Profession reporter

Il est capable de décrire l’état des eaux saumâtres du vieux port de Manhattan avec la ferveur encyclopédique d’un Zola parlant des fromages des halles de Paris. Il sait rendre passionnantes l’histoire de Louie Morino, ce rital émigré pour devenir patron d’un restaurant de poissons du Lower East Side, ou sa déambulation dans un cimetière somptueusement fleuri de Staten Island. Reporter au New Yorker, l’Américain Joseph Mitchell (1908 – 1996) a toute sa vie souffert du syndrome de la page blanche. Au point de ne même pas publier une demi-ligne pendant trente-deux ans, de 1964 jusqu’à sa mort. Avant cette disette littéraire, ce qui en jaillissait était était d’une rare beauté. D’une force d’autant plus sèche et généreuse qu’elle se sentait déjà rare, fragile, condamnée à faiblir pour finalement se laisser mourir. Joseph Mitchell est le maître d’un genre extrême du reportage qu’on ne trouve plus ailleurs, étudiant l’homme avec une minutie monomaniaque. Son oeuvre est à découvrir.

Le Fond du port, par Joseph Mitchell, trad. de l’anglais (Etats-Unis), par Lazare Bitoun, Ed. du sous-sol, 258 p.

Retrouvez l’actualité littéraire aussi dans Focus Vif : cette semaine, notamment, Zero K, qui marque le retour saisissant de l’Américain Don DeLillo à une science-fiction métaphysique, en page 42, et La Serpe de Philippe Jaenada, tout juste récompensé par le prix Femina, page 43.

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