« Est-ce hypocrite de passer ses vacances dans un pays dont le président est fou? »

Pouvons-nous encore nous rendre tranquillement à New York, Los Angeles ou Washington alors que les États-Unis sont gouvernés par un homme versatile et borné ? Depuis plusieurs jours, la question suscite le débat en Belgique.

Certains jurent que pour l’instant ils n’iront plus aux États-Unis. Pour protester ! D’autres ont même annulé leur voyage parce qu’ils refusent de « collaborer avec l’ennemi ». Ils ne veulent pas se rendre dans un pays où l’on érige des murs pour en empêcher l’entrée à tout homme ou femme qui n’a pas la bonne nationalité ou religion. Mais tout le monde ne partage pas cet avis. « Si vous boycottez les États-Unis, vous donnez à ce fou ce qu’il veut « , disent certains. « Il faut justement y aller en masse pour montrer qu’aucun mur n’est assez solide pour isoler le pays de la liberté ». Du coup, quelqu’un a réagi en affirmant que dans ce cas on peut tout aussi bien passer ses vacances à Moscou. Et le débat a continué les réseaux sociaux…

Ce n’est évidemment pas la première fois que se pose un tel dilemme touristique. Les voyageurs politiquement corrects hésitent à boycotter les pays contestés ou tourmentés. Est-ce prendre position dans le conflit israélo-palestinien que de se rendre à Jérusalem ou même à Tel-Aviv ? Est-ce approuver l’occupation chinoise du Tibet que de visiter Pékin ? Parfois, il ne s’agit même pas de conflits militaires ou politiques. L’été 2015, peu après l’attentat à Sousse, beaucoup de gens ont hésité à annuler leur voyage en Tunisie. N’est-il pas indécent de se prélasser au bord de la piscine ? Ou faut-il justement y aller pour soutenir le pays touché (et son économie) ? La même discussion a fait surface les mois après les attentats de Paris. Était-ce prendre position que de se rendre dans la Ville-Lumière ou cela revenait-il à bassement profiter des tarifs en baisse ?

On reste chez soi alors?

Ces derniers étés, le flux de réfugiés continu a suscité des considérations comparables. Quand des migrants débarquaient sur les îles grecques presque quotidiennement, beaucoup de Belges ne voulaient plus s’y détendre. Certains parce qu’ils ne voulaient pas être confrontés à cette misère, d’autres parce qu’ils ne pouvaient pas faire rimer un tel séjour avec leur conscience. Pourtant, beaucoup de touristes sont partis en Grèce sans états d’âme. Par solidarité avec les Grecs, pour s’y retrousser les manches ou – aussi – parce que les prix y sont très bon marché.

Souvent, il est donc tout sauf clair de savoir si c’est une bonne idée ou non de rallier une destination qui fait en permanence la une de l’actualité. Restez à la maison, alors, me direz-vous, c’est sûr et bien meilleur pour l’environnement. C’est vrai, évidemment. Or, à une époque où les vérités sont de plus en plus relatives, j’ai plutôt tendance à aller voir ce qu’il en est. Donc, je vais bientôt à New York, même si ces derniers jours cette perspective ne me rend plus aussi joyeuse qu’au moment où j’ai réservé les billets.

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