Conflans Saint-Honorine © Getty

« Monsieur Paty », le professeur français décapité, un homme « à fond dans son métier »

Le Vif

Parce qu’il avait montré des caricatures de Mahomet à ses élèves, Samuel Paty a essuyé la colère de certains de leurs parents. Enseignant d’un collège en région parisienne, « à fond dans son métier », comme le décrivent ceux qui l’ont côtoyé, il a été décapité vendredi dans un attentat.

« Quand j’ai vu ‘prof – Bois d’Aulne – décapitation’, j’ai fait le lien direct: ‘c’est Monsieur Paty' », assure Martial, 16 ans, accouru vendredi soir devant le collège du Bois d’Aulne avec des amis dès qu’il a appris la nouvelle, en sortant de son entraînement de foot.

Ce lycéen se souvient très bien de son professeur d’histoire-géographie de 4e dans cet établissement scolaire réputé calme, posé au coeur d’un quartier pavillonnaire qui l’est tout autant dans cette ville de 35.000 habitants du nord-ouest parisien.

« En début d’année il s’est présenté. Il a dit qu’il était à Créteil » dans un autre collège « et qu’il est venu parce que sa femme s’est fait muter pour son travail », se remémore le jeune homme.

Samuel Paty, cheveux bruns coupés courts, était « petit », portait des lunettes, « avait toujours une chemise », se rappelle Nathan, 16 ans, un autre ancien du Bois d’Aulne.

« On faisait des débats »

Le père de famille, quadragénaire, était connu pour son investissement auprès de ses élèves. « Il était à fond dans son métier », qu’il « aimait beaucoup », confie Martial. « Il voulait vraiment nous apprendre des choses. De temps en temps, on faisait des débats, on parlait ».

Samuel Paty a été décapité dans une rue proche du collège, vers 17H00. Les vacances scolaires de la Toussaint à peine sonnées, l’assaillant – un Russe tchétchène de 18 ans – s’est jeté sur lui, avant d’être, un peu plus tard, abattu par les policiers.

Emmanuel Macron, qui s’est rendu sur les lieux vendredi soir, a dénoncé un « attentat islamiste caractérisé » et appelé « la nation toute entière » à s’unir derrière les enseignants pour « les protéger et les défendre ». Un hommage national lui sera rendu.

https://twitter.com/EmmanuelMacron/status/1317217769209909249Emmanuel Macronhttps://twitter.com/EmmanuelMacron

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Selon les premiers éléments de l’enquête, l’enseignant avait montré à ses élèves de 4e, la semaine dernière, une caricature de Mahomet.

Un signalement était parvenu à Rodrigo Arenas, coprésident de la FCPE, la première association de parents d’élèves, à cause des tensions suscitées par son initiative auprès de certains parents d’élèves.

Selon une source proche du dossier, un parent d’élève indigné avait porté plainte contre Samuel Paty, qui avait en retour déposé une plainte en diffamation contre lui.

La victime aurait, selon M. Arenas, « invité les élèves musulmans à sortir de la classe » avant de montrer un dessin du prophète accroupi avec une étoile dessiné sur ses fesses et l’inscription « une étoile est née ».

« C’était toutes les années qu’il faisait cela », souligne Virginie, 15 ans, qui a connu l’enseignant. « C’était au programme pour l’EMC (enseignement moral et civique, ndlr), c’était pour parler de la liberté par rapport à l’attentat de Charlie Hebdo, il montrait ces images, les caricatures », indique la jeune fille.

Un sujet « sensible », se souvient de son côté Martial, qui a assisté au même cours il y a trois ans.

Mais cette année, le père d’élève a lancé un message sur les réseaux sociaux. Dans une vidéo, il qualifie l’enseignant de « voyou » qui « ne doit plus rester dans l’Education nationale » et invite d’autres parents d’élèves à se mobiliser.

Depuis cette « histoire », M. Paty « n’était pas dans son assiette », avait observé Myriam, une collégienne de 13 ans, en mimant son attitude renfrognée quand il déambulait dans les couloirs.

« J’entendais des élèves parler ‘ah il est raciste' », dit-elle. D’autres qualificatifs circulaient sur son compte comme « islamophobe », glisse-t-elle à demi-mot.

« Il n’a pas fait ça pour créer des polémiques ou pour manquer de respect aux petits ou pour faire de la discrimination », affirme Nordine Chaouadi. Son fils de 13 ans entamait sa deuxième année de cours avec M. Paty. « Il me dit, « il était super gentil ce monsieur' », dit le père.

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