Renaud Duquesne

Menace de niveau 4 : n’est-il pas temps qu’on en sache plus ?

Renaud Duquesne Avocat à Marche-en-Famenne

La peur est un sentiment normal et salutaire. Elle permet d’éviter les situations dangereuses et d’induire des réflexes salvateurs. Mais elle ne doit pas conditionner notre vie, la régir et nous paralyser.

Le gouvernement, face aux menaces existantes (dont nous ignorons les tenants et les aboutissants, nous dit-on pour des raisons d’efficacité d’action), a pris des mesures sécuritaires sans pareil pour protéger les biens et les personnes. L’unité nationale est invoquée par tous pour légitimer l’action de nos forces de l’ordre et de nos militaires. De fait, le pays doit être uni face aux actes barbares commis ou en voie d’être commis.

Uni, car les actes posés menacent notre mode de vie, notre démocratie et ce que nous sommes. Non pas que nos valeurs doivent l’emporter sur d’autres, mais bien par ce que ce sont les nôtres et qu’elles sont porteuses d’émancipation et de liberté. On a le droit, voire le devoir, de les revendiquer et de les citer en exemple.

Mais l’unité, c’est aussi ne pas perdre son esprit critique quant aux mesures prises et leur mise en oeuvre. Nous sommes dans une démocratie et il serait paradoxal de la nier en exerçant son devoir de contrôle du pouvoir alors que les mesures prises sont justifiées par sa protection.

Les mesures prises ne peuvent être indéfiniment maintenues sans que les citoyens ne soient informés sur les raisons qui les justifient.

A défaut la peur deviendra une phobie. Elle nous paralysera et s’instillera entre nous. La stigmatisation prendra racine et les instincts les plus sombres d’une minorité extrémiste en notre pays émergeront et deviendront audibles.

Le parlement et les représentants des partis démocratiques doivent être informés par le premier ministre ,comme cela s’est fait en France. La responsabilité politique n’est pas que l’apanage des partis aux pouvoirs. Ainsi le contrôle démocratique sera garanti et sera de nature à rassurer la population.

N’oublions pas que la N-VA est au pouvoir. C’est un parti nationaliste qui rejette par essence l’autre et dont le discours sécuritaire et anti-immigration est constant depuis longtemps. Les mesures prises vont grandement dans le sens de son action politique. Son discours politique en devient dangereusement légitime alors qu’il est à l’opposé des valeurs d’ouverture et de tolérance qui sont celles de notre pays.

Les mesures d’exception doivent le rester. Sinon c’est l’exception qui deviendra la règle. Les libertés individuelles peuvent être restreintes temporairement, mais elles ne peuvent être abolies indéfiniment. Le parlement se doit de contrôler l’exécutif et le pouvoir judiciaire. Cela s’appelle la séparation des pouvoirs. Elle a la base de notre constitution qui est l’acte fondateur de notre démocratie.

On ne peut donc donner de blanc seing au pouvoir en place sans contrôle de son action. Cela ne veut pas dire remettre en cause l’autorité agissante, mais au bien au contraire de légitimer son action. Mon propos ne doit pas induire dans l’instant une réponse, mais doit inciter les consciences de tous à rester en alerte tant par rapport au danger que font peser les terroristes sur notre pays que par rapport à nos fondements démocratiques.

 » Sans la liberté de blâmer, il n’est point d’éloge flatteuse… Il n’est que les petits hommes qui craignent les petits écrits « . (Beaumarchais : le mariage de figaro)

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