N-VA et PS, la fausse alliance. © BENOIT DOPPAGNE/BELGAIMAGE

Les amis de l’alliance, le bluff du MR

Nicolas De Decker
Nicolas De Decker Journaliste au Vif

En campagne plus que jamais, les partis accommodent la réalité à leur propre sauce. Le Vif/L’Express n’est pas tout à fait d’accord. Voici pourquoi.

Durant sept semaines, focus sur un parti francophone en lice pour le scrutin du 26 mai prochain. Cette semaine: le MR

« Le cocktail national socialiste « , avait-il dit en un douteux lapsus.  » L’axe du shutdown « , répète-t- il sans arrêt.  » L’axe du blocage « , traduit-il inlassablement. Toute la campagne de Charles Michel, depuis que la N-VA a fait tomber son gouvernement, repose sur ce syllogisme :

la gauche socialiste wallonne s’oppose au gouvernement de Charles Michel ;

la droite nationaliste flamande s’oppose au gouvernement de Charles Michel ;

donc la droite nationaliste flamande et la gauche wallonne sont alliées.

PS et N-VA en particulier se seraient ainsi associés pour démanteler un Royaume que seul Charles Michel défendrait, et toute personne soucieuse d’éviter l’éclatement de la Belgique devrait conséquemment voter pour Charles Michel et son parti.

Ce syllogisme, bien sûr, n’est pas seulement réducteur. Il est captieux.

Il est captieux politiquement car les uns et les autres se sont opposés à son gouvernement pour une raison opposée diamétralement. Les syndicats, le PS, le PTB et Ecolo l’ont combattu parce qu’il était trop à droite. La N-VA l’a quitté parce qu’il ne l’était pas assez. Ce constat, accessible au plus distrait des étudiants en BA1 en science politique, devrait suffire à rendre gauche wallonne et droite flamande mutuellement exclusives.

Il est captieux arithmétiquement parce que la situation de blocage auquel se réfère sempiternellement Charles Michel, c’est celle de 2010, où les résultats des élections législatives anticipées avaient mené aux longuissimes négociations menant à la sixième réforme de l’Etat et à l’installation du gouvernement Di Rupo. Or, en 2010, l’ensemble des partis flamands réclamaient une réforme de l’Etat, pas seulement la droite nationaliste flamande, qui ne le demande du reste qu’à mi-voix. Et en 2010, la gauche socialiste wallonne se trouvait à un niveau beaucoup plus élevé qu’elle ne le sera au soir du 26 mai.

Il est captieux factuellement parce que celui qui s’est allié à la N-VA, c’est Charles Michel, et que c’est son choix, courageux en un sens, décisif dans tous les cas, qui a fait entrer les indépendantistes flamands dans le gouvernement d’un pays dont ils veulent la disparition. C’est lui aussi, Charles Michel, qui s’est, quatre années durant, réjoui de la loyauté de la N-VA, et qui a déploré s’être trompé à son sujet.

Il est captieux moralement, aussi. En 2014, les socialistes voulaient gouverner au fédéral avec Charles Michel. C’est lui qui ne l’a pas voulu, alors qu’il avait promis ne pas vouloir gouverner avec les nationalistes.

En 2018, Charles Michel voulait continuer à gouverner au fédéral avec les nationalistes. Ce sont eux qui ne l’ont pas voulu.

En 2019, Charles Michel veut gouverner avec les nationalistes ou avec les socialistes. Les uns ne veulent pas des autres et les autres ne veulent pas des uns. Mais pour gouverner avec les uns ou les autres, il doit faire croire qu’ils le veulent. Il veut que les gens pensent que c’est lui qui n’a pas voulu des nationalistes et que ce sont les socialistes qui n’ont pas voulu de lui, à la fin 2018 lorsque son parti, comme le Parti socialiste et contre la N-VA, a soutenu le Pacte de l’ONU sur les migrations. En les mettant côte à côte alors qu’ils sont dos à dos, il veut pouvoir choisir entre les uns et les autres. Donc, il bluffe.

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