Activiste militant pour les droits des personnes homosexuelles cachée derrière le drapeau arc-en-ciel. © Reuters

Pas très gay friendly l’Inami

François Remy
François Remy Journaliste

L’institut de l’assurance-maladie avait promis de nouveaux subsides à l’asbl Ex Aequo. Des dizaines de milliers d’euros lui étaient réservées pour son projet de dépistage démédicalisé du VIH en milieu gay. Mais en dernière minute, l’Inami a changé d’avis, invoquant des raisons budgétaires. Motifs insensés et contraires à la politique de santé, déplore Ex Aequo. En interne, certains confient que cette décision arbitraire émane du cabinet De Block. La ministre aurait cédé aux pressions de médecins inquiets de se voir remplacer.

Une nouvelle polémique vient entacher le Plan national de lutte contre le Sida, déjà bien brouillon. Fin de l’année passée, l’Inami s’était engagé à renouveler automatiquement en 2015 les subventions précédemment octroyées dans ce cadre à certains projets associatifs. À l’instar de Test-out, le projet de dépistage délocalisé et démédicalisé en milieu gay de l’asbl Ex Aequo. « Un médecin délègue à une infirmière responsable du projet qui dispatche ensuite des volontaires dans les endroits communautaires », rappelle Michael François, responsable de la communication d’Ex Aequo.

En février dernier, lors d’un comité d’accompagnement des projets, l’Inami a présenté la répartition des financements, dans laquelle apparaissaient les 44.000 euros réservés à l’association. Mais à peine trois semaines plus tard, une personne proche du dossier à l’Inami alerte Ex Aequo. L’asbl apprend alors de façon informelle que les projets des quatre associations d’accompagnement des travailleurs du sexe seront subsidiés. Contrairement au dépistage démédicalisé.

Abandon sans raison

Sous quel motif le projet d’Ex Aequo a-t-il été rejeté ? Budgétaire, dit-on. À l’heure d’écrire ces lignes, elle n’a pas encore reçu la notification officielle de l’Inami. Le Comité de l’assurance s’est réuni ce lundi et a effectivement décidé d’accorder 644.000 euros « pour l’élaboration du matériel de sensibilisation comme des sites web ou des dépliants » aux associations Ghapro, Pasop, EspaceP et Alias.

« C’est 13,4% de plus qu’en 2014 », a senti bon de préciser la ministre de la Santé Maggie De Block (Open Vld). Autrement dit, près de 80.000 euros supplémentaires. Donc, les travailleurs du sexe passent en priorité par rapport aux homosexuels, budgétairement à tout le moins.

Pour Ex Aequo, l’argument financier ne tient pas la route. Pas plus que l’argument scientifique. Cette décision va à l’encontre des recommandations internationales et même de l’Ordre des médecins, d’avis qu’un dispositif démédicalisé doit venir compléter le circuit classique de dépistage.

« Cette décision est insensée. On a prouvé l’utilité du projet. 2,35% de résultats positifs sur 511 dépistages en 2014. Les médecins généralistes n’ont jamais atteint pareil taux de découverte de séropositivité », souligne Michael François.

Quand elle voit à quel point elle a dû batailler pour obtenir les subsides en 2014, Ex Aequo estime que Maggie De Block a cédé au lobbying médical. « On nous a dit que des médecins siégeant au sein de l’Inami bloquaient. Certains ont peur de perdre leur périmètre d’action. Peut-être aussi des financements pour leurs centres de référence. Mais on nous a fait comprendre que le cabinet De Block avait donné l’injonction », conclut le porte-parole.

Forte de ce constat, Ex Aequo a organisé une mobilisation ce mercredi devant le siège de l’Inami à Bruxelles. Plusieurs associations LGBT et de prévention Sida s’y retrouvent sur le temps de midi pour dénoncer la situation et appeler à un remaniement de la politique de santé sur les questions liées au VIH.

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