La commission comptabilité a entériné ce mardi une limitation de l’augmentation du budget d’organismes de contrôle du Parlement tels que la Cour des comptes ou du Comité R. Pour tous les autres, un gel des recrutements est prononcé.
La Cour des comptes voit sa dotation de 2026 réduite d’environ 500.000 euros par rapport à 2025. Le Comité R, chargé de contrôler les services de renseignement, sera quant à lui privé de près de 300.000 euros et, par ailleurs, devra justifier les investissements réalisés dans le cadre de sa digitalisation estimés à 750.000 euros. C’est ce qui a été décidé, ce mardi, au cours d’une commission un brin particulière dite «comptabilité», qui évalue les différents organismes indépendants rattachés au Parlement fédéral.
On retrouve parmi ceux-ci la Cour constitutionnelle, le Conseil Supérieur de Justice, le Comité P, les médiateurs fédéraux, l’Autorité de Protection des Données, l’Institut fédéral des droits humains et le Conseil Central de Surveillance Pénitentiaire. Pour tous ces organismes, les partis de la majorité ont acté un gel de leur dotation de 2% par an, malgré une intention plus ferme des représentants de l’Arizona qui veulent, à terme, diminuer les budgets en questions. «Plusieurs institutions bénéficiant d’une dotation ont indiqué qu’un gel pur et simple de leur dotation hypothéquerait l’accomplissement de leurs missions de base», lit-on dans le texte accompagnant la décision. Aucun recrutement ne sera par ailleurs toléré d’ici 2029. Dernière contrainte, les dépenses des organismes ne pourront augmenter de 2% par rapport à l’année précédente. Et toutes ces mesures s’inscrivent non seulement pour 2026, mais également dans un plan budgétaire courant jusqu’à 2029. «Derrière ces chiffres, il y a des politiques publiques que l’on ne mènera pas, alerte le député socialiste Khalil Aouasti. Je constate qu’il y a un delta entre l’affirmation politique des partis de l’Arizona et les politiques menées pour atteindre leurs objectifs, notamment en matière de justice.»
Les organes de contrôle du parlement à la diète
Auditionnés ces dernières semaines, toutes les organisations avaient pourtant formulé des demandes de crédits supérieures à ce que le Parlement leur a finalement attribué. Le Conseil Central de Surveillance Pénitentiaire avait, par exemple, rentré une demande 8,34 millions d’euros mais n’en recevra «que» 6,7 en 2026 (6,56 millions avaient été octroyés pour 2025). «Cela compromet le mécanisme national de prévention contre la torture, s’inquiète Marc Nève, président du Conseil Central de Surveillance Pénitentiaire (CCSP). Il s’agit d’un engagement pris par la Belgique, qui était l’un des derniers pays de l’ONU à ne pas l’avoir encore fait, afin d’investiguer et d’établir des rapports sur les conditions humaines et de torture dans les lieux de privation de liberté du pays, comme les prisons ou les centres fermés. Nous avions engagé un équivalent temps plein en 2025 pour lancer le projet qui devait s’accomplir en 2026. Avec le gel du recrutement, je ne sais pas comment on pourra faire ces visites.»
L’avocat souligne, lui aussi, une certaine incohérence entre la politique de l’Arizona et la réduction de l’amplitude des les organes de contrôle dont il est question. «Au fil du temps, le Parlement nous a confié de plus en plus de missions. Il y a par exemple une prison qui vient d’ouvrir à Anvers, il faut créer une commission de surveillance en parallèle. Mais on n’a pas fermé la vieille prison d’Anvers pour autant et donc nous sommes à court de budget. L’un dans l’autre, il y a de plus en plus de gens concernés par la politique répressive du pays, et on a l’impression que le Parlement ne se rend pas bien compte de notre réalité.»
L’APD devra éventuellement revoir ses ambitions visant à la poursuite de certains dossiers de plainte, notamment.
L’Autorité de Protection des Données (APD) est face à des contraintes similaires. L’organisme avait demandé un budget de 16,83 millions d’euros mais n’en percevra seulement 15,88 millions. «Cette demande budgétaire visait à répondre notamment à de nouvelles compétences que nous devons assumer dans le cadre de l’application de réglementations européennes, telles que celles sur la publicité électorale, l’European Health Data Space, le Data Act ou encore l’AI Act.» L’APD doit également traquer les acteurs qui commettent des violations massives de données. Chargé de missions obligatoires, l’organisme «devra éventuellement revoir ses ambitions visant à l’écoute, à l’aide et à l’accompagnement des entreprises, la réponse aux questions de citoyens et entreprises ainsi que la poursuite de certains dossiers de plainte».
Vers une fusion des organes de contrôle ?
Le chef de file du MR au parlement, Benoît Piedboeuf, assume tout à fait la position de la majorité. «Il y a en effet eu une augmentation des demandes de la Chambre envers les organes de contrôle. L’idée est ici de baisser le coût de ces institutions et celle de la Chambre également. Cela ne veut pas dire que l’on va cesser de faire appel aux organes de contrôle, mais s’ils n’ont pas la capacité d’assumer le travail demandé, il faudra peut-être faire preuve d’un peu plus de patience.»
Dans les justifications autour du gel du recrutement, on retrouve aussi la nécessité de plus grandes synergies entre les organes de contrôle. «Nous sommes demandeurs de cette synergie dans le milieu, avance Marc Nève. Un seul statut pour toutes institutions, voire une seule grande institution, ça nous parle. Mais c’est au parlement de l’organiser.» Benoît Piedboeuf rappelle qu’un travail en ce sens avait été entamé (mais pas terminé) lors de la précédente législature par le MR, le PS et l’Open VLD. «On se rend compte que certains font peut-être le même travail ou presque. Ce qui induit probablement une rationalisation.»