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Ecole : le boom des projets alternatifs

Soraya Ghali
Soraya Ghali Journaliste au Vif

Qu’attend-on pour sauver l’école ? Au sein de la Fédération Wallonie-Bruxelles comme dans le privé, des projets innovants et concrets ouvrent la voie. L’enquête du Vif/L’Express.

Un mouvement hétérogène – des hypercathos aux tenants de la pédagogie Steiner, en passant par l’école autogérée – et encore minoritaire, mais qui s’agrandit : l’éducation innove et renouvelle les pratiques pédagogiques. Sur le terrain, des expériences passionnantes se multiplient, à l’échelle d’une classe, d’un établissement, ou même d’une ville. Qu’ils relèvent de la Fédération Wallonie-Bruxelles ou non, qu’ils soient gratuits ou payants, ces enseignements ont chacun un projet particulier : écologique, comme au collège Robert Schuman, à Eupen; ou linguistique, comme dans le réseau d’écoles bilingues Montessori ou à l’école bilingue français-latin Schola Nova, à Incourt.

« Il me semble que l’on ne peut plus faire autrement aujourd’hui, tellement les classes, les niveaux et les environnements culturels sont hétérogènes », estime Marylène Mathias, directrice à l’Institut d’enseignement des arts techniques et de l’artisanat (Iata), à Namur. L’établissement secondaire a ouvert, il y a deux ans, une « filière » d’inspiration Steiner- Waldorf, où on développe à la fois les facultés intellectuelles, artistiques et manuelles. « Les élèves ont des profils d’apprentissage différents », insiste Marylène Mathias. Derrière sa réflexion pointe un constat, récurrent : pour transmettre et évaluer des savoirs, l’école s’appuie sur deux intelligences, « logico-mathématique » et « verbale-linguistique » et passe à côté d’autres. Le point de vue est également partagé par l’équipe du collège Da Vinci, à Perwez. Le tout jeune établissement enseigne sur la base théorique des intelligences multiples. L’idée consiste à rendre le savoir accessible aux élèves selon leurs atouts, en stimulant les différents circuits cognitifs : par exemple, le latin à l’aide de chansons, de récits, de bandes dessinées ou le français grâce à des cartes mentales, sortes de graphiques arborescents utilisés dans le management, de vidéos, de jeux…

Deux exemples parmi d’autres, qui séduisent les parents, de plus en plus nombreux à souhaiter un paysage éducatif plus varié.

C’est dès la maternelle que des modèles atypiques tentent de capter leurs demandes. Ces écoles se bâtissent sur les lacunes du système scolaire. Ainsi il n’existe aucune école bilingue à Bruxelles. L’école Pistache, située à Schaerbeek, propose un enseignement en français et en néerlandais, dispensé alternativement par une institutrice francophone et une institutrice néerlandophone. L’établissement, qui ouvrira dès la rentrée un niveau primaire, veut répondre à une demande parentale de plus en plus importante : le bilinguisme dès la maternelle. Il va plus loin que l’immersion, puisque « l’école n’est ni francophone ni néerlandophone, l’enseignement est complètement bilingue : 50 % en français, 50 % en néerlandais ». Coût : 360 euros mensuels, auxquels il faut ajouter 250 euros de frais d’inscription. Pour l’instant, l’école accueille une dizaine d’enfants. D’autres établissements proposent une immersion totale en anglais, à l’exemple de l’école Victoria, à Woluwe-Saint-Lambert. A partir de la rentrée, dès l’âge de 3 ans, les élèves s’immergeront dans l’anglais, avec des institutrices britanniques. La scolarité coûte de 700 à 865 euros le mois, plus les frais d’inscription de 350 euros.

Mais le plus gros atout de ces écoles est qu’elles affirment assurer un suivi personnalisé de l’enfant grâce à des petites classes. A The Little Academy, école maternelle privée au coeur de Mons, pas plus de 14 écoliers par classe. « Ce serait impossible d’avoir un si petit nombre d’élèves dans le public. C’est la seule vraie plus-value par rapport aux écoles « traditionnelles« , estime le professeur de l’UMons, Marc Demeuse. Les contributions des familles s’élèvent à 290 euros mensuels.

Les parents plébiscitent également les pédagogies différentes. Inspirées de Maria Montessori, Célestin Freinet ou Rudolf Steiner, elles ont le vent en poupe. Un engouement dont ne peut que se féliciter Amandine Tuerlinckx, directrice de l’école secondaire Freinet, De l’Autre Côté de l’Ecole, à Auderghem. « L’école n’est pas simplement un lieu où l’on dépose ses enfants. Il doit être vivant. » Si chacune de ces démarches a ses spécificités, elles partagent toutes des points communs forts : l’enfant est mis au centre du projet. Tous ces établissements font autrement l’école, mais chacun à sa manière. Ainsi plutôt que de noter l’élève, on lui apprend à évaluer son travail. De même l’élève avance à son rythme, décide des apprentissages sur lesquels il veut mettre l’accent. Ses rapports avec les adultes sont individualisés. Enfin, quelques projets attirent des parents à la recherche d’un encadrement philosophique ou spirituel différent. Il s’agit par exemple d’écoles évangéliques ou musulmanes.

Ces établissements représentent sans aucun doute un capital d’expériences, dont d’autres pourraient s’inspirer.

Le dossier dans Le Vif/L’Express de cette semaine. Avec la présentation des cursus alternatifs les plus prisés.

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