Covid: la Chine a-t-elle aussi bien géré l’épidémie qu’elle le prétend ?

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

Selon des documents dévoilés par CNN, la réponse de la Chine au coronavirus n’aurait pas été aussi efficace qu’elle veut le faire croire. En cause : des données sous-communiquées et un diagnostic tardif.

La Chine a communiqué au monde des données « plus optimistes » que la réalité au début de l’épidémie. Les autorités chinoises ont signalé un nombre d’infections inférieur à celui qui avait été effectivement détecté. On le soupçonnait depuis un certain temps, mais la chaîne d’information américaine CNN l’affirme désormais clairement sur base de documents exclusifs nommés « The Wuhan Files ».

Une « bonne gestion » remise en question

Des documents provenant de Chine ont fuité : ils montrent que le pays a mal géré le début de la pandémie de Covid-19 en utilisant des données publiques trompeuses et en retardant de trois semaines les résultats des tests, rapporte la chaine américaine.

Un lanceur d’alerte, qui travaillait dans le système de santé chinois, a fourni à CNN 117 pages de documents internes du Centre de contrôle et de prévention des maladies (CDC) de la province de Hubei. Les dossiers, que la chaine américaine a fait vérifier par six experts, montrent comment la région a lutté pour gérer le coronavirus entre octobre 2019 et avril 2020, une période critique durant laquelle le virus s’est propagé depuis la Chine pour provoquer la pandémie mondiale que nous connaissons aujourd’hui.

Des chiffres sous-communiqués

La Chine a nié à plusieurs reprises les allégations des États-Unis et d’autres gouvernements selon lesquelles elle aurait délibérément dissimulé des informations sur le coronavirus. Selon CNN, les documents ne montrent pas une rétention intentionnelle d’informations, mais ils indiquent qu’il y a eu des écarts entre ce que les officiels estimaient et ce qu’ils ont rapporté au public.

Testing de masse dans la ville de Qingdao.
Testing de masse dans la ville de Qingdao.© AFP

Le 10 février, les autorités chinoises ont rendu publics 2.478 nouveaux cas confirmés, ce qui portait le nombre total de cas dans le monde à plus de 40.000. Mais dans un dossier intitulé « document interne confidentiel », le CDC de la province du Hubei a enregistré 5.918 nouveaux cas à cette date, avec 2.345 « cas confirmés », 1.772 « cas diagnostiqués cliniquement » et 1.796 « cas suspects ».

Un pic de grippe simultané

Un rapport datant de début mars indiquait que le délai moyen entre le début des symptômes et la confirmation du diagnostic s’élevait à environ 23 jours. Selon des experts interrogés par CNN, ce délai aurait entravé la capacité des autorités à réagir à la propagation du virus.

Les documents révèlent également que le Hubei subissait une épidémie de grippe à la fin de 2019, ce qui a conduit à un nombre de cas 20 fois plus élevé que l’année précédente. Si cette épidémie a bien touché Wuhan, qui serait à l’origine du Covid-19, elle a touché beaucoup plus les villes de Yichang et Xianning. CNN note cependant que les documents ne suggèrent pas que l’épidémie de grippe et la flambée de coronavirus soient liées, mais la gravité du pic de grippe n’avait pas été signalée auparavant. Les experts estiment que la double épidémie aurait rendu difficile pour les experts de la santé de prêter attention à l’apparition d’un nouveau virus.

La Chine se défend

Il ressort également que les premières actions pour endiguer la propagation du coronavirus ont été entravées par un manque de fonds et de personnel et une bureaucratie complexe, ce qui a compliqué le système d’alerte précoce de la Chine, selon des audits internes auxquels CNN a eu accès.

La Chine défend depuis le début sa réponse au coronavirus. Son Conseil d’État a déclaré en juin dernier que le gouvernement avait toujours publié les informations relatives au Covid-19 « en temps utile, de manière ouverte et transparente ».

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