Le président ukrainien Volodymyr Zelenskiy rencontre le président Trump lors d'une bilatérale à l'Assemblée Générale de l'ONU ce 25 septembre. © reuters

Les zones d’ombres autour de la retranscription de la conversation entre Trump et le président ukrainien

Caroline Lallemand
Caroline Lallemand Journaliste

La Maison-Blanche a publié mercredi une retranscription de l’appel du président Donald Trump au président ukrainien Volodymyr Zelensky le 25 juillet. Cet entretien téléphonique controversé a conduit au déclenchement de la procédure de destitution contre le président américain. Des zones d’ombre entourent cette retranscription.

Suite au scandale dans lequel il est plongé, Donald Trump l’avait promis : une transcription « complète, totalement déclassifiée et non expurgée » de son entretien avec le président ukrainien Zelensky serait rendue publique, montrant que la conversation évaluée à environ une demi-heure que le président des USA a eue avec son homologue uktrainien était « totalement appropriée ».

Mercredi, l »entretien a été divulgué par la Maison Blanche, soit 5 pages d’un document déclassifié. Dans cette retranscription de l’appel téléphonique entre les deux dirigeants, on peut y lire que Donald Trump a bien demandé au chef d’Etat ukrainien d’enquêter sur son rival Joe Biden.

Suite à la divulgation de cette transcription, des voix s’élèvent pour dire qu’elle n’est pas complète. Et rien n’est moins clair sur l’existence d’une version plus extensive. Cela pourrait signifier que la Maison-Blanche ait pu omettre certains passages qui sont encore plus dévastateurs pour le président ou les rendre imprécis.

Comme l’explique VOX sur son site, il est important de noter, d’entrée de jeu, que ce résumé de l’appel n’est pas tout à fait une transcription textuelle de ce que Trump et Zelensky se sont raconté. Le document se présente écrit comme une transcription, avec des citations directes assignées à chaque leader, mais ce n’est pas une transcription faisant autorité d’un enregistrement audio. Une note sur la première page l’indique d’ailleurs clairement.

La Maison-Blanche a reconnu que cette note de service de cinq pages « non expurgée » devenue un élément central de la procédure de destitution engagée par les Démocrates contre Trump n’est pas un compte-rendu textuel de la conversation entre les deux dirigeants en date du 25 juillet.

« Le texte de ce document enregistre les notes et les souvenirs des officiers de service de la « Situation Room » (NDLR: salle de crise de la Maison Blanche) et du personnel chargé de l’élaboration des politiques du Conseil de Sécurité National (NLDR: National Security Council) chargés d’écouter et de commémorer la conversation par écrit au fur et à mesure que celle-ci se déroule « , explique le rapport. »

Lire ici la retranscription de l’appel téléphonique entre Trump et Zelensky.

Le document
Le document « déclassifié » de la Maison Blanche avec le retranscription de l’entretien téléphonique entre les deux chefs d’Etat. © reuters

En réalité, il n’est pas possible qu’un tel enregistrement audio de la conversation complète entre Trump et Zelensky existe, car les présidents américains ont cessé d’enregistrer leurs conversations il y a des décennies.

Le « Presidential Recordings Program »(programme d’enregistrement des présidents), de l’Université de Virginie a recensé tous les enregistrements des conversations téléphoniques des présidents américains afin de les rendre accessibles au grand public, entre 1940 et 1973. Franklin D. Roosevelt a été le premier président à commencer à enregistrer ses appels, la pratique était courante jusqu’au président Richard Nixon, qui compte environ 3.400 heures de discussions à son actif. Des enregistrements qui lui sont d’ailleurs revenus en pleine figure pendant le scandale du Watergate. Son refus d’une citation à comparaître devant le Congrès a conduit à une procédure de destitution. Nixon a été le dernier président à prendre l’habitude d’enregistrer ses appels téléphoniques.

Aujourd’hui, les transcriptions des appels présidentiels sont basées sur des notes, qui peuvent être plus ou moins détaillées et précises, explique CBS News sur son site. Une note au bas de la note de service de Trump divulgué ce mercredi souligne d’ailleurs dans ce sens qu' »un certain nombre de facteurs peuvent influer sur l’exactitude du dossier », comme les mauvaises connexions téléphoniques, les accents et l’utilisation d’interprètes.

La Maison-Blanche n’a pas donné plus d’informations sur l’existence d’un enregistrement de l’appel entre les USA et Ukraine. Trump a, de son côté, déclaré lors d’une conférence de presse, mercredi soir, qu’il publierait un compte-rendu d’un appel précédent qu’il avait eu avec Zelensky.

Trump a laissé entendre qu’il a enregistré certaines de ses conversations à la Maison-Blanche, bien que cela n’ait jamais été prouvé. Quelques jours après que Trump eut congédié le directeur du FBI James Comey en mai 2017, il a tweeté que Comey « ferait mieux d’espérer qu’il n’y ait pas de  » bandes  » de nos conversations avant qu’il ne commence à faire fuiter des infomations à la presse! » . Aucun enregistrement sonor de James Comey n’a toutefois jamais émergé, et leur existence n’a jamais été confirmée, rappelle CBS News.

En 2017, le Washington Post a publié des transcriptions complètes des appels du président aux dirigeants du Mexique et de l’Australie. Le New York Times a rapporté qu’après ces fuites, la Maison-Blanche a imposé plus de restrictions quant à qui peut entendre les appels téléphoniques du président et voir les notes qui en découlent.

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