© belga

Université: l’absentéisme des étudiants serait la cause d’un taux d’échec plus élevé en première année

Mailys Chavagne

Après deux années de crise sanitaire, les auditoires des universités ont finalement rouvert leurs portes… mais restent désespérément vides. Trop vides, déplorent l’UMons et l’UCLouvain, qui ont constaté un taux d’absentéisme élevé cette année. Malgré la fin des mesures de sécurité, le Covid continue de faire des dégâts… Le professeur Philippe Dubois, recteur de l’UMons, nous en parle.

Les étudiants du supérieur foncent-ils droit dans le mur? « Échec massif », « hécatombe »… Les commentaires étaient cinglants, concernant le faible taux de réussite des examens en Bac1 de psychologie de l’UCLouvain. Sur les 751 inscrits, seuls 40 élèves ont réussis leurs 60 crédits, et 169 autres ont validé au moins 45 crédits. Bref… Cette première année d’études n’a pas été évidente pour beaucoup d’étudiants.

Pour autant, il faut relativiser ces chiffres: non seulement, il s’agit là des résultats de la première session, et surtout, l’ensemble des étudiants inscrits ne se sont pas forcément présentés ou n’ont tout simplement pas passé tous leurs examens. En effet, une centaine d’étudiants ont abandonné en cours d’année pour mieux se réorienter, et une majorité des élèves restants (64%) ont remis une note de présence et repasseront donc des examens durant la seconde session d’août. Avant de parler d’hécatombe, il faudra donc attendre les résultats finaux… Mais une chose est sûre: le Covid a laissé des traces, et pas uniquement pour les élèves de psychologie l’UCLouvain. C’est en tous cas le constat du professeur Philippe Dubois, recteur de l’UMons.

Une entrée à l’unif difficile

Pour les élèves du Bloc 1 de l’UMons, l’année 2022 est marquée par un taux d’examens réussis de 40%, toutes matières confondues. « Quand on compare à l’année dernière, on était alors à 54%. C’est 14% de réussites en moins. Mais si je compare au taux de réussite pré-Covid, donc en juin 2019, là on était à 43%. Donc seulement 3% en moins », constate le recteur.

Deuxième constat : les jeunes élèves se sont moins présentés aux examens cette année. « On est à 86% par rapport à 92% en 2019, et 90% l’année dernière. » Et ce n’est pas le seul problème : « le taux de présentiel aux examens a certes baissé mais le taux de présentiel aux cours a lui aussi énormément diminué. Beaucoup moins d’étudiants assistent aux cours. » Et c’est là que le bât blesse : comme les cours ne sont pas obligatoires, de nombreux élèves préfèrent rester chez eux, et risquent ainsi de manquer certaines explications essentielles pour la bonne réussite d’un cours, qui ne sont malheureusement pas toujours notées dans les syllabus.

« Personnellement, j’ai constaté que les cours du matin sont moins souvent fréquentés que les cours de l’après-midi par exemple », témoigne Philippe Dubois. Un absentéisme record également observé à l’UCLouvain : « Dans les auditoires, il n’y avait que 20% à 30% d’étudiants présents. Beaucoup d’étudiants ne voient plus l’intérêt de venir en cours et c’est une conséquence directe de la crise », expliquait récemment Isabelle Decoster, porte-parole de l’université.

La faute à la flemme ? Sans doute un peu de cela. Mais surtout la faute au Covid, qui a chamboulé le monde estudiantin.

Un sérieux manque d’organisation

Dans les auditoires, la situation semble être revenue à la normale: fini les restrictions et autres mesures de sécurité imposées par la crise sanitaire. La distanciation sociale, l’enseignement à distance et l’obligation du port du masque ont été abandonnés… Et pourtant, les effets de la crise sont encore bien réels.

Suivre des cours à distance pendant deux ans, pour finalement retourner sur les bancs de l’école à un stade fatidique de leur éducation, à savoir l’entrée à l’université, semble en effet avoir perturbé ces jeunes adultes. Ils ont perdu le rythme et atterrissent dans la cour des « grands » sans trop savoir quoi faire… ni comment. Ils se laissent alors porter par la vague et finissent bien vite par perdre pied.

« Les étudiants sont moins organisés, c’est l’effet du confinement », confirme le recteur de l’UMons. « Je pense que les étudiants, et surtout les nouveaux qui nous arrivent, doivent ré-appréhender la gestion de leur temps de travail. »

Car étudier chez soi, dans son lit et suivre des cours via son ordinateur, cela ne suffit pas pour comprendre une matière dans toute sa complexité. « Les vidéos peuvent jouer un rôle de support ou de remédiation mais elles ne remplacent pas un cours en présentiel. On a un vrai travail à faire pour le faire comprendre aux étudiants », soulignait encore la porte-parole de l’UCLouvain. C’est donc tout un apprentissage qu’il faut revoir…

Des retrouvailles qui font du bien

Note positive de cette année: tant les étudiants que le personnel enseignant ont pu assouvir leur besoin de se retrouver. « L’aspect social, l’aspect contact humain a été finalement le plus gros manque par nos étudiants. Il y avait ce besoin d’organiser des activités qui permettaient de fédérer les élèves », explique le professeur Dubois. « On a réorganisé en avril dernier les 24 heures cuistax. Il n’y a jamais eu autant de monde, il me semble… »

Et si le retour à l’université fait du bien au moral – malgré les quelques couacs à corriger –, le corps enseignant suit les chiffres de la crise avec une certaine crainte… Celle de devoir à nouveau employer les outils numériques pour instruire les futurs leaders de la société. « Je pense que nous avons des outils extraordinaires pour l’enseignement à distance, mais rien ne remplace vraiment le présentiel. La preuve, c’est que ce présentiel permet aussi une meilleure organisation, une meilleure gestion du temps pour nos étudiants », explique le recteur de l’UMons. « Alors j’espère, c’est qu’à la rentrée, on pourra retrouver une certaine normalité. Ce qui n’est pas garanti quand on voit ce qu’il se passe autour de nous pour le moment. »

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire