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L’Afrique de l’Est menacée par la plus grande famine depuis 20 ans

Le Vif

Une énième sécheresse ravage l’Est de l’Afrique. La Somalie est au bord d’une troisième famine en 25 ans. Le Yémen et le Nigeria sont dans le même cas tandis que la famine a été officiellement déclarée le 20 février au Soudan du Sud, où elle touche 100.000 personnes. Plus de 20 millions de personnes risquent de mourir de faim dans ces quatre pays.

L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) estime que plus de 6,2 millions de Somaliens – soit la moitié de la population – ont besoin d’une aide humanitaire d’urgence, dont près de trois millions qui souffrent de la faim.

Les nouvelles autorités de ce pays rongé par deux décennies de guerre et de crises humanitaires à répétition ont décrété fin février l’état de « catastrophe nationale », et les images de corps émaciés émergent dans les médias, faisant ressurgir le spectre de la famine de 2011 (260.000 morts).

Selon l’agence onusienne, plus de 363.000 enfants sont gravement mal nourris, parmi lesquels 70.000 ont besoin en urgence d’une aide vitale.

La sécheresse a conduit à une propagation des diarrhées aiguës, du choléra et de la rougeole, et près de 5,5 millions de personnes risquent de contracter des maladies transmises par l’eau.

Un enfant souffrant de malnutrition est soigné à l'hôpital de Mogasdiscio en Somalie.
Un enfant souffrant de malnutrition est soigné à l’hôpital de Mogasdiscio en Somalie. © REUTERS

110 décès en 48 heures

Quelque 110 personnes sont mortes rien que la semaine dernière dans le sud de la Somalie des conséquences de la sécheresse, a annoncé le Premier ministre somalien Hassan Ali Khaire.

« Environ 110 personnes sont mortes ces 48 dernières heures à cause de la sécheresse et de diarrhées sévères dues à l’eau dans les régions du sud de la Somalie, en particulier dans les régions de Bay et Bakool », a indiqué M. Khaire dans un communiqué daté de samedi.

« Les Somaliens, où qu’ils soient, doivent sauver leurs frères dans le besoin, qui mourront de faim si on ne les aide pas. La tâche prioritaire du gouvernement sera de venir en aide aux gens qui ont été touchés par la sécheresse, a-t-il ajouté.

Les autorités locales du village d’Awdiinle, dans la région de Bay, ont annoncé qu’au moins 69 personnes, la plupart des enfants et des personnes âgées, étaient décédées de diarrhées causées par l’eau.

« Il n’y a pas de médicaments et la maladie est maintenant devenue une épidémie », a déclaré à l’AFP par téléphone un responsable local de ce village, situé à 30 km de la capitale régionale Baidoa.

« C’est à cause de la sécheresse qui a provoqué une pénurie généralisée d’eau. Nous avons besoin de l’aide des agences humanitaires », a-t-il ajouté.

Lire aussi: 20 millions de personnes pourraient mourir de faim d’ici 6 mois

Un enfant malnourri est traité dans un camp de déplacés à l'hopital Banadir hospital de Mogadiscio en Somalie.
Un enfant malnourri est traité dans un camp de déplacés à l’hopital Banadir hospital de Mogadiscio en Somalie. © REUTERS

Obligation morale

Le secrétaire général de l’ONU a appelé ce mardi la communauté internationale à se mobiliser massivement pour « éviter le pire » en Somalie.

« Il est possible d’éviter le pire », a-t-il déclaré après s’être entretenu à Mogadiscio avec le nouveau président somalien Mohamed Abdullahi Mohamed, élu le 8 février et plus connu sous son surnom de Farmajo. « Nous avons besoin d’un soutien massif de la part de la communauté internationale pour éviter une répétition des événements tragiques de 2011 ». Il s’agit seulement de la troisième visite en Somalie d’un secrétaire général de l’ONU depuis 1993.

Après sa rencontre avec le nouveau président somalien Mohamed Abdullahi, élu le 8 février, M. Guterres a visité un camp de déplacés à Baidoa, capitale de la province de Bay (sud). Cette ville, qui selon l’ONU abrite 42.000 déplacés, est dans la zone la plus affectée par la sécheresse. Les militants islamistes shebab, affiliés à Al-Qaïda et qui contrôlent la majeure partie du sud somalien, refusent de laisser les humanitaires venir au secours des populations.

« Nous avons l’obligation morale de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour aider ces gens », a déclaré M. Guterres dans le camp, avant d’affirmer: « C’est la situation dramatique dans laquelle se trouvent des pays tels que la Somalie qui produit le terrorisme ».

Le camp est surtout peuplé d’éleveurs, qui ont perdu leur bétail et n’ont eu aucune récolte lors des trois dernières saisons de moisson. Les femmes et enfants représentent 80% des nouveaux arrivants, selon l’ONU.

« Nous n’avons plus de vivres, et notre bétail est mort », a déclaré à l’AFP Mainouna, venue avec trois de ses six enfants depuis la région de Middle Juba, au sud de Baidoa. « Là-bas, nous ne pouvions pas obtenir d’aide ».

La dernière famine en date en Somalie, en 2011, résultat d’une grave sécheresse dans la Corne de l’Afrique aggravée par le conflit avec l’insurrection islamiste shebab, y avait tué 260.000 personnes.

Une mère nourrit son enfant avec une pâte de noisette après avoir été diagnostiqué de sévère malnutrition dans un hopital de l'UNICEF dans la capitale du Sud Soudan, Juba.
Une mère nourrit son enfant avec une pâte de noisette après avoir été diagnostiqué de sévère malnutrition dans un hopital de l’UNICEF dans la capitale du Sud Soudan, Juba. © REUTERS

Au Sud Soudan

Au Soudan du Sud, la famine a été officiellement déclarée le 20 février dernier et touche déjà 100.000 personnes selon l’ONU. Une situation de sécheresse combinée à une guerre civile qui fait rage depuis l’indépendance du pays en 2011. Ces affrontements très violents opposent les groupes ethniques liés au président Salva Kiir, auxs partisans de son rival, l’ancien vice-président Riek Machar.

Depuis décembre 2013, plusieurs dizaines de milliers de Sud-Soudanais ont été tués et 2,5 millions ont fui leurs foyers et près de 5 millions de Sud-Soudanais, soit plus d’un tiers de la population, font face à une insécurité alimentaire « sans précédent », selon l’ONU.

Aujourd’hui, la menace vient du fait que les prix des produits alimentaires ont doublé, voire quadruplé en un an.

Distribution de nourriture par l'ONU au Sud Soudan.
Distribution de nourriture par l’ONU au Sud Soudan.© REUTERS

Au Yémen

Le pays est déchiré par un conflit depuis qu’une coalition internationale menée par l’Arabie saoudite a commencé, en mars 2015, une campagne de bombardements pour repousser les rebelles houthis, soutenus par l’Iran, qui ont pris le contrôle de la capitale Sanaa et d’autres parties du pays.

La fermeture de l’aéroport de Sanaa a pesé lourd sur le sort des civils, car les médicaments ne peuvent plus être acheminés par avions et les Yéménites ne peuvent pas aller se faire soigner à l’étranger.

Les stocks de blé du Yémen pourraient être épuisés dans les mois à venir, car les banques étrangères n’acceptent plus de transactions financières avec les banques commerciales du pays.

Environ 14 millions de personnes, soit 80 % de la population du pays, ont besoin d’aide alimentaire. Deux millions ont même besoin d’une aide d’urgence pour survivre.

L’ONU a appelé à un cessez-le-feu au Yémen pour permettre la livraison d’aide humanitaire d’urgence et la reprise de discussions politiques pour mettre fin à une guerre qui a déjà causé la mort de près de 10.000 civils, selon les responsables des Nations unies.

Dans le nord-est du Nigéria

Au Nigeria, des millions de personnes ont dû fuir les violences du groupe islamique Boko Haram et ont trouvé refuge dans des camps dans l’État de Borno. Mais l’absence de commerces, de marchés et de possibilités de se déplacer rend les réfugiés dépendants de l’aide humanitaire.

Une femme attend une distribution de nourriture dans le Sud Soudan.
Une femme attend une distribution de nourriture dans le Sud Soudan. © REUTERS

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