Magnette refuse de parler en néerlandais: « l’animal acculé fait parfois de drôles de bonds »

Paul Magnette a refusé de répondre en néerlandais aux questions de VTM sur Publifin. « Une faute capitale pour un parti qui ne souhaite pas réveiller le fantôme du communautaire » dit le politologue Nicolas Bouteca (UGent).

Le scandale Publifin plombe le PS. Le ministre président de Wallonie en a tout doucement marre des critiques et l’a bien montré lors d’une interview accordée au journal de VTM. Il a tout simplement refusé de répondre en néerlandais à une question sur Publifin. « Non, je ne le fais pas en néerlandais, mais en français. J’en ai marre des critiques flamandes autour de pratiques mafieuses, etc. Donc, non, cette fois-ci , je ne le dirais pas en néerlandais. Voilà. »

« Un animal acculé fait parfois des drôles de bonds » explique le politicologue Nicolas Bouteca, de l’UGent. « Je vois bien qu’il a fait cette déclaration sous le coup de l’émotion, mais cela ne correspond pas à la réalité. C’est François Gemenne, un politologue francophone, qui le premier a utilisé l’expression ‘pratiques mafieuses’. Ce que Magnette dit est donc faux : c’est de la Wallonie qu’est venu le lien avec la mafia. »

Sur Twitter vous avez dit qu’il s’agissait d’une faute capitale venant d’un parti qui souhaite laisser le dossier communautaire au placard…

Bouteca: « Les Flamands sont très sensibles au niveau de la langue et y accordent beaucoup d’importance. C’est probablement pour cela que Charles Michel jouit d’une importante popularité en Flandre, parfois plus importante qu’en Wallonie. Cela a beaucoup à voir avec sa connaissance du néerlandais. On a pu constater l’effet inverse avec Di Rupo. On ne le voyait pratiquement jamais à la télé en Flandre parce que son néerlandais était hésitant. Cela a certainement joué sur sa popularité. Que Magnette communautarise l’affaire, en tant que politique d’un parti qui souhaite éviter le sujet un maximum, cela n’a juste aucun sens.

La critique envers l’affaire Publifin n’est pourtant pas déplacée ?

« Je crois qu’il est aussi frustré par le fait qu’il n’y ait que le PS qui soit mis en cause alors que le MR et le cdH sont aussi dans les conseils d’administration. Les mandataires MR ont tous démissionné de Publifin. En partie pour faire savoir la couleur et aussi pour se dédouaner. C’est vrai que c’est un peu injuste que le PS soit l’unique parti visé dans cette question. Mais c’est aussi le parti le plus important de Wallonie et il a toujours occupé des fonctions dans les comités de gestion.

Est-ce que ces propos traduisent une certaine impuissance ? Magnette est furieux, mais l’aile liégeoise est influente dans son parti …

« Il a dit qu’il ignorait tout de Publifin, mais on peut à juste titre se demander si, vraiment, les membres dirigeants du parti ne savaient rien. Pour l’instant, il n’y a aucune preuve, mais nul ne sait ce que les prochains jours vont apporter. Réagir de cette façon montre tout même un certain sentiment d’impuissance. Ce n’est pas du tout rationnel. L’étrangeté d’une telle déclaration montre bien l’étendue des pressions exercées sur le PS. Une pression qui se traduit aussi dans les sondages avec la montée du PTB. Que le ministre président wallon lance ce genre de diatribes, c’est réellement du jamais vu. Il subit d’énormes pressions. Ce qui explique sans doute cette déclaration – he oui- idiote. »

Est-ce que ce scandale va coûter beaucoup d’électeurs au PS ?

« C’est ce que tout le monde pense, surtout avec un parti qui comme le PTB joue à fond la carte de l’anti-establishment. Maintenant les élections ne sont pas toutes proches et le PS va chercher à faire table rase aussi vite que possible. Il a déjà annoncé une révolution. On souhaite visiblement que tout cela ne soit plus qu’un mauvais souvenir et ait le moins de conséquences possible sur le résultat des urnes. Sauf que cela va être très difficile de faire comme si de rien n’était et de rapidement oublier tout ça.