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Violences sexuelles à Ixelles : une nouvelle marche prévue ce jeudi

Celine Bouckaert
Celine Bouckaert Journaliste au Vif

Jeudi dernier, près de 1.300 personnes ont pris part au Cimetière d’Ixelles à une marche en soutien aux victimes de violences sexuelles. Ce jeudi les organisateurs prévoient une nouvelle marche.  » On ne lâchera pas la pression sans de réelles avancées, sans qu’on puisse sortir dans la rue en sécurité et sans peur « .

Depuis le 10 octobre, de nombreux témoignages d’agressions sexuelles et de viols commis par des employés de deux bars connus du quartier du cimetière d’Ixelles, le Waff et le El Café, affluent sur les réseaux sociaux, où est né un nouveau hashtag, #balancetonbar. Une enquête a été ouverte au parquet de Bruxelles. D’après certains témoignages, au moins un barman aurait drogué des jeunes femmes en versant une substance dans leur verre avant d’abuser d’elles.

La direction des deux bars en question a indiqué, jeudi, avoir écarté l’employé visé par de nombreuses plaintes « en attendant que toute la lumière soit faite », assurant qu’elle se portera partie civile « si les faits sont avérés ».

Les bars restent ouverts

Malgré cette mise à l’écart de l’employé, certains réclament la fermeture des deux bars. « Des femmes passent tous les jours devant ces cafés pleins à craquer, comme si de rien n’était. Il se peut qu’elles-mêmes, leurs amies, leurs soeurs ou encore leurs collègues y aient été droguées, agressées ou même violées », s’indigne ainsi Manon Vidal, étudiante et co-organisatrice de la marche. Qui réclame que les victimes d’agressions sexuelles soient enfin prises au sérieux. « On ne lâchera pas la pression sans de réelles avancées, sans qu’on puisse sortir dans la rue en sécurité et sans peur. Le vase était plein, aujourd’hui il déborde. »

Elle estime que la commune Ixelles ne soutient pas suffisamment les victimes. « Il faut les moyens pour un service public efficace, des CPVS qui puissent accueillir toutes les victimes. Il faut aussi des moyens pour une justice réactive qui ne soit pas débordée tout de suite. Il faut aussi les moyens pour former les policiers correctement ».

Interrogé par Le Vif, le bourgmestre d’Ixelles Christos Doulkeridis (Ecolo) explique pourquoi il ne peut procéder à la fermeture de ces bars. « Nous n’avons aucune information sur l’enquête. Le parquet refuse de les donner, car il y a une instruction qui a lieu, et pour protéger cette instruction ils ne veulent rien communiquer. Pour fermer un bar il me faut une base juridique dont je ne dispose pas actuellement ».

Un problème qui perdure depuis des années

Il souligne que la question des violences sexuelles dépasse largement le cadre des deux bars incriminés. « Il faut réaliser un travail beaucoup plus structurel. Les violences sexuelles se produisent depuis des années dans le secteur de la nuit, et pas seulement au cimetière d’Ixelles, mais dans tous les endroits de sortie. »

Aussi le bourgmestre tente-t-il de trouver une solution plus globale. « Je me suis engagé à permettre qu’un diagnostic par les femmes elles-mêmes et les victimes puisse avoir lieu avec le soutien d’associations féministes, et nous travaillerons avec le secteur confronté à ce diagnostic pour établir un protocole de mesures valables pour l’ensemble du secteur de la nuit, pour Ixelles, mais aussi au niveau de la Région. »

« J’ai accueilli les marcheuses de la manifestation de la semaine dernière. Je leur ai proposé un rendez-vous dans un mois. Je ne veux pas qu’une fois la pression médiatique soit retombée, on laisse tomber. Je n’ai pas besoin de pression pour travailler sur ce sujet qui me préoccupe depuis beaucoup plus longtemps qu’aujourd’hui », explique Christos Doulkeridis.

Il souligne que la commune d’Ixelles a déjà fourni beaucoup d’efforts au niveau de l’accueil des victimes. « Nous les renvoyons systématiquement au Centres de prévention de violences sexuelles, un endroit où il y a une vraie professionnalisation de l’accueil, mais nous avons encore des marges de progression très importantes », reconnaît-il.

« Chaque plainte est prise au sérieux »

Le parquet de Bruxelles rappelle par ailleurs qu’il prend chaque plainte pour fait de moeurs au sérieux. « Suite aux messages qui sont apparus sur les réseaux sociaux ces dernières semaines, le parquet de Bruxelles tient à souligner que chaque plainte concernant des infractions sexuelles est prise très au sérieux », a-t-il fait savoir.

« Le parquet mène une enquête approfondie et minutieuse » dans tout dossier de violence sexuelle, a assuré celui-ci. « Outre la collecte de preuves matérielles, à savoir des traces biologiques et des images de caméras de surveillance, un maximum de témoins sont identifiés et interrogés afin de constituer un dossier probant et de confronter tout suspect à ces éléments de preuve », a-t-il affirmé.

« Pour le bon déroulement d’une telle enquête, il est important que tout cela se passe dans un contexte serein. Par ailleurs, le parquet tient à rappeler que toute personne bénéficie de la présomption d’innocence », a-t-il déclaré. « Concernant les faits à Ixelles, le parquet ne communiquera pas davantage, compte tenu du principe du secret de l’information », a-t-il ajouté. (Avec Belga)

Le projet-pilote « code 37 » d’analyse ADN sera déployé au niveau national

Le projet intitulé « Code 37 », une approche impliquant le recours à des conseillers médico-légaux et à une analyse approfondie des traces ADN lors d’enquêtes sur des agressions sexuelles sera déployé au niveau national, a annoncé le ministre de la Justice Vincent Van Quickenborne jeudi à la Chambre.

Ce projet-pilote a été développé à Anvers. Selon le ministre, il y a démontré son efficacité : « le projet a conduit à un doublement du nombre des condamnations. » Vincent Van Quickenborne a annoncé qu’un budget de 600.000 euros était mobilisé pour élargir ce dispositif au niveau national, en commençant par Bruxelles. L’engagement de 5 personnes y est déjà budgétisé. L’élargissement de ce projet a été décidé mercredi lors d’une réunion avec la ministre de l’Intérieur Annelies Verlinden et la secrétaire d’État à l’Égalité des chances Sarah Schlitz.

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