Eva De Bleeker a démissionné de son poste de présidente de l’Open VLD, ce vendredi après-midi. Le président du MR dit ouvertement lorgner vers la Flandre. Est-ce l’occasion ou jamais?
Eva De Bleeker n’est plus présidente de l’Open VLD. Elle a présenté ce vendredi après-midi sa démission lors d’un bureau de parti. Son leadership fut de courte durée, puisqu’elle avait été nommée à la tête des libéraux flamands au lendemain de la gifle électorale du 9 juin dernier. «Cette décision vient de sa part, assure Alexia Bertrand, cheffe de file Open VLD à la Chambre. Elle a beaucoup réfléchi pendant les vacances et en est venue à la conclusion qu’il fallait un nouveau visage pour la deuxième phase de refondation du parti. Elle continuera à s’impliquer dans la reconstruction, mais autrement.» Eva De Bleeker avait auparavant siégé comme secrétaire d’Etat au Budget entre 2020 et 2022 sous le gouvernement De Croo, poste dont elle avait dû démissionner après des erreurs de tableaux budgétaires.
C’est là le lourd tribut que doivent porter ceux qui héritent de la présidence d’un parti à terre. «Personne n’aurait vraiment pu remettre l’Open VLD en selle en un an, analyse le politologue Dave Sinardet. Le parti a gouverné pendant 25 ans, il a perdu beaucoup de crédibilité et particulièrement sous le gouvernement De Croo qui n’abordait pas vraiment une ligne libérale. Ironiquement, tout le programme de l’Open VLD se retrouve dans le premier gouvernement auquel il ne participe pas.»
Frédéric De Gucht n’est pas Eva De Bleeker
Cette démission pourrait en intéresser certains au sud du pays. L’appétit gargantuesque de Georges-Louis Bouchez, qui ne se cache plus de réfléchir à un MR flamand, pourrait-il être réveillé par cette crise persistante au sein de l’Open VLD? Il est encore tôt pour le dire, et le parti de la Toison d’Or n’a pas souhaité se prononcer sur le sujet, en attendant la désignation d’un nouveau président pour la mi-novembre et un rebranding (initialement prévu en septembre) pour juin 2026. «Une fusion avec le MR, en créant une sorte de parti national, ne serait pas la plus mauvaise piste, pose Dave Sinardet. Georges-Louis Bouchez est aujourd’hui le libéral le plus populaire en Flandre, le plus crédible, une crédibilité qu’il a d’ailleurs gagnée en contribuant à miner l’Open VLD durant la législature précédente.»
Une telle hypothèse est conditionnée à deux éléments, ajoute cependant le politologue. D’abord, il faut que Bouchez conserve sa popularité au sud du pays «alors qu’il prend des risques à travers quelques polémiques ces derniers temps». Ensuite, une hypothèse commence à se faire entendre: Frédéric De Gucht, président de la section bruxelloise du parti, se verrait bien en remplaçant d’Eva De Bleeker. Or selon ce scénario, l’Open VLD aurait moins d’intérêt à partager la ligne d’une droite plus conservatrice avec le MR, alors que la N-VA occupe déjà ce créneau. «Lors de la dernière élection à la présidence de la formation, les huit candidats étaient sur une ligne bleu foncé qu’a prise le parti depuis l’opposition. Quant au rapprochement au MR, cela dépendra de qui sera notre président, mais notre travail de refondation prime. Georges-Louis Bouchez en a conscience, c’est dans l’intérêt de la famille libérale», nuance Alexia Bertrand, qui a d’ailleurs confirmé ne pas se présenter. En quelque sorte, il s’agit pour les libéraux flamands de redevenir propriétaires de thèmes comme la fiscalité et les questions socio-économiques.
Reste à voir si l’intransigeant responsable de la section bruxelloise de l’Open VLD accèdera ou non à la présidence du parti. «Il y a une tradition du népotisme dans tous les partis politiques belges, et l’Open VLD n’y échappe pas», note Dave Sinardet en rappelant que le père de Frédéric De Gucht, Karel, a aussi accédé à la fonction. Il ne fait aucun doute que Frédéric De Gucht jouit d’une image reboostée en Flandre depuis le blocage politique à Bruxelles, où le libéral résiste au leader socialiste Ahmed Laaouej dans le cadre de la formation d’un gouvernement. «C’est d’ailleurs ce qui l’a fait connaître. Mais c’est aussi ce népotisme qui a entraîné la chute de l’Open VLD. Cela pourrait jouer à son désavantage.» Et paradoxalement, c’est aussi lui qui a soufflé sur les quelques braises en interne qui ont contribué à la démission d’Eva De Bleeker. En politique, il faut toujours avoir un coup d’avance.