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Publifin: le document qui trahit Stéphane Moreau et André Gilles

David Leloup
David Leloup Journaliste

La justice a versé au dossier Publifin le PV de la réunion inaugurale, le 7 mai 2007, du premier comité de secteur « Socolie ». Considéré comme « faux intellectuel », ce document, dont l’existence a été révélée par Le Vif/L’Express en mars dernier, enfreint l’interdiction ministérielle de rémunérer les membres des comités de secteur.

« Je ne m’oppose pas à la création d’éventuels organes consultatifs (dénommés Comités de secteur). Néanmoins, en application des articles L1532-4 et L1532-5 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, aucun jeton, ni indemnité ne pourra être octroyé aux membres de ces comités.  » La lettre de Philippe Courard du 30 janvier 2007 adressée à André Gilles, président de l’ALE (future Tecteo puis Publifin), est limpide. Le ministre PS de tutelle de l’intercommunale liégeoise, à l’époque, valide l’absorption de la Société coopérative liégeoise d’électricité (Socolie) par l’ALE décidée deux mois plus tôt en assemblée générale. Il donne également son feu vert à la mise en place d’éventuels comités de secteur au sein de l’intercommunale. Il s’agit d’organes consultatifs dont la création est désormais rendue possible à la suite de la modification de l’article 29 des statuts de l’ALE lors de cette même assemblée générale du 30 novembre 2006. Mais le ministre est très clair : il s’oppose à toute forme de rémunération au sein de ces comités d’un genre nouveau. Et pour cause : cela violerait deux articles du Code wallon de la démocratie locale, introduits en 2006, qui n’autorisent de rémunérer que les mandats  » exécutifs « , de gestion. Pas les mandats consultatifs, sans pouvoir décisionnel.

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Qu’à cela ne tienne. Le 7 mai 2007 à 17 heures, le tout premier comité de secteur de l’intercommunale se réunit pour la première fois, au siège de l’ALE, rue Louvrex à Liège. Il rassemble les membres du CA et du bureau exécutif de l’ex-Socolie, recasés dans ce comité consultatif jusqu’à la fin théorique de leur mandat initial, interrompu prématurément par l’absorption de leur intercommunale par l’ALE. André Gilles préside les débats, Stéphane Moreau remplit la fonction de secrétaire. Le procès-verbal de cette réunion est éloquent. André Gilles déclare  » qu’avec l’accord de l’autorité de tutelle « , il a été décidé de créer un comité de secteur et  » de maintenir le montant des indemnités et jetons de présence qui étaient attachés aux mandats exercés en Socolie « . Stéphane Moreau, directeur général de l’ALE, confirme le transfert des instances dirigeantes de la Socolie vers ce comité de secteur  » consultatif « ,  » avec maintien des montants des émoluments respectifs jusqu’au 22 juin 2007, date de l’assemblée générale de l’ALE « . Bref, les deux hommes affirment exactement le contraire de ce que leur ministre de tutelle leur a signifié.

La lettre de Philippe Courard, que nous publions, a été versée au dossier judiciaire ouvert par le parquet général de Liège sur les rémunérations mirobolantes accordées aux membres des comités de secteur de Publifin. Le PV de la réunion inaugurale du comité de secteur Socolie également. Le courrier du ministre, éventé par Le Soir en avril dernier, incite les enquêteurs à considérer le PV, publié, en mars, par Le Vif/L’Express sur son site Internet, comme un  » faux intellectuel « .  » Le faux intellectuel se caractérise par le fait que, dans un écrit inchangé, l’auteur relate des actes ou des faits contraires à la réalité « , précise le site d’informations juridiques Actualités du droit belge. Et qui signe ce PV ? Stéphane Moreau et André Gilles. Frappée d’illégalité depuis 2006 et d’une interdiction ministérielle en 2007, leur conception lucrative des comités de secteur se perpétuera pourtant près de dix ans. Jusqu’à ce que les investigations de Cédric Halin (CDH) viennent siffler la fin de la récréation, en décembre dernier. Une récré qui aura coûté plus de 2,5 millions d’euros à l’intercommunale Publifin.

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