© Olivia Mortier

L’oeuvre de la semaine: A table….

Guy Gilsoul Journaliste

Imaginez une petite fille. Elle s’appelle Olivia et vit, à l’heure des trente glorieuses, dans un paysage où l’industrie de la céramique et des faïences créée au XIXe siècle, fut à la base d’une production légendaire qui fit vivre bien des villes et des villages.

En 1844, par exemple, ils étaient déjà 300 ouvriers et artisans à rejoindre l’usine Keramis construite par Victor Boch trois ans plus tôt. Ils seront 600 en 1900 et plus de 1300 dans les années 1930. Si, à l’âge de l’enfance d’Olivia Mortier, l’usine connait ses heures noires et bientôt sa fermeture, chacun à La Louvière garde, jusque dans les plus modestes demeures et souvent de père en fils, les traces vives d’un patrimoine à la dérive.

Dans la maison de sa grand-mère où elle se réfugie souvent, tout lui parle de cet artisanat. Ce sont des carreaux de faïence, des pavements, des tasses, des vases, des assiettes et avec eux, un répertoire abstrait ici, végétal ou historié ailleurs. Alors d’abord, comme toute une population qui rêve de résilience, elle fuit son passé, s’engage un temps dans l’univers du théâtre avant de se voir sourire quand elle plonge ses mains dans la terre glaise et qu’elle découvre le séculaire métier des céramistes. De là, à rejoindre l’univers des images auxquelles elle avait sans doute confié bien des secrets dans ses jeunes années, il n’y avait qu’un pas, lourd d’émotions.

Ainsi ce patrimoine lui parlait depuis toujours et elle ne l’avait pas entendu. Ainsi lui fallait-il désormais dialoguer avec lui, retrouver les gestes anciens tout en refusant le fini de l’objet industriel qui fit la célébrité des productions Boch. Il fallait l’enrober de sentiments divers, des plus tristes aux plus drôles, il fallait bouleverser même et surtout de façon un peu brute, les répertoires décoratifs et les techniques. Oser raconter sa propre histoire à travers les miroirs d’un patrimoine.

Des « assiettes parlantes » (une des spécialités des faïenceries Boch), elle ferait donc des assiettes érotiques non dénuées d’humour et sur les grands vases à « bouquets », des combats avec le géant Goliath. Enfin, autour de la table dressée de faïence blanche, elle déposerait des portraits d’une famille enfin réunie : « comme dans un rêve », précise-t-elle.

Ath, Palace, 4 rue de Brantignies. Jusqu’au 14 mars. Le mardi de 14h à 18h, du mercredi au samedi de 10h à 13h et de 14h à 18h. www.maisonculturelledath.be

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