Georges-Louis Bouchez, président du MR. © Belga

Le MR et le pouvoir démesuré de longue durée

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

Georges-Louis Bouchez ne souhaite pas de négociations gouvernementales en juin. Les libéraux francophones prolongent leur long séjour au pouvoir. Une rente de situation grâce aux crises.

Le MR a pris un jour ses responsabilités comme seul parti francophone au gouvernement francophone au sein de la suédoise. Depuis, il a acquis un poids démesuré au sein de cet exécutif. Pas moins de sept ministères, dont le Seize rue de la Loi, pour à peine plus d’un cinquième de l’électorat francophone: c’est fameux. Au moment de la suédoise, le parti libéral avait d’ailleurs été conspué par les autres partis francophones tant il désservait la cause francophone en étant à ce point ultra-minoritaire en représentation et, faut-il ajouter, à ce point majoritaire en terme de maroquins.

Le temps a passé et le MR est resté tout aussi surreprésenté. La N-VA a claqué la porte du gouvernement en décembre 2018 et le MR est resté bien accroché à la tête d’un gouvernement minoritaire en affaires courantes. Les élections de mai 2019 ont rebattu les cartes de façon insoluble et le MR est resté à la tête d’un gouvernement pendant le blocage politique, N-VA et PS étant incapables de s’entendre. La crise sanitaire est arrivée et le MR a non seulement maintenu sa position, mais sa Première ministre Sophie Wilmès dispose désormais de pouvoirs spéciaux et de l’appui… des partis francophones d’opposition qui le conspuaient. Lors des négociations, pour ne pas troubler l’ordre établi en pleine urgence, le MR a même obtenu le maintien… de tous ses ministres. Une prouesse.

Alors que l’on s’oriente peu à peu vers la sortie de crise, avec un déconfinement (très) progressif attendu à partir du 3 mai, Bart De Wever, président de la N-VA, exprimait ce lundi matin sa volonté de réouvrir les négociations gouvernementales au mois de juin. Le premier parti flamansd (sorti des urnes) n’a pas avalé l’échec du dialogue avec le PS et le maintien de ce gouvernement sans ls deux principaux partis flamands, la N-VA donc et le Vlaams Belang.

Réponse de Georges-Louis Bouchez, président du MR, au Soir: « Il n’est pas question de parler de négociations gouvernementales alors qu’on a encore aucune certitude sur la sortie de crise sanitaire. Nous n’entamerons pas le moindre processus de formation tant qu’il n’y a pas de stratégie stable de déconfinement. Cela sera très difficile à court terme sachant que le déconfinement va commencer dans 15 jours et qu’il y aura peut-être des retours en arrière. S’il y a un processus de formation, cela va tanguer, et s’il y a de nouvelles urgences sanitaires, il faudra prendre des décisions urgentes qui ne peuvent être prises sereinement dans ce genre de climat. » Plus probablement, le président du MR opte pour d’éventuelles négociations en septembre… si tout va bien.

Le MR prend visiblement goût à cette situation prolongée où il prend ses responsabilités avec un nombre important de ministres. D’autant qu’entretemps, il a retrouvé le pouvoir dans les majorités régionales dont il avait été longtemps écarté. Si l’on ne volait pas, dans ce pays, de crise en crise, des voix d’opposition ne manqueraient pas de s’élever pour dire qu’il y a comme un petit problème démocratique dans cette rente de situation. Impossible: l’urgence sanitaire impose la continuité du pouvoir et expose ceux qui la critiquerait au risque d’un retour de bâton dans l’opinion. Jusqu’ici, du moins.

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