Mis sous pression, le système de peer reviewing peut connaître des ratés. © GETTY IMAGES

Etudes contestées: savoir faire marche arrière

Le Vif

Si le retrait de l’étude publiée dans The Lancet fait grand bruit, ce n’est pourtant pas un cas unique. Chaque année, des centaines d’autres sont retirées et la crise du coronavirus a, elle aussi, eu son lot de  » canards boiteux « .

Quatorze jours. Comme un clin d’oeil ironique au coronavirus, c’est le temps qu’il aura fallu avant que The Lancet retire cette fameuse étude américaine portant sur l’hydroxychloroquine. Après deux semaines, la prestigieuse revue scientifique a donc fait marche arrière – trois des quatre auteurs ont demandé son retrait -, les critiques portant sur la méthodologie employée et l’intégrité des données devenant trop nombreuses. Une rétractation qui a fait grand bruit mais qui, en réalité, n’est pas un cas isolé.

Chaque année, les résultats de plusieurs centaines de travaux de recherche sont retirés (sur des centaines de milliers publiés) : fraude, plagiat, manipulation du système de peer reviewing mais aussi erreurs de bonne foi, problèmes de droits… On estime que cela représente 0,2 % de la production scientifique annuelle. Le site retractionwatch.com recense tous ces cas.

La pandémie de Covid-19 a été un terreau fertile aux études scientifiques et, en quelques mois, un nombre impressionnant d’entre elles ont été rapidement publiées, que ce soit en peer reviewing ou en preprint. Et dans ce flot de papiers scientifiques, une quinzaine ( preprint et publications dans des journaux confondus) ont subi le même sort que la récente étude du Lancet.

De l’utilisation de protéines ou de molécules dans le traitement de la maladie aux problèmes des faux positifs en passant par les risques de transmission ou l’état de santé des travailleurs du monde médical, les sujets étaient variés. Mais tous ces articles avaient en commun de ne pas correspondre aux standards de qualité exigés. Les auteurs de l’article paru dans The Lancet avant d’être retiré ont d’ailleurs eu droit à un second, lui aussi supprimé, le même jour, dans le New England Journal of Medicine cette fois.

Certaines études sont passées relativement inaperçues, tandis que d’autres ont eu un certain retentissement, à l’image de cette publication indienne suggérant certains liens entre le virus du sida et celui du Covid-19 et donc, peut-être, une création humaine. Hypothèse soutenue et diffusée dans les médias par Luc Montagnier, codécouvreur du virus du sida (ce qui lui avait valu le prix Nobel de médecine). Sauf que c’était faux. L’étude publiée fin janvier était déjà retirée début février.

Mais ce qui reste positif dans cette quinzaine de cas, c’est la rapidité avec laquelle les comptes-rendus contestés ont été retirés, la communauté scientifique ayant vite pu démontrer que certaines choses n’allaient pas. Ce qui n’a pas toujours été le cas. En 2010, The Lancet avait fini par officiellement supprimer de ses publications une étude de… 1998 portant sur les liens entre le vaccin ROR (rougeole-oreillons- rubéole) et l’autisme, pourtant très rapidement désavouée par la communauté scientifique.

Savoir faire marche arrière et reconnaître ses erreurs fait partie du processus scientifique. Il est plutôt rassurant que toutes les recherches publiées ne soient pas prises pour argent comptant.

Auteur : Julien Denoel

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