Le violon ensorcelant de Nemanja Radulovic

Barbara Witkowska Journaliste

Allure de rock star, sourire ravageur… Son style est exubérant mais la sincérité et l’engagement de cette star franco-serbe de 27 ans ne font aucun doute. Après deux ans d’absence, celui qui électrise tous les publics revient à Bruxelles.

Le Vif/L’Express : Vous allez jouer avec l’Orchestre national de Belgique le Concerto N° 2 de Prokofiev. Que signifie ce compositeur pour vous ?

Nemanja Radulovic : Le Concerto N° 2 est moins joué que le Concerto N° 1. Il a été écrit en 1935, dans une période difficile. Prokofiev a quitté son pays au moment de la révolution. Il n’a pu y retourner que dix-huit ans plus tard, en 1936. Dans ce concerto, on ressent une grande tension et beaucoup d’inquiétude, surtout dans le premier mouvement. Le thème est repris par tous les instruments, il y a un réel échange entre le violon et l’orchestre. J’ai un faible pour les Russes. Leur musique est pleine de vie, traversée par une énergie singulière et s’accompagne d’une grande rigueur rythmique.

Quand avez-vous décidé d’être violoniste ?

A Belgrade, la musique faisait partie de notre vie quotidienne. A l’école, je dansais et je chantais tout le temps. Mes parents m’ont inscrit au cours de violon qui exige une oreille absolue. J’avais un très bon professeur, un élève de David Oïstrakh. Je suis monté sur scène à l’âge de 7 ans, j’ai joué des concertos de Vivaldi, je ne l’oublierai jamais. Je n’ai jamais eu de trac. La scène, c’est magique, on peut jouer un personnage, comme un comédien. Sur scène, j’essaie de faire la fête avec tout le monde. Nous avons assez de problèmes dans la vie de tous les jours. Je veux offrir de l’émotion et du plaisir.

Votre look participe au spectacle. Est-ce important pour attirer le public ?

Je me sens à l’aise avec lui : c’est mon look de tous les jours. J’ai des cheveux longs depuis l’âge de 17 ans. Ils me protègent, je suis dans ma bulle. Le maquillage est arrivé plus tard. J’adore le rock et l’allure des rockers. Leur intensité et leur énergie me touchent beaucoup. Si cela aide à attirer les jeunes, tant mieux. Les musiciens classiques sont trop conventionnels, ils ne se laissent pas aller et créent un mur entre eux et le public. Pour séduire les jeunes, il faut être sincère à 100 %. J’aime les vrais artistes qui ont un engagement sincère. Peu importe qu’on fasse parfois une fausse note. Dans la vie, il y a de tout, on ne peut pas être toujours parfait.

Votre groupe – Les Trilles du Diable – a un succès fou et vos CD font de l’ombre à ceux de Cecilia Bartoli…

Nous avons emprunté ce nom à une sonate de Giuseppe Tartini. Les musiciens sont issus du quatuor Illico. Un contrebassiste s’est joint à nous. Notre répertoire est classique, un mélange de morceaux très connus et d’oeuvres moins connues, celles de Wieniawski ou de Kreisler, par exemple. Le public a l’impression d’assister à un concert rock. Nous sommes dans notre élément, dans un moment de générosité et de partage. C’est ce qu’il y a de plus important pour moi.

L’avenir, vous y pensez ?

Non. L’année 2012 a été très difficile pour moi sur le plan personnel, j’ai perdu ma mère puis ma soeur. Nous sommes de passage sur cette Terre. Je fais plusieurs heures de violon par jour pour partager des émotions avec le public. Je considère chaque concert comme le premier et le dernier, je veux toujours tout donner.

Au Palais des beaux-arts de Bruxelles, avec l’Orchestre national de Belgique, le vendredi 14 juin, à 20 heures. www.bozar.be

BARBARA WITKOWSKA

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