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Le refus de Zuhal Demir de construire une centrale à gaz à Vilvorde suscite un tollé

Celine Bouckaert
Celine Bouckaert Journaliste au Vif

La ministre flamande de l’Environnement Zuhal Demir (N-VA) refuse d’accorder un permis pour la construction d’une centrale électrique au gaz à Vilvorde. Une centrale à l’importance centrale dans le plan de sortie du nucléaire. Les socialistes et les écologistes flamands dénoncent un  » jeu politique  » de la part de la N-VA.

La première enchère du Mécanisme de rémunération de capacité (CRM), qui doit garantir la sécurité d’approvisionnement dans le cadre de la sortie du nucléaire, avait retenu ce projet à Vilvorde, d’une capacité de production de 796,25 MW. Les centrales à gaz doivent en effet servir à combler les éventuelles pénuries d’énergie engendrées par la fermeture des centrales nucléaires en 2025.

Planifiée par Engie-Electrabel, la centrale électrique à vapeur et à gaz de Vilvorde devait remplacer une installation plus ancienne qui fournit moins de la moitié de la nouvelle capacité. Il ne s’agit pas du premier refus de la ministre de l’Environnement flamande qui a déjà rejeté les permis de constructions de centrale à Tessenderlo et à Dilsem-Stokkem. En revanche, elle a autorisé la centrale au gaz à Wondelgem à s’agrandir sous certaines conditions.

Un refus guère surprenant

Le refus de la ministre flamande de l’Environnement n’est pas totalement surprenant. En juillet dernier, la députation de la province du Brabant flamand avait déjà rejeté la demande de permis. Le député provincial Gunther Coppens, également membre de la N-VA, expliquait que la centrale émettrait trop d’azote, de CO2 et d’ammoniac.

Selon la députation, le projet serait également en contradiction avec le plan de politique de qualité de l’air de la ville de Vilvorde qui vise à atteindre la neutralité climatique d’ici 2025 et à réduire radicalement les émissions de CO2.

Trop d’ammoniac

« Comme pour le dossier de Tessenderlo, la demande introduite pour Vilvorde ne respecte pas les instructions de la ministre Demir en matière d’azote. Si je devais approuver le dossier, je mettrais en danger la sécurité juridique de nombreuses entreprises et agriculteurs », déclare la ministre dans un communiqué. A cela s’ajoute que la centrale « émettrait 107 000 kilos d’ammoniaque par an », a-t-elle précisé mardi dans l’émission Terzake.

La décision de Demir est une gifle pour le gouvernement fédéral qui comptait sur cette centrale à gaz pour sortir du nucléaire en 2025. Plusieurs membres de partis de la Vivaldi accusent la ministre, et plus largement la N-VA, de jouer à un jeu politique sur le dos de la sortie du nucléaire.

La ministre fédérale de l’Énergie Tinne Van der Straeten (Groen) ne cache pas sa surprise. « La centrale flexible de Vilvorde avait reçu à deux reprises des avis favorables de sa propre administration flamande. Cela crée une incertitude juridique pour tous les projets industriels en Flandre », a-t-elle déclaré.

Meryem Almaci, présidente de Groen, accuse la ministre nationaliste flamande de « sabotage ». « C’est un nouveau, triste point culminant dans la politique de sabotage menée par la N-VA. Mme Demir joue avec la sécurité énergétique de tous les Belges ».

Interrogé par la VRT, Conner Rousseau, le président de Vooruit, évoque également un sabotage. « L’administration a émis des avis positifs : qui veut noyer son chien l’accuse de la rage », déplore-t-il. Le socialiste reproche au CD&V, et à l’Open VLD, qui se trouvent aussi bien au gouvernement fédéral qu’au gouvernement flamand, de contrecarrer le gouvernement fédéral. « Je les appelle à prendre leur responsabilité, car les gens en ont plus qu’assez de ce genre de petits jeux ».

Un mal nécessaire

Hans Bonte, bourgmestre de Vilvorde, et également membre de Vooruit, partage son avis. « Je constate que, contrairement à tous les conseils de l’administration, la mandataire de la N-VA dit toujours non », déclarait-il ce mercredi sur Radio 1.

« Plus personne ne souhaite encore investir dans les centrales fossiles. Seulement, dans ce cas, c’est un mal nécessaire pour passer à une énergie durable », poursuit Bonte, qui soupçonne que le refus de la ministre Demir vise à montrer que le niveau fédéral ne fonctionne pas.

Honte des bagarres

Le président du CD&V, Joachim Coens, souhaite que le comité de concertation (CodeCo) se saisisse du dossier. Il dit s’inquiéter pour la sécurité d’approvisionnement du pays et a demandé à ce que le ministre-président flamand Jan Jambon et le Premier ministre Alexander De Croo abordent le sujet en comité de concertation. « J’ai honte des bagarres autour de ce dossier important », au micro de la VRT.

Ce n’est pas le seul reproché adressé à Zuhal Demir: ce mercredi, une délégation du mouvement Youth for Climate Belgique a mené une action symbolique devant le cabinet. Il reproche à la Flandre de refuser de prendre part à la Coalition des hautes ambitions proposée par la République des Îles Marshall. Sa déclaration, parue début novembre, insiste entre autres sur la nécessité de réduire de moitié les émissions mondiales d’ici 2030 et de se conformer à une trajectoire de 1,5 degré dès que possible.

Alternatives

D’après le gestionnaire du réseau haute-tension Elia, Engie est tenu de proposer une alternative. Pour la ministre fédérale de l’Énergie, des solutions existent au sein du Mécanisme de rémunération de capacité (CRM) en cas de problème avec les permis. « Le règlement du CRM prévoit également des solutions en cas de problème lié à la délivrance des permis. Nous examinerons cette question plus en détail dans les prochains jours », annonce-t-elle. « Après 20 ans de stagnation et de blocage, nous devons enfin aller de l’avant dans ce pays. Pour ce faire, la coopération est nécessaire ».

Avec Belga

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