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Combiner différents vaccins covid, la nouvelle stratégie pour booster l’immunité

Mailys Chavagne
Mailys Chavagne Journaliste Web

Donner deux doses, mais de vaccins différents afin d’améliorer la réponse immunitaire, tel est l’objectif d’un nouvel essai au Royaume-Uni. Si l’idée peut paraître saugrenue, elle ne sort pas de nulle part. Le vaccin russe Spoutnik emploie déjà cette méthode peu conventionnelle.

La stratégie de vaccination russe se distingue en effet par sa deuxième injection, qui utilise un adénovirus différent de celui de la première. Autrefois considéré d’un mauvais oeil par les autres États, le vaccin Russe serait-il aujourd’hui devenu une source d’inspiration pour la communauté scientifique internationale ?

Deux vaccins pour un patient

À l’heure actuelle, la plupart des vaccins contre le covid sont administrés en deux injections : une dose initiale, suivi d’une seconde dose « boost » visant à stimuler les cellules mémoire du système immunitaire et amplifier la réponse immunitaire. Même si dans le cas de Spoutnik, la seconde dose n’est pas tout à fait la même que la première, chaque dose administrée est issue d’un seul et même vaccin.

Mais aujourd’hui, des scientifiques britanniques se lancent dans une nouvelle expérience : celle d’administrer deux vaccins covid différents à un seul et même patient. Leur objectif ? Faciliter la logistique qui se cache derrière le déploiement des vaccins, aider à faire face à toute interruption potentielle des approvisionnements, et, cerise sur le gâteau, potentiellement stimuler les réponses immunitaires. La communauté scientifique pense en effet que la combinaison de plusieurs vaccins pourrait offrir une protection encore meilleure face au covid.

Pour leur essai clinique, l’Université d’Oxford va faire appel à des volontaires non vaccinés, âgés de plus de 50 ans. Les scientifiques leur injecteront une combinaison de deux vaccins : celui produit par AstraZeneca/Oxford et celui produit par la société pharmaceutique Pfizer.

La stratégie du « prime-boost hétérologue »

La possibilité de combiner les vaccins pourrait rendre les programmes de vaccination plus flexibles: cela accélérerait le processus de vaccination et réduirait l’impact de toute perturbation de la chaîne d’approvisionnement. Cela permettrait en outre d’immuniser davantage de patients car il y aurait plus de doses disponibles dans le monde. Ce mélange de vaccins pourrait s’avérer être un allié précieux contre les mutations du covid.« Cela pourrait nous donner des indices sur comment élargir la protection contre les nouveaux variants », a déclaré Matthew Snape, chercheur à l’Université d’Oxford, en charge de l’essai.

Si elle surprend, cette méthode est pourtant loin d’être inédite : les développeurs de vaccins combinent souvent deux vaccins pour lutter contre le même agent pathogène. C’est ce qu’on appelle le « prime-boost hétérologue », une stratégie approuvée l’année dernière par les régulateurs européens pour se protéger contre Ebola. Les vaccins expérimentaux contre le VIH reposent aussi souvent sur cette stratégie.

Utiliser le meilleur des deux mondes

Ce qui est inédit ici, c’est le mélange de deux vaccins complètement différents : le vaccin AstraZeneca utilise un virus inoffensif pour transporter un gène clé du covid dans les cellules, et le vaccin Pfizer injecte un ARN messager pour déclencher une réponse immunitaire. Certains chercheurs pensent que la combinaison de deux vaccins pourrait renforcer les réponses immunitaires en exploitant les meilleures caractéristiques de chacun.

Tant les anticorps que les cellules T semblent être tous deux essentiels pour stimuler la réponse immunitaire. Or, si les vaccins à ARN ont généré de puissantes réponses anticorps contre le covid, ils ne se sont pas avérés aussi efficaces que les vaccins AstraZeneca/Oxford pour stimuler une classe de cellules T, appelées cellules T CD8 +. Ces cellules peuvent renforcer une réponse immunitaire en identifiant et en détruisant les cellules infectées par le virus.

Dans le cadre de l’étude, l’équipe de chercheurs prélèvera régulièrement des échantillons de sang pour mesurer les niveaux d’anticorps et de cellules T que les participants produisent contre le covid. Elle surveillera également les potentiels effets secondaires engendrés par un tel cocktail de vaccins. Les résultats préliminaires devraient être disponibles vers le mois de juin.

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