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Afghanistan: l’impuissance belgo-européenne, l’embarras américain, le cynisme chinois et russe

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

La prise de pouvoir des talibans illustre de façon redoutable la réalité géopolitique du moment. Les Etats-Unis et l’OTAN montrés du doigt pour « le plus grand désastre depuis 1949 ». Le président américain Joe Biden a défendu sa position de retirer ses troupes.

Les image venues d’Afghanistan font le tour de la planète. Le chaos à l’aéroport de Kaboul et ces Afghans tentant par tous les moyens de fuir les pays suscitent une nuée de réactions indignées et de craintes quant à l’avenir de ce pays, la situation des drots des femmes ou la déstabilisation potentielle sur le plan géopolitique, avec le renaissance potentielle d’un sanctuaire pour le terrorisme.

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Au-delà de cette indignation, un sentiment d »impuissance prévaut face à ce désastre dans les cercles du pouvoir, à l’Ouest. C’est le cas tant en Belgique qu’au niveau de l’Union européenne, où la priorité va la sécurité des ressortissants sur place. Alexander De Croo (Open VLD), Premier ministre, a annoncé que « le kern a décidé de donner son feu vert à une opération d’évacuation par la Défense ». « La question sera abordée plus en profondeur en kern ce soir », précise-t-il.

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Aux Etats-Unis, l’administration Biden est montrée du doigt et le président lui-même accusé d’un long silence: il devrait enfin s’exprimer ce lundi après-midi (heure belge). Dans le même temps, non sans cynisme et opportunisme, la Chine et la Russie veulent entretenir des relations avec le régime afghan – les Chinois les espérant même « amicales ».

L’impuissance européenne

La Belgique et l’Europe impuissantes? Ses responsables tentent de gérer la situation chaotique et de veiller au rappatriement et à la sécurité des citoyens européens. « Il s’agit avant tout de trouver des solutions pour ce qui concerne le rapatriement des Belges, soit 47 personnes, souligne Sophie Wilmès (MR), ministre belge des Affaires étrangères, au Soir. Egalement de celles et ceux qui, en Afghanistan, des Afghans en l’occurrence, ont travaillé pour nos services, pour la Défense, ou encore pour le Service européen pour l’action extérieure, ou la direction générale économie de l’Union. Plus de 20 personnes, estime-t-on à l’heure où je vous parle. » Le gouvernement fédéral a donné son feu vert lundi après-midi pour le déploiement de trois avions de transport de la Défense en Afghanistan.

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Diplomatiquement, par contre, notre pays ne se prononce pas de façon tranchée. « C’est trop tôt…, estime encore Sophie Wilmès. Nous verrons cela quand la situation sera, si l’on peut dire, ‘stabilisée’, et il serait souhaitable que nous ayons alors une position commune à l’échelle européenne. »

Précisément, en ce qui concerne l’Union européenne, les ministres des Affaires étrangères tiendront mardi une réunion par visioconférence pour discuter de la situation en Afghanistan. Pour l’heure, les Etats occidentaux tentent d’accélérer leurs opérations d’évacuation, a indiqué Josep Borrell, chef de la diplomatie de l’UE. Charles Michel, président de l’Union, avait précisé que la sécurité des ressortissants était la priorité, avant que « de nombreux enseignements soient tirés ». Un aveu d’impuissance.

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Avant cela, les pays européens s’exprimeront les uns après les autres, en ordre dispersé comme souvent. Le président français Emmanuel Macron prévoit une allocution « solennelle » ce lundi soir à la télévision. La chancrlière allemande Angela Merkel a quant à elle qualifié lundi d' »amère » la situation en Afghanistan et jugé que la décision du retrait des troupes occidentales avait été prise par les Etats-Unis, entre autres, « pour des raisons de politique intérieure ».

De Wever: « Une analyse de la menace nécessaire »

En Belgique encore, les partis soulignent leur exaspération. Bart De Wever, président de la N-VA, souligne que la prise de pouvoir des talibans a « un impact ici aussi ». « Les talibans promeuvent un extrémisme religieux, violent et mènent du trafic d’arms et de drogues, souligne-t-il. Une analyse de la menace est nécessaire. Le gouvernement fédéral doit entreprendre une action d’urgence. »

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« Quel monstreux échec, s’indigne Samuel Cogolati, député fédéral Ecolo. Notre pays doit d’urgence sauver et accueillir les exilés. Et oui, nous devrons tirer les leçons de ces 20 années de guerre pour… rien.« 

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« Il est souvent indiqué que les migrations sont le fruit des interventions des occidentaux dans le monde, clame Georges-Louis Bouchez, président du MR. L’Afghanistan démontre au contraire que le devoir des démocraties libérales n’est pas de renoncer mais bien de promouvoir les valeurs universelles des droits de l’Homme. » Dans un autre message, il lpue également la fermeté… du discours du président français Nicolas Sarkozy, voici dix ans.

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Les Etats-Unis et l’OTAN fustigés

Les critiques à l’encontre de la décision américaine de retirer ses troupes et de l’OTAN sont innombrables. Armin Laschet, chef du parti CDU au pouvoir en Allemagne et candidat à la succession de Merkel, estime que le retrait d’Afghanistan est « le plus grand désastre pour l’OTAN depuis sa création » en 1949.

L’ancien ministre allemand des Affaires étrangères Joschka Fischer a jugé lundi que le retrait des troupes de l’Otan d’Afghanistan « sans négociation » préalable avait été « une erreur », laissant le champ libre aux talibans.

La presse américaine se montre très critique vis-à-vis de la stratégie de Biden: l’accusant d’avoir « trahi » les Afghans, elle redoute que le retrait américain ne sape la confiance que les alliés plaçaient dans les États-Unis. Ils sont nombreux, aussi, à moquer le président sortant Donald Trump, qui demande non sans ironie la démission de Joe Biden, alors qu’il fut lui-même à l’origine de la stratégie de retrait de l’Afghanistan.

Montré du doigt pour son grand silence, le président américain Joe Biden s’exprimé lundi soir pour justifier sa décision de retirer les troupes. « Notre mission en Afghanistan n’a jamais été censée construire une nation, a-t-il dit. Elle n’a jamais été censée créer une démocratie unifiée centralisée », a dit le président américain, en précisant que l’objectif unique « rest(ait) aujourd’hui et a toujours été d’empêcher une attaque terroriste sur le sol américain ».

Lire aussi: Biden « défend fermement » sa décision de retirer les troupes américaines d’Afghanistan

Les relations chinoises et russes

Enfin, dans la continuité du « nouvel ordre mondial » rebattant les cartes aux quatre coins de la planète, la Chine et le russie ont annoncé leur volonté de nouer des relations avec le régime taliban.

La Chine, qui partage 76 km de frontière avec l’Afghanistan, a indiqué lundi qu’elle souhaitait des « relations amicales » avec les talibans, au lendemain de la prise de Kaboul par les insurgés. Pékin « respecte le droit du peuple afghan à décider de son propre destin et de son avenir », a affirmé devant la presse une porte-parole de la diplomatie chinoise, Hua Chunying. Une rencontre entre le numéro deux des talibans et le ministre chinois des affaires étrangères avait donné le ton, voici une dizaine de jours. La Chine agit de la sorte tant pour des raisons géopolitiques (sa fameuse « route de la soie ») que pour des raisons internes (avec le souci d’éviter un soutien aux Ouïghours).

L’ambassadeur de Russie à Kaboul va rencontrer les talibans mardi, a annoncé lundi l’émissaire du Kremlin pour l’Afghanistan, Zamir Kaboulov, précisant que Moscou allait décider de reconnaître ou non le nouveau pouvoir afghan en fonction de ses « agissements ». La Russie avait déjà indiqué dimanche ne pas envisager une évacuation de son ambassade à Kaboul, en assurant avoir reçu des « garanties » de la part des talibans quant à la sécurité de sa mission diplomatique.

Comme si la Chine et la Russie, sans oublier la Turquie d’Erdogan, se préparaient à occuper les espaces vides laissés par des Américains et des Européens qu ise recentrent sur eux-mêmes.

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