Structurer pour mieux (se) déplacer

La mobilité, c’est  » le  » thème central du développement de Liège. Extra-muros, la Cité veut profiter de sa situation privilégiée pour se positionner en tant que grande métropole européenne. Intra-muros, un réseau global de transports se met en place pour optimiser les circulations.

Il est 7 h 30, la ‘bawette’ de l’arrêt  » Guillemins  » du bus 4 est encore bondée ce matin. C’est la cohue entre les navetteurs qui viennent de descendre du train et les étudiants qui sortent de leurs kots. Tout le monde est pressé de rejoindre le centre. Une dame tente de ne pas se faire prendre sa place :  » Chaque matin, le même cinéma, ce n’est plus possible… « 

Les bus liégeois débordent aux heures de pointe. Leur fréquentation est passée en quelques années de 84 à 125 millions de voyageurs par an : un record à l’échelle wallonne. Cet engorgement est un des signaux d’alarme qui ont incité les autorités de la Cité ardente à revoir complètement le réseau de transports en commun. Le bourgmestre Willy Demeyer (PS) est désormais convaincu de l’urgence :  » Les Liégeois de demain devront faire avec une nouvelle mobilité. Les études du plan urbain de mobilité (PUM) ont déjà tiré des conclusions qui vont dans le sens d’une organisation globale et structurée. « 

Il s’agit ni plus ni moins du plus important projet de transports en commun de Wallonie que la Région inclut dans son plan de relance de l’économie. L’objectif est également environnemental. Le but est de favoriser la circulation en transport en commun d’un côté à l’autre de la région liégeoise en laissant de côté la voiture. Le fil conducteur : le tram, de retour à Liège.

La première ligne, la seule actuellement confirmée, reliera Jemeppe à Herstal, en passant par Liège-Guillemins et le centre. Coût : 500 millions d’euros pour 17,5 kilomètres et 25 arrêts. Le financement devrait être assuré par un partenariat public-privé. Livraison de ce premier tronçon : 2015. Concernant l’axe perpendiculaire qui relie Ans et Fléron, aucune décision officielle n’a encore été prise. Le bourgmestre liégeois s’explique :  » La première ligne, c’est là où il y a le plus de Liégeois qui vivent et travaillent : à elle seule, elle draine aujourd’hui 10 % du total des passagers transportés en Région wallonne… La fréquentation de l’axe Ans-Fléron est nettement moins importante. Dans un premier temps, nous y préconisons une ligne de bus à haut niveau de services. Si cette installation marche bien, on pourrait alors penser au tram là aussi. « 

De son côté, Ecolo revendique les deux axes sans tergiverser : Ans-Fléron et Seraing-Herstal, plus une boucle centrale.  » Pour que les gens aient vraiment envie de prendre le tram plutôt que la voiture, il faut qu’ils aient une offre alternative crédible, qui soit vraiment confortable, rapide et conduise partout, insiste Bénédicte Heindrichs, chef de groupe et conseillère communale à Liège. En outre, je préfère qu’on fasse des travaux partout pendant cinq ans plutôt que d’étaler ça pendant 20 ans. Je ne veux pas d’un deuxième scénario place St-Lambert.  » Les études du PUM sont toujours en cours, les verts espèrent que les conclusions iront dans leur sens.

Tram et RER, en couple

Une piste complémentaire est le train dit  » léger « . Des études sont menées par la SNCB concernant le potentiel d’un réseau de train de type RER utilisant les voies actuelles sous-exploitées et la création de nouveaux arrêts. Le potentiel de ce réseau se trouve essentiellement sur la rive droite et dans les vallées de l’Ourthe et de la Vesdre. La faisabilité de connexions vers l’aéroport, la gare TGV et les villes de l’Eurégio devra être abordée. Le réseau des bus du TEC devra aussi être repensé. En aucun cas, la desserte fine des quartiers ne devra être appauvrie mais, au contraire, améliorée. Reste à déterminer la manière. Pour Bénédicte Heindrichs,  » il ne faut plus ajouter de bus. Au mieux, le tram devrait même les remplacer « . Les autorités communales favorisent une variante :  » Le tram ne veut pas dire moins de bus. Nous allons revoir l’offre dans le sens d’une meilleure organisation. « 

Autre facteur de ce plan global : l’intermodalité avec la voiture. Une des réponses est d’offrir un stationnement de qualité gratuit à quelques minutes des centres urbains. Plusieurs parkings relais seront créés : Sclessin, Coronmeuse, Basse Campagne, Sainte-Walburge, Robermont et Jemeppe. Ces sites seront desservis par le réseau actuel d’autobus, renforcé le cas échéant, en attendant le tram pour ceux situés le long du tracé. Cambio sera également dynamisé. Ce système de location de voiture à l’année, payant par kilomètre, existe déjà sur quatre stations à Liège.

Les cyclistes méritent aussi une part belle car, dans le centre, leur nombre augmente de 5 % chaque année depuis 2005. L’implantation d’un système de vélos en libre service à Liège, Ans, Chaudfontaine, Herstal et Seraing est un objectif à court terme. Willy Demeyer envisage le printemps 2010 :  » Le cahier des charges prévoit 400 vélos et les stations. Ces chiffres correspondent à un ratio d’environ deux vélos par 1 000 habitants. C’est celui qu’ont appliqué des villes présentant des similitudes avec Liège. Reste à bien placer les stations.  » L’implantation visera à assurer l’intermodalité avec le transport public (tram et bus). Un appel d’offres devrait être lancé fin 2009. Parallèlement, les communes seront invitées à compléter sérieusement leur réseau cyclable.

La liaison de tous les dangers

 » On n’y èst én co !  » On comprend ces Wallons qui pensent que le dossier de la liaison Cerexhe-Heuseux-Beaufays (CHB) tire en longueur. Le dossier du tram fait rebondir, encore une fois, ce sujet épineux. D’un côté, il y a ceux qui opposent le projet tram à la liaison CHB. Les verts évoquent les gros sous :  » Pour trouver l’argent, il faut faire des choix et ils sont simples pour nous : abandonner la création de la liaison CHB à hauteur de 400 millions d’euros, pour mettre cet argent au bénéfice du tram.  » De l’autre côté, ceux qui revendiquent la complémentarité des deux projets. Marie-Dominique Simonet, ministre wallonne des Technologies (CDH), parle de globalité :  » CHB est indispensable ! Ce n’est pas basiquement une autoroute, c’est un outil essentiel de mode de transports autour de Liège, qui permettra, entre autres, de faire circuler le charroi généré par Trilogiport.  » Et puis, il y a les riverains concernés par les potentiels travaux, qui se languissent d’une prise de décision. La demande de permis d’urbanisme, déposée en mai 2007, vient d’être gelée par la Région wallonne jusqu’aux élections régionales de juin. Motif évoqué : l’attente de l’avis de la Commission européenne sur le dossier.

C.W.

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