Joe Biden à la tribune de l'ONU, le 21 septembre 2021

Premier discours de Biden à l’ONU, entre refus d’une Guerre froide avec la Chine et efforts financiers multiples

Le Vif

Joe Biden a affirmé mardi devant l’ONU qu’il ne voulait pas d’une « nouvelle Guerre froide » avec la Chine, et a défendu son attachement à la diplomatie et au multilatéralisme face à des alliés européens qui l’accusent de faire trop souvent cavalier seul.

« Nous ne voulons pas d’une nouvelle Guerre froide, ou d’un monde divisé en blocs rigides », a lancé le président des Etats-Unis pour le premier discours de son mandat à l’Assemblée générale des Nations unies. Pour autant, « les Etats-Unis vont participer à la compétition, et y participer avec vigueur », a-t-il prévenu en livrant sa vision de la confrontation avec Pékin, sans nommer directement la puissance rivale.

u003cstrongu003eu0022Avec nos valeurs et notre force, nous allons défendre nos alliés et nos amis, et nous opposer aux tentatives des pays plus forts de dominer les plus faiblesu0022u003c/strongu003e

Le président Biden, engagé dans un combat contre les « autocraties », a aussi promis de « défendre la démocratie ».

Son discours à la prestigieuse tribune new-yorkaise de l’ONU sera suivi dans la journée par celui du président chinois Xi Jinping, par vidéo pré-enregistrée, dans un duel à distance entre les deux superpuissances engagées dans une confrontation de plus en plus envenimée.

Ere de diplomatie

En prélude à cet échange, le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres avait mis en garde Washington et Pékin contre une dégradation des crises mondiales qui serait « beaucoup moins prévisible que la Guerre froide », et a appelé les deux superpuissances au « dialogue » et à la compréhension.

Le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian avait aussi mis en garde lundi contre une « orientation très confrontationelle » des Etats-Unis, estimant que les Européens devaient défendre un « modèle alternatif ».

Pékin conteste aussi l’idée d’une nouvelle Guerre froide comme celle qui a opposé les Etats-Unis à l’Union soviétique au cours de la seconde moitié du XXe siècle. Mais c’est à peu près le seul point de convergence entre les deux pays, dont les relations sont de plus en plus tendues.

Le grand rendez-vous diplomatique mondial, qui s’est ouvert mardi et durera une semaine, est particulièrement attendu cette année, après la version essentiellement virtuelle de l’an dernier.

Pour le démocrate américain, le discours dans le temple du multilatéralisme a été l’occasion de mettre en avant le « retour » de l’Amérique comme partenaire fiable auprès de ses alliés malmenés pendant quatre années de mandat de Donald Trump.

« Au cours des huit derniers mois, j’ai accordé la priorité à la reconstruction de nos alliances, à la revitalisation de nos partenariats et à la reconnaissance qu’ils sont essentiels à la sécurité et à la prospérité durables de l’Amérique », a-t-il plaidé.

Il a dit qu’il annoncerait mercredi de « nouveaux engagements » contre la pandémie et a promis de « doubler » l’effort financier international de Washington contre le changement climatique.

Il s’est surtout engagé à ouvrir une « ère de diplomatie » après la fin de la guerre en Afghanistan, assurant que la force militaire ne serait utilisée par les Etats-Unis qu’en « dernier recours ».

Crise ouverte avec la France

Mais le retrait d’Afghanistan, qui s’est achevé dans le chaos fin août au grand dam de nombreux pays européens, puis la crise ouverte avec la France dans l’affaire des sous-marins, qui a éclaté la semaine dernière, ont totalement brouillé son message.

Paris ne décolère pas contre l’annonce par les Etats-Unis, le 15 septembre, d’un pacte de sécurité conclu avec l’Australie et le Royaume-Uni pour contrer Pékin, surnommé AUKUS. Ce nouveau partenariat a mis le feu aux poudres transatlantiques, car il s’est fait dans le dos des Français, qui ont perdu un énorme contrat de sous-marins commandés par Canberra.

Le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a encore dénoncé lundi à New York une décision « brutale » et une « rupture de confiance entre alliés ».

Et l’Union européenne a offert à la France le « soutien » et la « solidarité » qu’elle espérait, selon le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell.

Signe que Paris n’est pas prêt à tourner la page, un conseiller du président français Emmanuel Macron a prévenu que son entretien téléphonique attendu « avant la fin de la semaine » avec Joe Biden ne serait « pas un échange de réconciliation » mais de « clarification ».

Surprenant plusieurs membres des Nations unies, le président Macron a choisi de ne pas se rendre à New York cette année — son ministre des Affaires étrangères s’exprimera au nom de la France, par vidéo, dans plusieurs jours.

Parmi les autres intervenants mardi, outre les dirigeants brésilien et turc, figure le nouveau président iranien Ebrahim Raïssi qui fera son entrée sur la scène internationale. Son discours, par vidéo, est très attendu pour savoir si cet ultraconservateur est disposé à relancer les négociations de Vienne visant à sauver l’accord sur le nucléaire iranien que les Etats-Unis ont quitté avec fracas en 2018.

Depuis son élection en juin, les discussions indirectes entre Téhéran et Washington sont interrompues et les efforts vont bon train, dans les coulisses de l’ONU, pour les remettre sur les rails.

Joe Biden a redit qu’il était prêt à revenir pleinement dans l’accord si Téhéran renoue aussi avec les restrictions nucléaires dont l’Iran s’est affranchi.

Des efforts financiers

Biden a en outre promis d’augmenter les efforts internationaux des Etats-Unis pour lutter à la fois contre la pandémie et contre le changement climatique.

Washington va ainsi « annoncer des engagements supplémentaires » pour doper la vaccination dans les pays les moins avancés mercredi, lors d’un sommet virtuel qu’il organise, a indiqué Joe Biden de son discours. Le président américain a également promis de travailler avec le Congrès américain pour « doubler à nouveau » le montant de l’aide internationale accordée par les Etats-Unis aux pays les moins avancés pour faire face au changement climatique.

Selon des experts, cela signifie un engagement d’environ 11 milliards de dollars par an.

u003cstrongu003eu0022Avec notre aide, ainsi qu’un capital accru du privé et d’autres donateurs, nous serons capables d’atteindre le but de mobiliser 100 milliards de dollars pour soutenir l’action climatique dans les pays en développementu0022u003c/strongu003e

Les pays développés se sont en effet engagés en 2009 à Copenhague à mobiliser 100 milliards de dollars par an entre 2020 et 2025 pour cette assistance, mais le plan de financement, qui doit être annoncé lors de la COP26, a pris du retard.

Le président de la COP26, Alok Sharma, a déclaré sur Twitter « accueillir avec force » la promesse de Joe Biden. « Nous devons poursuivre cet élan », a-t-il ajouté.

L’annonce du président américain « est la bienvenue et un signe nécessaire que les Etats-Unis sont enfin en train de prendre leur responsabilité climatique au sérieux », a réagi mardi Rachel Cleetus, de l' »Union des scientifiques préoccupés ».

« Nous applaudissons la promesse du président Biden », a abondé dans un communiqué Thanu Yakupitiyage, de l’organisation militante 350.org. « Les Etats-Unis sont responsables de la plus grande partie des émissions historiques induisant le changement climatique », a-t-elle rappelé. Joe Biden va cependant « devoir travailler avec le Congrès américain pour s’assurer que ces fonds peuvent être délivrés », a prévenu Helen Mountford, du World Resources Institute.

Le président Biden a également promis que les Etats-Unis s’engageaient à investir « 10 milliards de dollars pour faire cesser la faim et investir dans le système alimentaire » aux Etats-Unis et à l’étranger.

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