La police évalue l’ampleur du chiffre noir de la criminalité

Pour la première fois depuis 10 ans, la police fédérale a organisé une vaste enquête pour sonder le sentiment de sécurité de la population, sa propension à porter plainte et son appréciation des services de police. Lus en parallèle avec les statistiques policières de criminalité pour 2018, les résultats publiés mercredi donnent une idée de l’ampleur du chiffre noir de la criminalité.

Le Moniteur de sécurité, dans le cadre duquel 168.206 citoyens de minimum 15 ans ont été interrogés entre mars et mai 2018, montre que la criminalité informatique est particulièrement sous-estimée.

D’après les statistiques officielles pour 2018, les faits de criminalité informatique enregistrés par la police ont augmenté de 14,8% en un an. Le « phishing » (le vol de données d’utilisateurs en se servant de faux sites internet) semble particulièrement en hausse: 1.277 faits ont été rapportés en 2018, contre 475 faits en 2017.

Mais, dans le même temps, il ressort du Moniteur de sécurité qu’à peine 14% des victimes d’un piratage de leur ordinateur ou smartphone au cours de l’année écoulée ont effectivement porté plainte. Pour les victimes d’escroqueries en ligne tout comme pour les intimidations et le harcèlement sur internet, cette proportion s’élève à 22%.

« En d’autres termes, quelque 200.000 infractions commises via internet n’ont pas été signalées », analyse la police fédérale. « Les différentes formes de criminalité informatique font partie des infractions dont les citoyens sont le plus souvent victimes, mais aussi des infractions les moins signalées à la police. »

Plus globalement, l’enquête interpelle sur l’ampleur de la face immergée de « l’iceberg » de la criminalité pour la plupart des faits, également en ce qui concerne les atteintes aux moeurs (82% de faits non dénoncés), les escroqueries en dehors d’internet (79% de faits non dénoncés) et les menaces en dehors d’internet (71%).

« Pourquoi dénonce-t-on plus certains faits que d’autres? Il y a un travail scientifique à mener. Certaines raisons peuvent être évidentes, comme dans les affaires de moeurs. Mais il se peut aussi qu’on ne contacte pas la police parce que le chef de corps nous a vu ivre la veille, parce qu’on n’a pas confiance en la justice,… C’est toute la chaîne qu’il faut questionner », a commenté le ministre de la Justice, Koen Geens.

Le précédent Moniteur de sécurité remontait à 2008. Réalisé tous les deux ans depuis 1997, ce travail avait été interrompu pour des raisons budgétaires. L’édition 2018 repose sur l’échantillon le plus large jamais atteint.

Cette enquête indique que 75% des résidents belges se sentent toujours ou presque toujours en sécurité dans leur quartier, une évolution positive de 11 points de pourcentage par rapport à 2008. C’est en Région de Bruxelles-Capitale et en province de Hainaut que les habitants se sentent le moins en sécurité. Le sentiment d’insécurité est également davantage présent chez les femmes (6,7% des femmes se sentent toujours ou souvent en insécurité, contre 4,74% des hommes) et parmi les jeunes de 15 à 24 ans (6,8% contre 5,4% pour les 65 ans et plus).

Les faits qui incommodent le plus les habitants sont la vitesse excessive des conducteurs et les dépôts clandestins d’immondices.

Le nombre total de faits enregistrés par la police l’an dernier est resté stable par rapport à 2017. Le vol et l’extorsion restent les infractions qui ont généré le plus de plaintes. Le nombre de vols a légèrement diminué, mais la police pointe tout de même une augmentation spécifique du nombre de faits de vol à la tire dans la capitale.

Tous les chiffres sont disponibles à l’adresse www.stat.policefederale.be.

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