Mehdi Nemmouche et son avocat Sébastien Courtoy

Mehdi Nemmouche transféré en France

Mehdi Nemmouche, le tueur du musée juif de Bruxelles récemment condamné à la perpétuité en Belgique, a été remis mercredi à la justice antiterroriste française qui le soupçonne d’avoir été l’un des geôliers de journalistes séquestrés en Syrie en 2013-2014.

Tueur « psychopathe » sans remords ni compassion, selon l’avocat général belge, ce Français de 34 ans avait comparu une première fois devant le magistrat parisien chargé de cette affaire lors d’un bref aller-retour depuis la Belgique, le 15 novembre 2017.

Soupçonné d’avoir séquestré quatre journalistes français qui l’ont ensuite identifié, Mehdi Nemmouche était reparti de Paris après sa mise en examen pour « enlèvement et séquestration en bande organisée et en relation avec une entreprise terroriste » et « association de malfaiteurs terroriste criminelle ».

A l’époque, ce délinquant multirécidiviste, radicalisé en détention puis passé par la Syrie, devait rester aux mains de la justice belge en vue de son procès pour la tuerie dans la capitale belge.

Malgré ses dénégations, la cour d’assises de Bruxelles a considéré qu’il était bien l’homme ayant ouvert le feu dans le hall d’entrée du Musée juif, le 24 mai 2014, tuant deux touristes israéliens, une bénévole française et un jeune employé belge.

Mehdi Nemmouche, natif de Roubaix, avait été arrêté à Marseille six jours après la tuerie, en possession des armes – un revolver et un fusil d’assaut de type Kalachnikov – utilisées au cours de cet attentat, le premier commis en Europe par un combattant de retour de Syrie, selon l’accusation belge.

Sa condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité, le 12 mars, a ouvert la voie à sa remise aux autorités françaises.

« La remise avait été différée par le procès à Bruxelles » a déclaré vendredi à l’AFP une source judiciaire en Belgique, selon laquelle le jihadiste « en a terminé a priori avec la phase judiciaire » locale. Ses avocats n’ont en effet pas formé de pourvoi en cassation.

Silence

Mehdi Nemmouche, qui était détenu depuis 2017 dans la prison de Leuze-en-Hainaut près de Tournai en Wallonie (sud), a donc été transféré mercredi en exécution du mandat d’arrêt européen émis en juin 2016 par la France dans l’affaire des otages, selon une source judiciaire confirmant une information de L’Express.

Après avoir été présenté au juge d’instruction Bertrand Grain, il a été placé en détention provisoire à la prison de Meaux-Chauconin, à l’est de Paris, selon une source pénitentiaire.

« Il ne s’agit pas encore de lui faire purger sa peine belge en France », a déclaré vendredi à l’AFP son avocat Me Francis Vuillemin, « pour cela un autre processus est en cours ».

Le juge Grain devrait prochainement le convoquer pour un nouvel interrogatoire, mais risque d’être de nouveau confronté à son mutisme: en juillet 2018, le magistrat s’était rendu en Belgique pour entendre Mehdi Nemmouche, mais ce dernier avait opposé le droit au silence à la soixantaine de ses questions lors d’une audition de 45 minutes, selon Me Vuillemin.

« Il finira certainement par s’exprimer, sans doute pas devant le juge d’instruction mais devant la cour d’assises, si jamais il devait être renvoyé », veut croire Me Vuillemin.

« Je pense qu’il sera plus prolixe qu’en Belgique, paradoxalement cette procédure française l’intéresse plus », ajoute-t-il.

« C’est son intérêt judiciaire de s’exprimer un jour, il a des choses à dire sur son parcours », pense son avocat.

Auprès des services de renseignements, les journalistes Didier François, Pierre Torrès, Edouard Elias et Nicolas Hénin, enlevés en Syrie en juin 2013 et libérés le 18 avril 2014, avaient identifié, plus ou moins formellement, Mehdi Nemmouche comme l’un de leurs geôliers.

Certains d’entre eux s’étaient alors exprimés publiquement. Nicolas Hénin a notamment raconté au Point avoir été « maltraité » par Nemmouche, désigné comme « Abou Omar le cogneur », lorsqu’il était retenu notamment à l’hôpital ophtalmologique d’Alep, transformé en prison par le groupe État islamique (EI).

« Quand il ne chantait pas, il torturait », avait relaté l’ex-otage.

Les journalistes avaient reconnu d’autres figures du jihadisme parmi leurs geôliers: Najim Laachraoui, l’un des deux kamikazes mort le 22 mars 2016 dans l’attentat à l’aéroport de Bruxelles et Salim Benghalem, un proche des frères Kouachi, auteurs de l’attaque contre Charlie Hebdo à Paris en janvier 2015.

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