Le Parti populaire, refuge des amers

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

Les têtes de liste du parti de Mischaël Modrikamen sont des déçus du système qui ont déserté les autres formations politiques faute d’avoir pu y faire carrière. Ou qui sont en rupture de ban pour cause de déclarations-chocs.

Cinq ans après la création du PP, Mischaël Modrikamen espère enfin réussir une percée lors du triple scrutin de mai prochain.  » Nous sommes rejoints par toutes les classes de la population. Certains viennent du MR, du CDH, du PS ou d’Ecolo… Ils désertent les partis traditionnels coupés des aspirations réelles de la population.  » Son credo ? Le  » retour du bon sens « . Le PP, prétend-il, est un  » parti de rupture qui dit en des mots simples et crus ce que nombre de citoyens veulent entendre : il faut moins de taxes, garantir la tolérance zéro face à la criminalité, contrôler l’immigration sauvage… Ceux qui viennent vivre chez nous doivent contribuer au bien-être commun. S’ils veulent uniquement se servir au buffet de la Sécurité sociale, ils n’ont rien à faire ici.  »

Des montagnes d’amertume

Pour incarner ce discours ultra-populiste, l’avocat a choisi des têtes de liste qui, toutes, sont des personnalités en rupture de ban.  » Je suis heureux d’être devenu un membre de cette famille après ce qui m’est arrivé « , souligne ainsi, défiant, Luc Trullemans. Exclu de l’antenne de RTL-TVI en avril 2013 suite à la publication d’une lettre coup de sang au ton raciste sur son compte Facebook, l’ancien présentateur météo ne regrette rien et assume son nouveau statut de redresseur de torts.

A peine présenté comme tête de liste dans le Luxembourg, l’ancien Diable Rouge Michel Renquin, lui, s’est vu rappeler son salut nazi effectué après son exclusion lors d’un match du Standard à Cologne en 1980.  » L’arbitrage avait été terrible, par un Irlandais avec une petit moustache, et le public allemand nous conspuait, j’ai voulu dénoncer tout ça « , affirme-t-il en avouant que ce n’était  » pas très heureux  » et qu’il  » connaît ses valeurs « . Son choix de rejoindre le PP ?  » Pour la première fois, je me demandais si j’allais voter blanc en mai. Aucun parti ne me correspond plus, ce sont toujours les mêmes têtes. J’ai vécu vingt ans en Suisse et j’apprécie les valeurs d’éducation, de respect, de l’immigration contrôlée.  »

Tête de liste à Liège, Aldo Carcaci fut, lui, secrétaire national de deux organisations au sein de l’Union nationale des Mutualités socialistes, et échevin PS des Affaires sociales à Saint-Georges-sur-Meuse. Actif dans le football, il s’est ensuite lancé dans le privé comme CEO de Base Technologies Africa en Côte d’Ivoire.  » De retour d’Afrique, je n’ai plus reconnu mon pays, clame-t-il, amer. Le PS n’est plus le parti des petites gens mais celui de la social-démocratie et des minorités. On accorde trop d’importance à une immigration non contrôlée et aux faux réfugiés. Cela met en péril la pyramide et l’organisation de notre Sécurité sociale.  »

Deuxième sur la liste à la Chambre, Trang Nguyen fustige l’attitude du CDH à son égard :  » Je n’ai plus eu de nouvelles du parti depuis janvier 2012, quand j’ai perdu mon poste d’attachée de presse de Melchior Wathelet, déclare-t-elle. Benoît Lutgen n’est pas venu m’expliquer clairement la situation… Si ça avait été le cas, peut-être serais-je restée. Est-ce cela l’humanisme ?  »

Tête de liste à Bruxelles, anthropologue, Tatiana Hachimi est une ancienne candidate MR qui a quitté les réformateurs parce que  » les programmes se faisaient uniquement en fonction de calculs électoraux « . Dans le Brabant wallon, Michaël Debast dénonce la gabegie de la construction de la gare Calatrava à Liège… dont il fut un des ingénieurs.

Partout, des montagnes d’amertume. Avec le risque de faire naître un nouveau Laurent Louis, ce député trublion écarté du PP pour ses frasques à répétition ?  » C’était une erreur de jeunesse, plaide Mischaël Modrikamen. Il n’aurait d’ailleurs pas dû être élu, il a simplement bénéficié de l’apparentement.  » Dans les partis traditionnels, on regarde les candidats présentés par le PP avec un mélange de crainte et de consternation.  » Ce sont des clettes « , lâche l’un d’entre eux.  » Heureusement qu’ils ont placé Trullemans à l’Europe. Sa popularité était leur seul atout, ils vont la gâcher là où il leur sera très difficile d’obtenir un siège.  »

Olivier Mouton

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