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Les trois secrets des mystérieuses apparitions de Fatima

Muriel Lefevre

Le pape François se rend ce vendredi et samedi en pèlerinage à Fatima, dans le centre du Portugal. Soit là où serait apparue il y a cent ans la Vierge Marie. Ce haut lieu du catholicisme et de dévotion populaire fait aussi l’objet de polémiques. Retour sur l’un des sanctuaires les plus visités au monde, l’apparition d’une « dame plus brillante que le soleil » et ses trois secrets.

Avec huit millions de visiteurs attendus cette année, Fatima figure parmi les sanctuaires mariaux les plus fréquentés au monde, à l’instar de Guadalupe au Mexique (20 millions), Aparecida au Brésil (12 millions) ou Lourdes en France (6 millions).

Il faut dire que le lieu fait l’objet d’un culte fébrile. La dévotion à Notre-Dame de Fatima est marquée par d’intenses manifestations de foi. Pour expier des péchés ou remercier la Vierge de l’aide apportée aux fidèles en mal de santé, amour ou argent, de nombreux pèlerins marchent à pied en direction de Fatima pendant plusieurs jours et parcourent à genoux les dernières centaines de mètres menant à la Chapelle des apparitions.

Le commun des mortels n’est pas le seul à s’y rendre puisqu’avec la visite du Pape François, qui voue une intense dévotion à Marie et apprécie la vitalité de la piété , ils ne seront pas moins de quatre souverains pontifes à s’y être rendus en pèlerinage. Paul VI a été le premier à prier sur le lieu des apparitions, en 1967, à l’occasion de leur 50e anniversaire. Jean-Paul II, qui a fait le déplacement en 1982, 1991 et 2000, vouait une dévotion particulière à Notre-Dame de Fatima. Convaincu qu’elle lui avait sauvé la vie lors de la tentative d’assassinat dont il avait été la cible, il a offert au sanctuaire la balle qui l’avait grièvement blessé, aujourd’hui enchâssée dans la couronne de la statue la représentant. En 2010, Benoît XVI y a été accueilli par quelque 500.000 fidèles.

Pour la visite du Pape François, on s’attend à des centaines de milliers de pèlerins. De quoi réjouir les 43 hôtels de Fatima.

Les trois bergers et les trois secrets

Tout commence selon l’histoire officielle le 13 mai 1917. Ce jour-là, trois petits bergers, Jacinta, 7 ans, Francisco, 9 ans, et leur cousine Lucia, 10 ans, affirment avoir vu la Vierge Marie au-dessus d’un chêne vert à Cova da Iria, alors un terrain rocailleux près du village de Fatima. Cette « dame plus brillante que le soleil » leur apparaîtra à cinq autres reprises au cours des mois suivants.

Il n’en faut pas plus pour enflammer la ferveur populaire. Entre 50.000 à 70.000 personnes vont se rassembler à Cova da Iria lors de la dernière apparition, le 13 octobre, jour où se serait produit un étrange phénomène météorologique décrit comme « le miracle du soleil ».

On notera tout de même que cette rencontre ne portera pourtant pas chance aux enfants, puisque deux des trois voyants, Francisco Marto et sa petite soeur Jacinta, vont mourir de la grippe espagnole en 1919 et 1920 à l’âge de dix et neuf ans. Le troisième enfant, leur cousine Lucia dos Santos devenue religieuse de l’Ordre des Carmélites, s’est éteint en 2005 à l’âge de 97 ans. Les dépouilles des trois voyants reposent à l’intérieur de la basilique de Notre-Dame-du-Rosaire de Fatima, qui surplombe l’esplanade du sanctuaire bâti à Cova da Iria.

D’après le récit de soeur Lucie, la Vierge leur aurait livré un message qui devait rester secret, mais dont les deux premières parties ont été rendues publiques par le pape Pie XII en 1942. Le premier secret se référait à une « vision de l’enfer » pour dénoncer l’athéisme et les persécutions contre l’Eglise.

Le deuxième évoquait « une guerre encore pire » que celle en cours en 1917, appelant à la pénitence des Chrétiens et à la « conversion de la Russie », bouleversée à l’époque par la révolution bolchévique.

Le troisième secret ne sera révélé par le Vatican qu’en 2000. Il aurait été une prophétie annonçant l’attentat perpétré contre Jean Paul II sur la place Saint-Pierre à Rome, le 13 mai 1981. Une version réinterprétée par Benoît XVI lors d’une visite au Portugal en 2010. Ce dernier l’aurait réactualisé en affirmant que la Vierge aurait annoncé les « souffrances » de l’Église, secouée alors par des scandales de pédophilie.

Entre doutes et canonisation

Issus de familles très humbles, les trois petits bergers étaient loin d’imaginer qu’ils deviendraient l’objet d’un culte dans le monde entier. Pratiquement analphabètes et gardiens du maigre troupeau de leur famille, les trois bergers ont vu leur vie bouleversée quand la nouvelle des « apparitions » a commencé à faire le tour du Portugal. À l’époque, ils furent à de nombreuses reprises pris à partie et accusés de sorcellerie.

Même l’Eglise catholique mit en cause, dans un premier temps, la nature « miraculeuse » de leurs visions. Puis, en 1930, elle finit par déclarer les apparitions « dignes de foi » et autorisa le culte de Notre-Dame de Fatima.

Encore aujourd’hui, une partie du monde catholique portugais doute de l’authenticité des apparitions. « Je peux être un bon catholique et ne pas croire en Fatima, car ce n’est pas un dogme. Il est évident que Notre-Dame n’est pas apparue à Fatima », a décrété le père Anselmo Borges, préférant évoquer une « expérience religieuse intérieure » des petits bergers.

Ce qui ne va pas empêcher Samedi, la canonisation de deux plus jeunes voyants de Fatima par le pape François. Les deux enfants avaient été béatifiés par Jean-Paul II, à Fatima, le 13 mai 2000. Le pape avait autorisé fin mars un décret de la Congrégation pour la cause des saints « concernant le miracle attribué à l’intercession du bienheureux Francisco Marto, né le 11 juin 1908 et mort le 4 avril 1919, et de la bienheureuse Jacinta Marto, née le 11 mars 1910 et morte le 20 février 1920 ».

La canonisation équivaut à une reconnaissance officielle par l’Eglise qu’une personne est sainte et au paradis. Elle doit pour cela être créditée de deux miracles, l’un pour sa béatification, l’autre pour sa canonisation, signes tangibles de sa proximité avec Dieu.

Ce dernier avait reconnu en 1999 comme premier miracle attribué aux bergers la guérison de Maria Emilia Santos, paralysée pendant 22 ans, qui aurait pu se lever de sa chaise roulante en 1989. Pour être canonisés, ils devaient être crédités d’un second miracle par le pape. C’est chose faite depuis le 23 mars. Selon Radio Vatican, il s’agit de la guérison « inexplicable » en 2013 d’un enfant brésilien âgé de six ans qui a survécu sans séquelles à une chute de sept mètres, malgré un grave traumatisme crânien.

Le cas de cas de soeur Lucie est lui à l’étude au Vatican depuis 2008.

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