Pierre Havaux

A Malines, ne pas se déclarer antiraciste se verra

Pierre Havaux Journaliste au Vif

A Malines, les bannières communales porteuses de consignes se succèdent sur la Grand-Place. D’abord priés de rester prudemment chez eux pour échapper aux méfaits du coronavirus, les Malinois sont à présent invités à manifester leur rejet du racisme.

Pas question de les inciter à se rassembler physiquement mais bien de les encourager à faire bon usage du sticker antiraciste que la majorité communale (VLD – Groen – M+) fera atterrir dans toutes les boîtes aux lettres. Avec le ferme espoir et l’intime conviction que fleuriront ainsi au- devant des maisons autant d’indices que derrière les façades ne se terrent pas de vilains racistes. C’est que Malines tient beaucoup à sa réputation internationale de modèle d’intégration réussie. Ce combat de longue haleine a même valu à son mayeur, aujourd’hui empêché puisque devenu ministre régional de l’Intégration, Bart Somers (Open VLD), d’être sacré meilleur bourgmestre au monde en 2017.

Raciste la Flandre ? Non mais…  » Beaucoup de gens ne peuvent pas y respirer « , dénonçait début juin Sihame El Kaouakibi, députée Open VLD, sous l’immense verrière d’un parlement flamand peuplé de 23 députés Vlaams Belang, alors montrés du doigt depuis les bancs de la gauche pour leur contribution à rendre l’atmosphère irrespirable.Vite, de l’air, Malines finalise un plan stratégique  » Malines inclusif 2.0 « . Déconfine la cause antiraciste, notamment par une tournée générale de stickers et d’affiches. En ferait-elle un peu trop ? Cette façon de forcer la main du Malinois en l’obligeant en somme à  » afficher la couleur  » dérange, agace, heurte les nationalistes flamands. Assita Kanko, eurodéputée N-VA, a choisi Twitter pour allumer Malines, là  » où les « bons » et « mauvais citoyens » seront reconnus à l’autocollant apposé sur leur fenêtre ! Est-ce cela rassembler, monsieur Somers ?  » En voilà une façon, dénonce l’élue originaire du Burkina Faso, d’imposer la pensée unique dans la manière de lutter contre le racisme en stigmatisant tout qui ne voudra pas y adhérer. On ne ferait pas mieux pour obtenir ce que l’on veut précisément combattre : la haine, la division, la séparation entre  » les bons  » et les  » mauvais « , a renchéri par le même canal Marc Hendrickx, chef de groupe N-VA au conseil communal de Malines. Apposer ou non l’autocollant et choisir ainsi son camp, telle serait bien la question et le dilemme.

Bart De Wever en personne a profité de quelques réflexions inspirées par le débat sur le racisme pour commenter l’initiative malinoise, sans nul doute pétrie de bonnes intentions mais à ses yeux fort malheureuse car effectivement porteuse d’effets contraires au but recherché. Etiqueter les citoyens ne pourra être que source de polarisation,  » celui qui se sentait déjà abandonné par une élite qui semble tourner sur elle-même se sentira encore plus orphelin et réagira parfois d’une manière qui paraîtra conforter le fait qu’il rejette la modernité « . Il n’y a rien de bon à attendre d’un cercle vicieux qui ne fera que gonfler les bénéfices engrangés en ligne par les tendances extrêmes, prévient le président de la N-VA et bourgmestre d’Anvers. Mais tout à redouter d’un excès de zèle antiraciste.

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