L'usine Volkswagen de Wolfsburg © REUTERS

Peur, colère et déception sur Wolfsburg, fief de Volkswagen

Musée, équipe de foot, parc à thème, à Wolfsburg, tout respire Volkswagen. Avec le scandale qui ébranle le constructeur automobile, cette ville du nord de l’Allemagne, siège du groupe, craint d’avoir le souffle coupé.

« Les habitants sont en colère, sont tristes, sont déçus », raconte Carsten Steinbach, 55 ans, aux abords de l’imposant stade de foot de la ville, la… Volkswagen Arena.

Ce natif de Wolfsburg, chauffeur de taxi depuis 33 ans, a lui-même travaillé en parallèle pendant 13 ans chez le constructeur automobile et deux de ses enfants y sont salariés.

« Il y a aussi un sentiment de peur, car c’est notre pain. Ici on dit « Quand Volkswagen a un rhume, nous attrapons une pneumonie » », raconte-t-il appuyé sur le capot de son taxi. Un modèle Volkswagen évidemment, comme l’écrasante majorité des voitures garées dans les rues de Wolfsburg. La plupart des clients de Carsten Steinbach sont des gens allant et venant chez VW.

La première usine Volkswagen, d’où sont sorties les célèbres et rondes Coccinelles, a été créée en 1938 à l’instigation des nazis de Wolfsburg, à 200 kilomètres à l’ouest de Berlin. L’immense logo agrégeant les fameuses lettres V et W dans un cercle blanc, qui saute aux yeux du visiteur dès son arrivée à la gare, ne laisse aucun doute que, plus de 75 ans plus tard, la gigantesque usine avec ses quatre cheminées transperçant le ciel reste le poumon de la ville.

Au total, 73.000 personnes travaillent à Wolfsburg pour le constructeur, répartis entre le siège administratif, les activités de recherche et développement et l’usine d’où sortent les Golf et les modèles Tiguan et Touran.

Grâce à cela, la ville de 124.000 habitants peut s’enorgueillir d’un taux de chômage plus bas que la moyenne nationale (4,9% contre 6,4%).

Après la révélation de tricheries par VW pour contourner les normes anti-pollution aux Etats-Unis, qui a conduit depuis au départ expéditif du patron dont le successeur doit être nommé vendredi, le maire Klaus Mohrs a vite rappelé que « dans l’intérêt de la ville », des explications rapides étaient nécessaires.

La population entière profite de VW

« La population entière profite de VW. Quand VW va mal, ils paient moins d’impôts à la ville et donc la ville a moins d’argent et peut moins investir, donc cela nous concerne tous », souligne Angelika Hupetzky, 55 ans, technicienne spécialisée chez Volkswagen.

La crainte de réduction des paies, voire pire, de suppressions d’emplois, est dans tous les esprits. D’autant qu’au-delà des salariés directs du constructeur, comme elle-même depuis 38 ans, ou deux de ses enfants, il y a aussi ceux qui travaillent chez les sous-traitants ou les concessionnaires. « Ici tout dépend de Volkswagen », résume Mme Hupetzky, écharpe IG Metall nouée autour du cou, participant à un rassemblement du puissant syndicat de la métallurgie.

Pour l’heure, « nous ne voyons aucun changement », pas de désertion chez les visiteurs de « l’Autostadt », gigantesque parc à thème dédié à la voiture, affirme Tobias Riepe, porte-parole de cette filiale de Volkswagen, qui attire plus de deux millions de personnes par an.

L’heure est néanmoins à rassurer. Le directeur d' »Autostadt » (la ville de la voiture), Otto Wachs, s’est ainsi empressé d’assurer à ses mille salariés « qu’ils allaient convaincre l’opinion publique et (les) clients, malgré cette phase difficile, de la qualité de l’entreprise et des produits ».

A Wolfsburg, on espère désormais un retour au calme. On ne serait pas contre non plus que l’oeil du cyclone s’éloigne de la petite ville de Basse-Saxe. « Je ne crois pas que seul Volkswagen » ait triché de cette façon, avance Hachim. Ce retraité de 59 ans est persuadé que « cela va finir par s’arranger ».

Assis le long du canal, face à l’usine de voitures, Wolfgang, 63 ans, se rappelle lui ce que disait son père: « si Volkswagen s’en va ou va mal, Wolfsburg devient une ville fantôme ».

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