Le croiseur Moskva, en mer Méditerranée en 2015. © iStock

Pourquoi la perte du navire Moskva est un coup dur pour la Russie (infographie)

Eglantine Nyssen
Eglantine Nyssen Journaliste au Vif, multimedia editor

Confirmation russe ce jeudi soir, le navire russe a bien coulé. Les causes ne sont pas encore claires mais le navire était un atout important en mer Noire.

« Lors du remorquage du croiseur Moskva vers le port de destination, le navire a perdu sa stabilité (…). Dans des conditions de mer agitée, le navire a coulé. » Cette déclaration du ministère russe de la Défense ce jeudi soir est un coup dur pour l’armée de Poutine. Ce bâtiment de 186 mètres, rebaptisé Moskva (Moscou, en russe) en 1995, est un navire hautement symbolique mais pas seulement. Il était un atout important en mer Noire. Moscou n’a pas donné d’indication sur d’éventuelles victimes. L’ensemble de l’équipage de plus de 500 hommes aurait été évacué, selon le ministère de la Défense.

Ce qui est arrivé au Moskva dans la nuit de mercredi à jeudi n’est pas encore clair, si ce n’est que le navire a été évacué après qu’un incendie se soit déclaré. Selon les Russes, le navire a été fortement endommagé après l’explosion des munitions à bord. Le gouverneur ukrainien de la région d’Odessa, Maxime Martchenko, a affirmé de son côté que les forces armées ukrainiennes avaient frappé le Moskva avec des missiles de croisière Neptune, lui infligeant d' »importants dégâts ».

Si le Pentagone n’a pas accrédité l’une ou l’autre version, son porte-parole, John Kirby, déclarait ce jeudi que la perte du Moskva aurait « des conséquences sur leurs (des Russes, ndlr) capacités » de combat, le navire étant un « élément-clé de leurs efforts pour établir une domination navale en mer Noire ». Dans les deux cas, « c’est une perte symbolique très forte« , estime de son côté l’ex-amiral français Pascal Ausseur. « Un navire comme celui-là est en principe entraîné à continuer à combattre après un ou plusieurs impacts et sait maîtriser un incendie. C’est un bateau de 12.000 tonnes, qui a coulé en 12 heures. » « C’est une toute petite mer, tout le monde est à portée de missile anti-navires. La détection et identification sont très simples », ajoute-t-il. La disparition du Moskva « montre une vraie vulnérabilité » de la marine russe.

Un croiseur hautement symbolique

Le Moskva était un croiseur, c’est à dire un navire de guerre puissant et particulièrement grand. Avec une longueur de 186 mètres, le Moskva avait été construit à l’origine pour détruire les porte-avions américains. Il était armé de 16 missiles antinavires Bazalt/Voulkan, de missiles Fort, de missiles de courtes portées Ossa, de lance-roquettes, de canons et de torpilles. Selon l’agence de presse russe Ria Novosti, il a connu deux remises en état et modernisations d’ampleur, la dernière étant toute récente, remontant à 2018-2020. Il était capable de coordonner des opérations et de commander plusieurs autres navires en même temps. D’où son appellation de « navire amiral ».

Mis en service en 1983 à l’époque soviétique, le Moskva avait participé aux principales opérations militaires russes de ces dernières années: la guerre en Géorgie, en août 2008, et au conflit syrien. De septembre 2015 à janvier 2016, il avait été dépoloyé en Méditerranée orientale afin d’assurer, selon le ministère de la Défense, « la défense anti-aérienne » de la base russe de Hmeimim. Il a par ailleurs accuelli plusieurs dirigeants étrangers à son bord. Vladimir Poutine y a lui-même reçu des proches avec les honneurs militaires.

Le navire était basé à Sébastopol (voir carte), base de la flotte russe de la mer Noire en péninsule de Crimée annexée par la Russie en 2014 et a participé à l’offensive lancée en février dernier contre l’Ukraine. Ce n’est pas la première fois que l’on en entend parlé depuis le début du conflit. Dans un échange radio devenu viral, le navire avait demandé à des garde-frontières ukrainiens de la petite île aux Serpents en mer Noire de se rendre. Ce à quoi ils avaient répondu: « Navire militaire russe, va te faire foutre! ». Peu après le Moskva avait bombardé l’île et les militaires ukrainiens avaient été faits prisonniers.

Evolution des troupes russes en Ukraine, le 10 avril dernier

Pourquoi la perte du navire Moskva est un coup dur pour la Russie (infographie)
© Le Vif

Quelles suites?

Il protégeait l’intégralité d’un diamètre de 150 kilomètres autour de sa position. « Avec les détroits du Bosphore et des Dardanelles fermés par la Turquie aux navires russes, il sera difficile pour la Russie de remplacer ses capacités de défense aérienne », selon Nick Brown, expert à l’institut de renseignement britannique privé Janes. Mais « le reste de la flotte de la mer Noire demeure une force puissante. La flotte russe n’a pas été mise hors de combat« .

Crainte d’escalade

Les revers militaires en Ukraine pourraient inciter le président russe Vladimir Poutine à recourir à une arme nucléaire tactique ou de faible puissance dans ce pays, a prévenu ce jeudi William Burns, le chef de la CIA.

En retour, la Russie a accusé l’Ukraine d’avoir bombardé des villages russes frontaliers. Le Comité d’enquête russe a affirmé que deux hélicoptères ukrainiens « équipés d’armes lourdes » étaient entrés en Russie et avaient procédé à « au moins six frappes sur des immeubles d’habitation dans le village de Klimovo », dans la région de Briansk. Des affirmations qu’a rejeté le Conseil national de sécurité et de défense ukrainien, accusant les services secrets russes de mener des « attaques terroristes » dans la région frontalière pour alimenter « l’hystérie anti-ukrainienne ».

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