L’opposition au parlement fédéral ainsi que le syndicat des patrons ont réagi à l’annonce d’un accord de l’été par l’Arizona.
L’accord auquel a abouti le gouvernement Arizona au bout de la nuit ne va pas assez loin dans les réformes et donne trop de place aux thèses de gauche, a jugé lundi matin la cheffe du groupe Open Vld à la Chambre, Alexia Bertrand, dans une première réaction à celui-ci. Le gouvernement Arizona a engrangé divers accords sur la réforme des pensions, la réforme fiscale, la modernisation et la flexibilisation du marché du travail, et sur la loi-cadre sur les soins de santé.
« Notre pays a besoin de réformes profondes. À en juger par la conférence de presse du Premier ministre et les premiers articles de presse, il est clair que, bien que certaines réformes du marché du travail et des pensions aillent dans la bonne direction, il y a eu un autre glissement important vers la gauche. Toutefois, le prix avait déjà été payé sous la forme de la taxe ‘impôt sur les plus-values », a déploré la cheffe du groupe libéral flamand, dans un bref communiqué.
Pour celle-ci, à travers un accès plus souple à la pension minimale, des règles plus souples pour l’obtention d’un emploi et la retraite anticipée, « la liste des souhaits rouge a été presque entièrement cochée ». En revanche, la réduction des charges sur le travail n’a pas été mise en avant, alors qu’il s’agissait d’une promesse claire, a-t-elle déploré.
La gauche fustige l’accord d’été
« Cet accord d’été glacial va se heurter à un automne chaud », a prévenu la députée et cheffe du groupe PTB Sofie Merckx. « Sur le plan du droit du travail, la Belgique risque de devenir le Far West, où la protection collective des travailleurs — acquise par la lutte au fil des années — est mise en danger. L’augmentation massive des heures supplémentaires non imposées, la suppression de l’interdiction du travail de nuit et la suppression du temps de travail hebdomadaire minimum ne sont que quelques exemples du recul social que le gouvernement Arizona veut imposer aux travailleurs », a encore dénoncé Sofie Merckx.
« Il n’y a rien à fêter pour les travailleurs et surtout les travailleuses », a lancé lundi Ecolo à la suite de l’accord de l’été conclu au sein du gouvernement le jour de la Fête nationale. Ecolo s’inquiète des mesures qui pousseront la dérégulation du marché du travail: « les Engagés et le MR tournent le dos à la santé des travailleurs, à leur vie familiale et à l’équilibre entre temps de travail et celui qu’on a pour le reste de nos vies », s’inquiètent la co-présidente Marie Lecocq et la députée Sarah Schlitz. « Les travailleurs vont devoir se plier en quatre pour un salaire inférieur, travailler tard ou tôt avec des horaires imprévisibles. Les décisions du MR et des Engagés, alliés à la NVA, vont accélérer l’épidémie de burn-out ».
« Cet accord, c’est une drache de mesures antisociales, une explosion de reculs pour les travailleurs, pour les pensionnés, pour les malades. Pour les travailleurs, pour les pensionnés et les classes moyennes tout deviendra plus difficile », a déploré le chef de groupe à la Chambre, Pierre-Yves Dermagne. « On nous avait promis une politique pour celles et ceux qui se lèvent tôt : ils se lèveront tôt mais pour moins, moins de droits, moins de sécurité, moins de justice sociale », a-t-il poursuivi.
Le PS, Ecolo-Groen et le PTB ont réclamé lundi que le gouvernement vienne s’expliquer cette semaine encore à la Chambre sur l’accord conclu durant la nuit. « Alors que tout le monde est en congé et que le Parlement ferme ses portes, l’Arizona s’accorde sur des sujets qui préoccupent: pensions, salaires et horaires de travail. Cela mérite un débat sérieux. Nous demandons un débat parlementaire cette semaine », a souligné la cheffe de groupe PTB, Sofie Merckx.
Les patrons félicitent la réforme du travail mais déplore la taxe sur les plus-values
« Le train des réformes est définitivement lancé », analyse lundi la Fédération des entreprises de Belgique (FEB). « Notre système de chômage est enfin aussi activateur que dans le reste de l’Europe », se félicite-t-elle. La suppression de l’interdiction du travail de nuit et l’assouplissement des procédures doivent, elles, rendre les entreprises belges plus compétitives et contribuer à créer des conditions de concurrence équitables par rapport aux pays voisins, analyse la fédération patronale. « Ces mesures contribueront à attirer des entreprises en Belgique et à freiner l’exode des entreprises à l’étranger », espère-t-elle.
La fédération demeure, par contre, critique à l’égard de la taxation des plus-values. Il s’agit en effet d’un impôt supplémentaire dans un pays déjà surtaxé, résume-t-elle. L’organisation continue à plaider en faveur d’une élaboration et d’une mise en œuvre « raisonnables, réalisables et appropriées » de cette nouvelle taxe. « Il est impératif de veiller à ce que sa mise en œuvre n’impose pas aux parties directement concernées, comme le secteur bancaire, des délais irréalistes ou des complexités administratives », insiste-t-elle.
L’Association Belge des Syndicats Médicaux (ABSyM) a exprimé lundi sa satisfaction devant l’accord conclu durant la nuit par le gouvernement. « L’ABSyM constate avec satisfaction que la grève du 7 juillet dernier qu’elle a initiée et la manière dont elle a été suivie par sa base ainsi que les pourparlers politiques menés avec les différents partis politiques de la coalition ont porté leurs fruits », a-t-elle affirmé dans un communiqué.
La FGTB et la CSC ne comprennent pas la stratégie de l’Arizona, mais ne sont pas surpris
« Les équilibres entre les acteurs socio-économiques, souvent difficiles à atteindre, reposent sur ce contrat social, ou plutôt devrait-on dire… reposaient, regrette pour sa part la FGTB. Le bien-être au travail, la protection des travailleurs et travailleuses mais également la croissance économique et le partage de cette croissance découlaient également de ce pacte. En 6 mois, qui viennent d’être ponctués par un grand accord d’été, le gouvernement Arizona a cassé le modèle. »
La FGTB pointe du doigt un « recul généralisé » pour les pensions, les conditions de travail (flexibilité accrue et travail de nuit), le pouvoir d’achat, avec des heures de travail en équipe ou de nuit beaucoup moins bien rémunérées, et de la protection des travailleurs. Elle s’inquiète de diverses mesures dans ce domaine: possibilité de faire signer des contrats d’une heure par semaine, limitation des durées de préavis en cas de licenciement et diminution des balises obligatoires dans le règlement de travail.
« Normalement, si l’on suit la théorie libérale, quand on manque de bras, on crée des conditions attirantes pour engager des travailleurs et combler la pénurie. Aujourd’hui, c’est tout l’inverse qui se passe», analyse la Secrétaire Générale de la CSC, Marie-Hélène Ska.
L’automne risque d’être agité socialement. Une grande manifestation en front commun syndical est déjà annoncée pour le mardi 14 octobre. FGTB, CSC et CGSLB rappelleront à la coalition N-VA, Vooruit, CD&V, MR et Les Engagés l’importance de la concertation sociale. Mais le fédéral ne sera pas le seul exécutif dans la ligne de mire puisque les sections wallonnes de la CSC et de la FGTB prévoient une marche « pour l’emploi de qualité » le mercredi 24 septembre à Namur.