Kaat Bollen en 2013 © Belga

« Il est inouï qu’en Flandre on dise encore aux femmes comment s’habiller »

Celine Bouckaert
Celine Bouckaert Journaliste au Vif

La psychologue et sexologue flamande, Kaat Bollen, s’est vue obligée de renoncer à son titre de psychologue après que la Commission des psychologues l’a mise en garde pour avoir diffusé des photos jugées trop sexy. L’affaire fait grand bruit en Flandre, où le ministre Bart Somers a pris sa défense.  » On dirait qu’on est revenu dans les années 1950 « .

En mars dernier, Kaat Bollen avait déjà écopé d’une mise en garde de la part de la Commission des psychologues, une institution indépendante chargée de reconnaître officiellement les psychologues et de veiller aux règles déontologiques. Un collègue psychologue s’était plaint des photos sensuelles de Bollen diffusées sur les réseaux sociaux, auprès de la commission. Le confrère de Bollen avait également dénoncé le film porna (du porno favorable à l’égalité homme-femme) réalisé par Bollen.

Dignité

La sexologue est allée en appel contre la mise en garde, mais fin de l’année passée, elle a été condamnée. La Commission estime que Bollen « doit être consciente de son statut et de sa dignité à tout moment, tant sur le plan professionnel que privé ».

« Sa démarche publique brouille la distinction [NLDR : entre sa profession et sa vie privée] et elle doit tenir compte du fait que son comportement peut nuire à la profession. Cette image de la profession de psychologue est alimentée par la publication de photos de nus ‘artistiques’, de spectacles burlesques, de publicités pour un film porno et d’une boutique en ligne proposant des articles érotiques », écrit la Commission dans son jugement consulté par nos confrères de la VRT.

En conséquence, Bollen a décidé de renoncer à son titre de psychologue. « Si en 2021 être psychologue signifie que je n’ai pas le droit d’être moi-même, même dans ma vie privée, parce que c’est de cela qu’il s’agit, alors je préfère ne pas être psychologue. J’ai donc décidé de démissionner du comité des psychologues, et donc de renoncer à mon titre de psychologue. C’est douloureux et c’est dur ».

C’est également l’avis de Heleen Debruyne, chroniqueuse au quotidien De Morgen, qui soutient la psychologue. « Bollen a-t-elle agressé quelqu’un ? A-t-elle violé le secret professionnel ? A-t-elle proclamé des contre-vérités manifestes? A-t-elle entamé une liaison avec un client ? A-t-elle mis en danger les personnes qui lui faisaient confiance ? A-t-elle pratiqué des tarifs déraisonnables ? Rien de tout cela. Son grand délit : la psychologue portait en public un corset dont le décolleté ne laissait pas grand-chose à l’imagination », écrit-elle.

Pour Debruyne, le jugement est particulièrement douloureux pour les patients qui cherchent de l’aide auprès d’un psychologue parce qu’ils se heurtent aux normes de la société. « N’oubliez pas que jusqu’au 20e siècle, beaucoup de psychologues qualifiaient encore les homosexuels de ‘malades’. Les personnes qui pratiquent le bdsm se voient toujours étiquetées ainsi, si elles ne consultent pas le bon psychologue », rappelle-t-elle.

Le ministre flamand de l’Égalité des chances, Bart Somers (Open Vld), souhaite s’entretenir avec la commission des psychologues. « Il est inouï qu’en Flandre, en 2021, on continue à dire aux femmes comment elles doivent ou peuvent s’habiller. Nous n’avons pas besoin d’un code vestimentaire », tweete-t-il. Le ministre souhaite « enquêter sur ce que nous pouvons faire contre une telle attitude », a-t-il ajouté sur Radio 1. « C’est inouï et nuisible pour les femmes qui sont capables de décider elles-mêmes de ce qu’elles veulent porter. On dirait que nous sommes retombés dans les années 1950 ».

https://twitter.com/BartSomers/status/1348261584708259841Bart Somershttps://twitter.com/BartSomers

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Beaucoup de soutien

Kaat Bollen a décidé ne pas se résigner. « Honnêtement, j’en avais l’intention avant le week-end. J’ai déjà consacré trop d’énergie négative à cette histoire. Mais ce week-end, j’ai reçu beaucoup de soutien sur les réseaux sociaux, y compris de la part de femmes qui vivent la même chose. Je ne peux pas les laisser tomber », confie-t-elle à la VRT.

En collaboration avec l’Institut pour l’égalité entre les hommes et les femmes, elle étudie différentes options, dont la Cour de cassation. « Je ne fais pas ça pour moi, je le fais pour la génération future. J’espère que mes enfants pourront grandir dans un monde meilleur, où ils ne seront pas jugés sur leur apparence et où celle-ci ne conditionnera pas non plus leur dignité ».

Avec Belga

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