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La Wallonie voit la vie en rose

Insolent, après vingt ans de pouvoir, le PS parvient encore à survoler un scrutin électoral majeur. Son éternel rival, le MR, devra sérieusement se remettre en question, et il n’est pas impossible que Didier Reynders doive en payer le prix. Quant aux deux autres, le CDH et Ecolo, ils se maintiennent honorablement dans un contexte difficile.

Une curiosité, une attraction. Inusable PS, au pouvoir fédéral depuis plus de vingt ans et qui trouve encore le moyen de survoler ce scrutin de 2010. La recette, appliquée lors du scrutin régional de 2009, a fait à nouveau son effet. Simple, mais terriblement efficace. Le PS rempart contre la crise économique « libérale », le PS parti responsable sur le plan communautaire, défenseur du refinancement de la région bruxelloise. Il n’en faut guère plus à l’électeur wallon pour mordre à l’hameçon. Surtout, lorsque les préoccupations engendrées par BHV et le sort des francophones de la périphérie le laissent globalement froid.

Dominateur en Wallonie où il a récupéré sans difficulté son leadership perdu en 2007, bien présent en région bruxelloise quoique devancé par les libéraux: le PS a plus que surmonté le passage à vide encaissé au scrutin de 2007, qui fait presque figure d’exception, d’accident de parcours provoqué par les embardées politico-judiciaires des camarades carolos. Cette Wallonie qui garde le coeur obstinément accroché à gauche a franchement tourné le dos au basculement du centre de gravité politique.

Le parti qui caressait ce projet, qui avait réussi l’exploit de le mener à bien en 2007 en devenant le premier parti de Wallonie d’une courte tête, n’était plus en mesure de le rééditer lors de ce scrutin. Le MR espérait limiter la casse lors de ce scrutin, l’espoir a été déçu. Les libéraux francophones emmenés par Didier Reynders n’ont pu inverser le cours des événements qui s’annonçait: une contre-performance électorale en 2009 encore mal digérée, des blessures internes encore mal cicatrisées, un travail de refondation encore en cours.

Ces élections anticipées venaient trop tôt pour le MR et son président, dont la succession pourrait connaître un coup d’accélérateur en cas de renvoi dans l’opposition. A l’instar du CD&V en Flandre, le MR n’évitera pas une autocritique qui pourrait se révéler douloureuse. Elle ne pourra faire l’impasse sur un point lancinant de crispation: la place du FDF au sein du MR, s’il se confirmait que le parti d’Olivier Maingain a contribué de façon décisive à enrayer le recul du MR en région bruxelloise. Il y a de ces rapports de force en interne qui pourraient faire grincer des dents.

Le PS qui rit, le MR qui pleure. Et les deux autres membres de « la bande des quatre » au coude à coude. Joëlle Milquet évitera la triste sortie de Didier Reynders: elle clôture plus ou moins en beauté sa présidence du CDH. Son parti fait plutôt bonne figure alors que des sondages lui annonçaient un sort peu enviable. Le CDH va jusqu’à devancer son éternel rival Ecolo pour la troisième place dans le paysage politique francophone. Les Verts de Jean-Michel Javaux n’ont pas démérité mais n’ont pu aller au-delà d’une confirmation et d’une consolidation de leur retour en grâce entamé en 2007 et fortifié en 2009. Le thème éminemment communautaire du scrutin n’était certes guère porteur pour Ecolo. Mais il n’est pas interdit de penser que l’image de Jean-Michel Javaux écornée par des sorties médiatiques controversées a pu jouer dans ce coup d’arrêt.

Quatre partis traditionnels: le paysage politique francophone au complet? Plus vraiment. Sans réaliser un carton, le Parti populaire de Mischaël Modrikamen et de Rudy Aernoudt pointe le bout de son nez, jusqu’à pouvoir décrocher un siège de député. Ce qui ferait du PP, pour une première joute électorale, « le plus grand des petits partis ». Lesquels une fois de plus, en restent à des scores globalement confidentiels.

Pierre Havaux

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