Philippe Moureaux © Belga

Moureaux : « Publifin est un véritable coup de poing dans le visage du PS »

Pierre Havaux
Pierre Havaux Journaliste au Vif

Retiré de la politique active, Philippe Moureaux (PS) parle de  » coup de poing  » porté au PS par l’affaire Publifin. Pour le parti, l’heure est venue d’atterrir. Avec ou sans Elio Di Rupo pour éviter le crash ? Le ténor socialiste réserve sa réponse.

Le Vif/L’Express. L’affaire Publifin a fait l’effet d’une bombe. Elle vous a aussi secoué ?

Philippe Moureaux. J’ai été à moitié surpris en la découvrant. Il y avait déjà eu beaucoup de révélations plus ou moins étouffées sur ce qui se passait autour de Stéphane Moreau et des finances qu’il manipule. On savait qu’il se passait là des choses qui n’étaient peut-être pas très opportunes. Depuis un bon bout de temps, et je n’étais pas le seul à le penser au parti, on craignait qu’après les affaires à Charleroi une explosion ne se produise à Liège. Elle est effectivement intervenue. Mais elle a révélé un certain nombre de faits que je n’imaginais même pas. Aller jusqu’à bénéficier de rémunérations sans rien faire…

Comment qualifier le mécanisme mis en place ?

Le système revenait à déposséder les représentants des communes de tous leurs pouvoirs. On les a endormis en leur payant des jetons de présence. Et on a fait peur aux gens.

Ce sont là les caractéristiques d’un système « mafieux » ?

Je n’utiliserais pas directement ce terme mais on est tout de même face à une construction inquiétante. Et si un socialiste en est la cheville ouvrière, le MR et le CDH y ont collaboré avec joie. Ils ont accepté les principes du système et en ont recueilli les fruits.

Ce qui devait faire pas mal de monde dans la confidence…

A Liège, beaucoup de gens devaient vraisemblablement savoir, y compris les leaders libéraux liégeois dont on parle pourtant très peu et qui sont même, pour certains d’entre eux, en train de nous faire la leçon.

Cette affaire, c’est une fameuse épine dans le pied du PS…

C’est plus qu’une épine, c’est un véritable coup de poing dans le visage que le parti vient de recevoir.

Comparable à l’uppercut encaissé lors des affaires de Charleroi en 2007 ?

Je dirais d’une autre nature. Ici, le PS n’est pas seul impliqué dans l’affaire Publifin, même s’il est toujours plus fragile que les autres partis dans des matières liées à l’argent et l’éthique, étant donné les valeurs qu’il porte. Curieusement, pour les libéraux, on leur passe beaucoup, tandis que le CDH joue à celui qui va assainir alors que ses relais locaux sont aussi mouillés dans l’affaire. Tout cibler sur un parti, comme la presse le fait, alors que le système englobe une partie importante du monde politique de la province de Liège, c’est regrettable.

Comment le PS peut-il atterrir au milieu d’une telle tempête ?

Il doit commencer par aller jusqu’au bout dans l’éclatement de la vérité, même si cela occasionnera des douleurs. Ensuite, il faudra changer certaines choses. Je crains que les mesures de gouvernance publique qui ont été très vite annoncées ne touchent beaucoup de monde mais pas nécessairement ceux qui sont directement à l’origine de ce système. Le député d’une petite ville qui fait bien son boulot devrait se voir priver d’une partie de ses rentrées financières. C’est lui qui va subir la foudre alors qu’il n’est pour rien dans le désordre créé.

Elio Di Rupo peut encore être l’homme de ce sursaut ?

On peut l’espérer…

Le président du PS en a toujours la crédibilité ?

C’est dur pour lui, mais bon… Il a voulu reprendre la présidence du PS, c’est à lui à assumer.

Vous êtes sceptique sur ses chances de réussite ?

(Silence, il fait la moue.) Ce ne sera pas facile pour lui. Mais je n’en dirai pas plus.

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