Michel Delwiche

Faut-il interdire les spectacles de Philippe Moureaux ?

Michel Delwiche Journaliste

On sait que Philippe Moureaux est là pour glisser quelques vacheries, pour flinguer ses contradicteurs, pour descendre ceux qui ne sont pas de son avis, voire même les autres. Mais on continue à l’inviter, pour faire le spectacle, assurer le divertissement.

C’est une constante: le pépé flingueur du PS défouraille plus vite que son ombre. Contre le patronat flamand qu’il compare (même s’il faut prendre ses propos « avec des pincettes », dit-il hypocritement) aux industriels allemands qui ont collaboré avec le régime nazi. Contre le gouvernement du socialiste Elio Di Rupo et l’échec de sa politique d’asile, comparant Maggie De Block à Roger Nols, naguère maïeur de Schaerbeek, passé du PRL au Front National. Contre la RTBF et ses méthodes dignes de Goebbels après la parution d’un reportage consacré à l’islamisme qui ne lui avait pas plu.

On peut comprendre, voire même partager, certaines de ses indignations, mais ne pas pour autant admettre la forme. Ce dimanche, le père de la loi contre le racisme et la xénophobie (la loi Moureaux, votée en 1981) était logiquement l’invité des plateaux de télévision pour des débats consacrés à l’affaire Dieudonné et à son instrumentalisation par Manuel Valls, le ministre français de l’Intérieur (et expulseur de Roms). Philippe Moureaux a d’ailleurs repris une phrase de ce dernier pour rappeler que « le racisme est un délit, et non pas une opinion », et que les délits doivent être poursuivis. Et que donc le gouvernement français, a expliqué celui qui fut ministre belge de l’Intérieur, puis de la Justice, ferait mieux de poursuivre les délits s’ils ont été commis et de faire appliquer les condamnations déjà prononcées plutôt qu’interdire les spectacles préalablement. Il a aussi estimé que cette affaire était révélatrice d’un malaise plus profond et qu’il fallait « recoudre notre société fracturée et lui donner un projet, égalitaire, citoyen ».

Mépris et condescendance

Sur le fond, l’ancien bourgmestre de Molenbeek a sans doute raison. Mais sur la forme, c’est insupportable. Le mépris affiché pour les autres interlocuteurs (au mieux la condescendance) ne peut remplacer les arguments. Non plus l’agressivité déguisée en ironie, et cette façon de monopoliser le débat, de couper les interventions des autres à tout bout de champ et souvent sans raison, de monologuer à voix haute pour couvrir les échanges, de prendre la parole quand ce n’est pas son tour jusqu’à ce que, finalement, l’animateur dominical la lui donne au détriment de celui qui s’exprimait…

Un débat, c’est un débat, d’accord, cela ne doit pas ronronner, les propos peuvent être musclés, mais les idées doivent s’imposer, et non être imposées. Pourtant les télés continueront à inviter le sniper Philippe Moureaux, en espérant que ses méchancetés et autres « bons » mots feront le buzz et assureront le spectacle à l’heure de l’apéro.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire