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Résultats des élections en Ukraine, « nouvel obstacle » à la paix

Les dirigeants rebelles en guerre avec Kiev ont remporté dimanche sans surprise une victoire écrasante aux élections séparatistes dans l’est de l’Ukraine, un scrutin qualifié de « nouvel obstacle » au fragile processus de paix par les Européens, mais déjà reconnu par la Russie.

Le vote dans les territoires contrôlés par les combattants prorusses – soit la moitié de la région de Donetsk et une petite partie de la région de Lougansk – a confirmé dans leurs fonctions les chefs rebelles arrivés pendant l’été à la tête des mouvements séparatistes de l’Est du pays. A Donetsk, le « Premier ministre » de la République autoproclamée de Donetsk (DNR), Alexandre Zakhartchenko, a été élu « président » avec 81,37% des voix, selon un sondage réalisé à la sortie des bureaux de vote annoncé par Roman Liaguine, chef de la commission électorale mise en place pour ce scrutin par la DNR.

Le parti de ce mécanicien de 38 ans qui, avant d’être nommé Premier ministre en août, était responsable d’un groupe paramilitaire, Oplot, dont le chef avait publiquement appelé à « crever un oeil ou casser une jambe » aux opposants pro-européens, a obtenu plus de 65% aux élections législatives. A peine élu, M. Zakhatchenko a fustigé l’Ukraine qui « ne veut pas la paix » et « joue un double jeu ». « Nous sommes prêts au dialogue avec eux, mais nous attendons de leur part une attitude normale et raisonnable, a-t-il déclaré.

A Lougansk, autre place forte des séparatistes, l’ex-militaire de 50 ans Igor Plotnitski, très attaché au passé soviétique, a également été élu avec plus de 63% des suffrages, tout comme sa formation politique majoritaire au « Parlement » de Lougansk.

Les élections dans les républiques autoproclamées risquent de sceller la perte de contrôle par Kiev des territoires rebelles, à l’issue d’un conflit de plus de six mois qui a fait plus de 4.000 morts après l’annexion en mars de la Crimée par la Russie. Elles risquent d’aggraver la crise sans précédent entre la Russie et l’Occident déclenchée par la contestation du Maïdan à Kiev réprimée dans le sang et ayant entraîné la chute du régime prorusse et la fuite en Russie du président Viktor Ianoukovitch.

Le président pro-occidental Petro Porochenko, élu en mai, a qualifié ces scrutins de « farce menée sous la menace des chars ». Les Européens, qui avaient dénoncé l’organisation du scrutin, ont estimé dimanche soir qu’il s’agissait d’un « nouvel obstacle » sur la voie d’une solution pacifique au conflit.

Selon le nouveau chef de la diplomatie de l’UE, Federica Mogherini, ces élections étaient « contraires à la lettre et à l’esprit » des accords conclus en septembre à Minsk entre Kiev et les rebelles, avec le soutien de la communauté internationale et de la Russie.

Sans surprise, Moscou a annoncé « respecter » les résultats des élections, premier pas vers une reconnaissance des autorités séparatistes de Donetsk et de Lougansk. « Les élections dans les régions de Donetsk et de Lougansk ont eu lieu dans le calme, avec un taux de participation élevé », s’est félicité le ministère russe des Affaires étrangères. « Ceux qui ont été élus ont obtenu un mandat pour résoudre les problèmes pratiques afin de rétablir la vie normale dans les régions » de l’Est de l’Ukraine, a ajouté la diplomatie russe.

Pendant les élections, un porte-parole militaire ukrainien avait dénoncé un déploiement « intense d’équipements et de troupes » en provenance de Russie, alors qu’il était interrogé sur les images et vidéos diffusées par des médias ukrainiens sur lesquelles on voit plusieurs dizaines de camions militaires sans plaques d’immatriculation, présentés comme une « colonne russe dans les rues de Donetsk ».

Aucune organisation internationale n’a envoyé d’observateurs pour ces élections. Et alors que les médias russes publient des commentaires d' »observateurs internationaux » sur le scrutin, Kiev a accusé la Russie de « manipulation » avec la mise en place d’une fausse OSCE, l' »ASCE » (Association pour la sécurité et la coopération en Europe) réunissant des « hommes politiques de droite ».

Un observateur français proche du Front national, le député européen Jean-Luc Schaffhauser, a salué ces élections comme étant « démocratiques » et reflétant « la volonté du peuple ».

Sur le terrain, le cessez-le-feu qui en découle semble être de plus en plus virtuel, avec une reprise des combats dans plusieurs zones qui ont fait plus de 300 morts au cours des dix derniers jours, selon un bilan établi par l’ONU. L’armée ukrainienne a ainsi perdu dix hommes au cours du week-end.

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