Procès Mawda. © belga

Procès Mawda: un an de prison avec sursis requis contre le policier

L’avocat général a requis mardi, devant le tribunal correctionnel de Mons, une peine d’un an de prison avec sursis contre le policier auteur du coup de feu qui a causé la mort de la jeune Mawda en 2018.

L’avocate général a requis mardi, devant le tribunal correctionnel de Mons, une peine d’un an de prison avec sursis contre le policier auteur du coup de feu qui a causé la mort de la jeune Mawda en 2018. Selon l’accusation, l’homme poursuivi pour homicide involontaire avait reçu toutes les informations indiquant que des migrants, dont des enfants, se trouvaient dans la camionnette qui circulait sur l’E42. Lundi, le policier a déclaré qu’il n’avait pas reçu les bonnes informations car il n’avait pas sa radio. Il pensait poursuivre des individus qui venaient de commettre un vol cargo sur un parking dans la région de Namur.

« Si j’avais su qu’il y avait un enfant, je n’aurais jamais brandi mon arme »

Dans son réquisitoire, l’accusation a pointé du doigt l’imprudence du policier, qui ne pouvait ignorer le grand danger encouru par les occupants de la camionnette.

« Tout homme raisonnable n’aurait pas tiré dans des circonstances similaires« , a estimé la représentante du parquet, citée par la chaîne de radio-télévision RTBF.

Pour l’avocat général, le dossier démontre que l’échange d’informations entre services de police n’a pas été optimal cette nuit-là. « Il aurait fallu communiquer sur une même fréquence, ce qui fut impossible pour diverses raisons techniques. » Les informations sont passées par un intermédiaire entre les équipes de Namur et de Mons, entraînant un risque de perte d’informations et de désinformation, comme l’a relevé le Comité P (comité permanent de contrôle des services de police) dans son rapport.

L’avocat général Ingrid Godart a néanmoins souligné que l’équipe de police de Namur a indiqué à celle de Mons que des migrants se trouvaient dans le véhicule et que « des enfants avaient été exhibés en dehors de la camionnette ». Selon l’accusation, le policier poursuivi devait donc savoir qu’au moins un enfant s’y trouvait. « A aucun moment son collègue lui a demandé de faire usage de son arme mais seulement de la montrer pour inciter le chauffeur de la camionnette à ralentir », a-t-elle ajouté.

A ses yeux, un tir sur un véhicule en mouvement, la nuit, était fortement déconseillé. « Aucun autre policier, placé dans des conditions identiques, n’aurait adopté une telle attitude et, d’ailleurs, aucun autre policier n’a fait usage de son arme cette nuit-là. »

De plus, le policier n’était pas un tireur aguerri et ne s’était plus entraîné au tir depuis deux mois. « Il n’a pas parlé de ce tir immédiatement et c’est son collègue qui en a parlé au policier namurois. Il s’agissait pourtant d’un élément capital pour la suite de l’enquête. Rien ne justifiait le retard de cette information », a poursuivi l’avocat général.

« Un manque de dignité »

La magistrate a ajouté refuser de privilégier une version et préférer se référer aux éléments objectifs du dossier répressif. « Un tir par crispation ou par réflexe semble compatible avec les éléments qui ont été analysés ».

Concernant la qualification des faits, Ingrid Godart estime qu’il s’agit d’un homicide involontaire par défaut de prévoyance ou de précaution. « Aucun élément dans ce dossier ne constitue un élément de preuve selon lequel le policier aurait voulu attenter à la vie d’autrui. Je ne peux pas démontrer qu’il était animé de l’intention de tuer ou qu’il avait consciemment accepté ce risque ».

Une peine d’un an avec sursis et une amende ont été réclamées contre le policier. L’accusation a par ailleurs relevé le comportement du policier qui a d’abord caché être l’auteur du coup de feu mortel et sa volonté d’être acquitté qui démontre un défaut de remise en question.

« Il tente de faire porter le chapeau à tout le monde, sauf à lui. C’est un manque de dignité que je déplore. En tant que policier, il lui appartient de se montrer digne de la hauteur des responsabilités qui sont les siennes », a conclu l’avocat général.

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Ingrid Godart, avocate générale, a déclaré qu’il « est exclu d’affirmer qu’il y a eu une entente entre la police et les autorités judiciaires pour faire porter le chapeau aux migrants et cacher la vérité ». Elle a néanmoins qualifié de « légèreté inacceptable » l’information erronée sur la cause de la mort transmise par l’officier de police judiciaire supervisant l’opération et non d’une volonté de transformer les faits. L’officier de police judiciaire avait en effet indiqué au médecin légiste après les faits que la cause de la mort était la conséquence d’une chute et non d’un tir. « Si l’officier de police judiciaire a diffusé cette information de manière inacceptable, il est exclu d’affirmer qu’il y a eu une entente entre la police et les autorités judiciaires pour faire porter le chapeau aux migrants et cacher la vérité », a souligné Ingrid Godar. Le juge d’instruction a appris que l’enfant avait été tué par balle plus tard dans la journée.

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