sérieux et professionnalisme », a-t-il estimé. Des voies de recours sont aussi prévues. Enfin, le Conseil d’État n’a pas encore rendu son avis, a-t-il observé. « J’en tiendrai évidemment compte », a-t-il promis. C’est donc un projet de loi « avec ceinture et bretelles », a-t-il conclu.
« Je n’ai aucune confiance en quelqu’un qui porte à la fois une ceinture et des bretelles… c’est quelqu’un qui doute de son pantalon », a répliqué M. Lutgen, citant l’auteur Henri Bosco.
Vendredi dernier, c’était le président du CD&V, Sammy Mahdi, qui avait jugé le projet de loi peu judicieux.