» Mieux encadrer les jeunes à risque « 

Les agressions à l’arme blanche n’augmentent pas. Mais certains actes sont très violents. Faut-il s’inquiéter ? Entretien.

Un professeur agressé au cutter dans une école à Ghlin : pourquoi certains jeunes se montrent-ils à ce point violents ? Comment prévenir cette violence ? Réponse de Michel Born, qui enseigne la psychologie de la délinquance à l’université de Liège.

Selon les études que vous avez menées, les agressions à l’arme blanche n’augmentent pas ( lire Le Vif/L’Express du 12 septembre). Faut-il s’inquiéter ou non ?

Bien sûr. Il ne faut pas attendre que cela augmente pour s’inquiéter. Il est d’ailleurs aberrant qu’on ne s’inquiète pas davantage. On dirait que le politique attend que l’opinion publique s’émeuve de certains faits pour prendre, à bras-le-corps, un phénomène comme celui des agressions à l’arme blanche. C’est très dommage. Parce que, dans notre idéal de civilisation, nous sommes en droit d’attendre que ce type d’agression diminue.

Certains jeunes sont-ils plus prédisposés que d’autres à la violence ?

Oui, mais cela ne dépend pas du milieu social, contrairement à ce que beaucoup pensent. Je parlerais plutôt de poches culturelles, de sous-groupes de jeunes, qui peuvent correspondre à des écoles ou à des classes spécifiques. Dans ces sous-groupes, la violence, comme parfois aussi la drogue, est valorisée, à défaut d’autres modèles de valeurs. Mais je le répète : de manière globale, la violence n’augmente pas.

L’agression du professeur de Ghlin, comme celle du directeur d’école de Dinant en 2007, n’est tout de même pas bénigne…

Quand je dis qu’on ne constate pas d’augmentation générale de la violence, je ne nie pas qu’il y ait un certain nombre de jeunes qui ont recours à des formes de violence très grave, ni qu’il y ait de plus en plus de jeunes à risque.

C’est-à-dire ?

Je pense que les jeunes sont plus réactifs qu’auparavant. Ils sont moins tolérants à la frustration. C’est dans l’air du temps. Aujourd’hui, l’enfant a davantage de pouvoir de décision, par exemple en termes de consommation ou de programmes télé. Or le système scolaire, lui, le contrarie, le frustre. Ce qui peut expliquer les agressions envers les profs.

Comment peut-on faire baisser cette violence-là ?

La réponse est toujours la même : par l’éducation. Tous les acteurs sont concernés. Parents, écoles, associations, clubs sportifs… Par une prévention plus positive aussi. On ne valorise toujours pas assez l’enseignement professionnel. Heureusement, la grande majorité des jeunes s’en sortent très bien. Un petit nombre n’y arrive pas. Il faut identifier les poches culturelles à risque et y investir davantage de moyens.

Propos recueillis par Thierry Denoël

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