Le Conseil d’Etat annule le refus de nomination des bourgmestres de communes à facilités

Le Conseil d’État a annulé mardi le refus par la ministre des Affaires intérieures flamandes, Liesbeth Homans, de nommer les bourgmestres francophones des quatre communes à facilités de Rhode-Saint-Genèse, Wezembeek-Oppem, Drogenbos et Linkebeek.

Selon la nouvelle loi communale, cet arrêt rendu mardi par la chambre bilingue de la Haute instance emporte automatiquement la nomination définitive des intéressés à la fonction de bourgmestre, à savoir Pierre Rolin (Rhode-Saint-Genèse), Frédéric Petit (Wezembeek-Oppem), Alexis Calmeyn (Drogenbos) et Yves Ghequiere (Linkebeek).

Les auditeurs francophone et néerlandophone de cette instance de recours avaient recommandé à celle-ci d’annuler la décision prise en février dernier par la ministre de la formation nationaliste flamande.

A l’initiative de la Mme Homans, le gouverneur du Brabant flamand, Lode De Witte avait envoyé des convocations électorales en néerlandais aux habitants des communes à facilités de la périphérie de Bruxelles, en vue des élections communales d’octobre dernier.

Les majorités politiques de quatre des six communes à facilités avaient aussitôt décidé d’envoyer malgré tout elles-mêmes des convocations, mais en français pour les habitants francophones qui se sont fait enregistrer sous le rôle linguistique français pour recevoir durant quatre ans leurs documents administratifs dans la langue de Voltaire.

Cette démarche est conforme à deux arrêts du Conseil d’Etat dans lesquels celui-ci avait précisément estimé que les habitants francophones des communes à facilités qui souhaitent recevoir leurs documents administratifs en français peuvent les obtenir à partir d’une seule demande valable durant quatre ans.

Les autorités flamandes estimaient que leur législation prévalait. Celle-ci impose aux francophones des communes à facilités de demander une traduction dans leur langue maternelle, à chaque envoi de document qui doit leur être adressé en néerlandais.

Dans ses arrêts 245.052, 245.053, 245.054 et 245.055 rendus mardi, le Conseil d’état leur a donné tort jugeant « inadéquat » ce motif des arrêtés ministériels de refus de nomination de la décision flamande, « à savoir que les bourgmestres désignés précités ont enfreint les lois sur l’emploi des langues en matière administrative en prêtant leur concours à l’envoi des lettres de convocation pour les élections locales et provinciales du 14 octobre 2018 selon l’appartenance linguistique des électeurs ».

L’assemblée générale de la section du contentieux administratif du Conseil d’Etat « confirme ainsi l’interprétation qu’elle a donnée antérieurement aux lois sur l’emploi des langues en matière administrative dans ses arrêts nos 227.775 et 227.776 du 20 juin 2014 en ce qui concerne l’emploi des langues par une autorité locale à l’égard de particuliers dans les communes périphériques et qu’elle a déjà rappelée à de nombreuses reprises depuis, et que le gouvernement flamand ne peut ignorer », a-t-elle souligné.

Dans les communes concernées, la nomination des bourgmestres aura pour effet de permettre la nomination d’un échevin supplémentaire dont elles étaient jusqu’ici privées de facto en l’absence de bourgmestre en titre.

« Une victoire de la démocratie; un plus pour la Belgique »

L’annulation par le Conseil d’Etat des arrêtés de la ministre des Affaires intérieures flamandes refusant la nomination des bourgmestres de quatre des six communes à facilités de la périphérie de Bruxelles a été accueillie, mardi, avec soulagement et une grande satisfaction par les intéressés. Pour celui de Linkebeek, Yves Ghequière, il ne s’agit pas seulement d’une première victoire sur le plan juridique, mais aussi d’une « victoire de la démocratie ».

Son collègue de Wezembeek-Oppem, Frédéric Petit, s’est dit très fier d’avoir été « nommé bourgmestre par une instance fédérale. La Belgique existe donc toujours », a-t-il commenté.

Selon le bourgmestre MR, l’arrêt rendu contribuera à la paix communautaire dans le pays en confortant le fait que les francophones des communes à facilités ne doivent plus signaler qu’une fois tous les quatre ans qu’ils désirent recevoir leurs documents de l’administration en français.

Les deux bourgmestres se sont par ailleurs réjouis de la perspective de l’installation toute proche de l’échevin supplémentaire auquel chacune de leurs communes a désormais droit.

A Linkebeek, c’est Marco Schetgen qui montera au collège à ce titre.

A Wezembee-Oppem, ce sera Jérome Delcourt. Le conseil communal sera convoqué aussi rapidement que possible pour permettre son installation, a précisé M. Petit.

On aurait pu régler la question des nominations depuis bien longtemps, estime O. Maingain

Le président de DéFI, Olivier Maingain, ne s’est pas montré très surpris, mardi soir, de la décision du Conseil d’Etat d’annuler le refus de nommer les bourgmestres de quatre communes à facilités de la périphérie de Bruxelles.

Pour lui, on aurait pu régler la question des nominations de bourgmestre des communes à facilités avec efficacité, depuis longtemps, si les francophones avaient concrétisé leur engagement à échanger la scission de l’arrondissement de Bruxelles-Hal-Vilvorde contre l’élargissement de Bruxelles à ces communes à statut spécial.

« Il est pénible de devoir aller systématiquement devant le Conseil d’Etat pour faire valoir les droits des francophones en périphérie. Si Bruxelles était élargie aux six communes à facilités comme tous les partis francophones s’y étaient engagés en contrepartie de la scission de l’arrondissement de Bruxelles-Hal-Vilvorde, on ne devrait pas perdre du temps en procédures pour contrer l’autoritarisme de l’autorité flamande qui ne respecte pas la loi », a commenté le président de DéFI.

Aux yeux d’Olivier Maingain, l’ex-ministre des Affaires intérieures flamandes, Liesbeth Homans (N-VA), devenue mardi ministre-présidente flamande, « se met systématiquement en dehors de la loi sur les facilités linguistiques ».

M. Maingain a par ailleurs jugé insupportable l’impact de la situation qui a prévalu depuis février dernier en termes de temps perdu et de coût pour les personnes concernées, ainsi que de privation d’un échevin pour les communes qui se sont trouvées sans bourgmestre nommé, durant plusieurs mois.

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