Olivier Mouton

Coronavirus et migrants : quand le principe de précaution menace la démocratie

Olivier Mouton Journaliste

Si l’on peut comprendre la nécessité de se protéger, le risque de psychose est réel en cette ère de communication exacerbée. D’autant que les ennemis de la liberté profitent de nos peurs.

Nous vivons dans des sociétés développées où l’on entend minimiser au maximum les risques. Il s’agit de protéger sa vie, sa santé, la santé de ses proches, ses biens, sa prospérité, sa maison, sa voiture, son smartphone, tout ce qui fait de nous ce que nous sommes et c’est bien normal. A l’heure de la communication hypertrophiée des réseaux sociaux et de la globalisation médiatique, certaines crises prennent portant une ampleur démesurée, tandis que d’autres meurent en silence. Le monde occidental a peur de perdre ce dont il dispose et risque de sombrer dans sa psychose.

La Belgique est désormais touchée par le coronavirus qui risque de s’y déployer, accompagnant le recensement méthodique du nombre de cas et de morts. Le président du principal syndicat médical évoque la perspective de 850000 cas et 50000 morts potentiels, si on ne fait rien, et la majorité ne retient que cet effet de loupe. Le message principal des autorités et des experts est pourtant celui-ci : respectez une hygiène élémentaire, soyez prudents et tout se passera au mieux. « Avec l’aide de tous, le virus sera contenu et les morts ne se conteront que par centaines, comme pour une grippe, conclut le docteur Philippe Devos, président de l’Absym. Et les grincheux qui n’ont rien compris diront qu’on a alarmé la population pour rien. Ainsi va la vie… » Mais qui a lu jusque-là ? Au nom de la prévention légitime, ne risque-t-on pas de générer des psychoses ? D’ores et déjà, certains dévalisent les supermarchés au cas où…

Au même moment, des images sidérantes nous viennent de l’île grecque de Lesbos, à une dizaine de kilomètres des frontières turques. Les premiers migrants profitant des portes sournoisement ouvertes par le président turc Erdogan se pressent aux portes de l’Union européenne. Des militants d’extrême droite ont fait le déplacement pour les repousser. Des journalistes, dont une équipe de la RTBF, se sont fait pratiquement molester. Les candidats réfugiés sont utilisés comme des armes, tandis que les pays européens reculent devant leur responsabilité et sapent la solidarité de l’Union. Les manipulations ne sont jamais loin, à dessein, lorsque l’on évoque des « millions » de réfugiés ou lorsque l’on relaie des images sans discernement. Pendant ce temps, en Syrie, la situation sanitaire est réellement dramtique et guère de monde ne s’en émeut.

https://twitter.com/DominiqueReynie/status/1234495495722143745Dominique Reyniéhttps://twitter.com/DominiqueReynie

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Ces deux vagues – sanitaire et migratoire – auxquelles on peut ajouter d’autres – terroriste, économique ou climatique – représentent des enjeux réels. Nos dirigeants doivent les gérer avec toute la réactivité qui s’impose, tout en appelant au calme. C’est le « la Belgique est prête » de la ministre belge de la santé, Maggie De Block, ou le « Wir schaffen das » (nous pouvons gérer cela) de la chancelière allemande Angela Merkel au début de la crise migratoire. Mais ces crises n’en représentent pas moins de la dynamite pour les démocraties européennes. Comme dans Le Salaire de la peur de Clouzot, quand Yves Montand véhicule de la nitroglycérine prête à exploser.

Les ennemis de la démocratie l’ont bien compris, eux qui appellent aux fermetures de frontières ou qui véhiculent une haine faisant déjà des morts dans nos pays. Si ces crises doivent être gérées et les éventuels manquements des politiques contestés, à nous de raison garder. En ne cédant pas à la panique, en faisant la part des choses, en serrant les coudes dans le calme et en acceptant aussi que le risque zéro n’existe pas. Et à côté de cela, faisons preuve d’inventivité, de créativité, inventons des remèdes, organisons-nous pour préparer de meilleurs lendemains. En un mot comme en cent: vivons.

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