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Daphné Patakia, actrice sans frontières (portrait)

Nicolas Bogaerts Journaliste

Comédienne d’origine grecque, née en Belgique, Daphné Patakia crève l’écran dans OVNI(s), la nouvelle série de Canal+. Son talent, qui transcende les styles et les frontières, promet un lancement sur orbite.

Même dans ses silences, la présence de Daphné Patakia à l’écran relève de l’intrigue, d’une trame secrète couvrant des mouvements intérieurs qu’on imagine volcaniques. La jeune actrice belgo-grecque irradie de son impétuosité la comédie rétroloufoque OVNI(s), produite par Canal+ et bientôt sur les écrans de Be TV. Elle y est Véra, réceptionniste au sein du Groupe d’études et d’information sur les phénomènes aérospatiaux non identifiés (Geipan), chargé de traiter les signalements, à la fin des années 1970, d’objets volants non identifiés. Au milieu d’hommes de sciences au moral en berne (Melvil Poupaud, entre autres), elle est une figure émancipatrice et optimiste qui va inexorablement faire bouger les lignes. Daphné Patakia est une pièce maîtresse de l’énergie chorale qui unit le casting, appuyant chaque mot, chaque respiration, chaque mouvement de ses grands yeux qu’on jurerait capable d’engloutir les pires tempêtes. Un héritage du pays qui porté à nos imaginaires tant Athéna qu’ Artémis et Circé?

J’ai grandi à Bruxelles mais je ne la connais pas vraiment. Je suis Grecque d’origine. J’ai fait l’école grecque, enfant je regardais la télé grecque, on jouait en grec, on mangeait grec chez moi… Je vivais à la grecque mais en Belgique. Finalement, je me sens davantage Européenne que Grecque ou Belge.u0022

Sur ses origines, Daphnu0026#xE9; Patakia

Née en Belgique, elle a gardé un attachement singulier au pays d’origine de ses parents, la Grèce. La terre qui a également vu naître le théâtre d’Eschyle, Euripide et Aristophane l’appelle dès la sortie de sa scolarité. A 18 ans, elle rallie le Théâtre national de Grèce à Athènes, où elle entreprend ses études de comédienne. Dès 2016, elle fait ses armes au sein de quelques productions hellènes, puis file à Paris pour assouvir son besoin intrinsèque d’ouverture, d’exploration et s’offrir la possibilité d’une carrière internationale. Percevant son tempérament solaire et explosif, Tony Gatlif la choisit pour incarner ce qui sera son premier grand rôle-titre, Djam, en 2017. Une évocation tempétueuse et rythmée du sort des migrants en Méditerranée et aux portes de l’Europe, en Turquie et à Lesbos. Emplie de musique, de danse et de rebétiko, ce « chant des mal aimés » comme le décrit lui-même le réalisateur. « Dès je l’ai rencontrée, raconte-t-il, les scènes du film ont commencé à prendre corps à travers elle. Je sentais qu’elle irait au bout, à fond. Daphné sait ce qu’est l’exil. »

Même si je joue plus facilement en grec, le faire en français est très intéressant: je n’ai pas le même rapport aux mots, ni le même vécu. Je me laisse porter par le scénario et les dialogues. J’ai besoin de l’énergie de mes partenaires de jeu, de les écouter, tout autant que de m’imprégner du texte, de l’histoire. C’est une préparation interne un peu énigmatique, mais pour moi c’est du désir et du plaisir avant tout.

Sur son jeu, Daphnu0026#xE9; Patakia

Elle prend part à la musicalité du film, pour lequel elle a appris la danse du ventre et à jouer du baglama, une forme de luth grec. En 2018, au Festival Les Suds, à Arles, elle se joindra aux musiciens du film, le temps d’un concert joué à gorge déployée. Elle prolonge ce double rapport au mouvement et à la terre de ses ancêtres avec Meltem, de Basile Doganis (2017), teen comédie douce amère, estivale et sociale, poussée par le vent chaud de la Grèce et nourrie de réflexions sur le déracinement, encore une fois.

Celle qui est attendue aux côtés de Virginie Efira, Charlotte Rampling et Lambert Wilson dans le prochain film du réalisateur néerlandais Paul Verhoeven, Benedetta (sortie prévue en 2021), met en avant son désir de jouer « dans le plus de langues possible ». Son caractère fondamentalement hybride la conduit, avec un délice perceptible, aux mélanges, aux métissages… Gommer les frontières, c’est trouver son plaisir dans les zones de contact, les lisières. Précisément là où on la retrouve avec ce personnage de Véra, bouillante d’optimisme et d’empathie, mais qui se perd dès qu’on s’attache à la maintenir dans une case. Daphné Patakia, non plus, n’entre dans aucune. Mais coche toutes celles qui devraient la tenir en haut de l’affiche.

Dates clés

  • 1992: Naissance à Bruxelles.
  • 2013: Diplômée du Théâtre national de Grèce, à Athènes.
  • 2016: Prix Shooting Star à la Berlinale pour Spring Awakening, de Constantine Giannaris.
  • 2017: Djam, de Tony Gatlif, et Meltem, de Basile Doganis.
  • 2021: OVNI(s), série de Clémence Dargent et Martin Douaire.

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