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« Priorité aux élèves flamands menacés d’être évincés par une vague venue de Wallonie » (chronique)

Pierre Havaux
Pierre Havaux Journaliste au Vif

Même pas le temps de reprendre haleine, tant l’école flamande souffre d’autres bobos. Et notamment d’une présence envahissante de petits Wallons dans certains établissements scolaires déjà saturés.

Il est sur tous les fronts, de tous les combats. Sans jamais baisser la garde ni perdre de vue la Flandre en périphérie de Bruxelles dont il est chargé de préserver et, mieux encore, de renforcer l’authenticité. Ben Weyts (N-VA) a été et reste un ministre régional de l’Enseignement hyperabsorbé par le quotidien des classes, chamboulé en temps de crise sanitaire. Même pas le temps de reprendre haleine, tant l’école flamande souffre d’autres bobos. Et notamment d’une présence envahissante de petits Wallons dans certains établissements scolaires déjà saturés. Rien de gravissime, le foyer reste localisé dans le voisinage immédiat de la capitale. Mais tout de même, un remède s’impose et sa mise au point est d’ailleurs prévue dans l’accord de gouvernement flamand : d’ici au 1er septembre 2021, priorité sera accordée dans le Vlaamse Rand aux élèves flamands menacés d’être évincés de l’école de leur choix par une vague venue de Wallonie.

Il faudrait être mauvais patriote pour contrarier cette énième application de la stratégie du containment chère aux Etats-Unis lorsqu’il fallait endiguer l’expansion du communisme soviétique aux plus belles heures de la guerre froide. Malheur à celui qui, comme Stijn Bex, député régional de l’opposition Groen, s’avise de minimiser le problème, de le juger purement symbolique, de taxer les moyens consacrés à le juguler d’inutilement coûteux et de juridiquement contestables.

C’est que la marée montante venue du sud ne serait en rien le fruit d’un fantasme de ministre nationaliste flamand. 543 élèves wallons étaient inscrits dans l’enseignement en périphérie flamande durant l’année scolaire 2001-2002, ils étaient 1 038 durant l’année 2017-2018 : Ben Weyts ne voit pas double, la présence wallonne dans certaines classes flamandes a bel et bien doublé. A Rhode-Saint-Genèse, Alsemberg, Hoeilaart, Overijse, elle peut culminer jusqu’à 30 à 43 %. Comment ne pas avoir une pensée ou un regard pour ceux, consternés, qui ne trouvent plus le moyen d’inscrire leurs enfants dans une école de leur propre commune ? Qu’il s’agisse souvent de parents néerlandophones partis s’installer de l’autre côté de la frontière linguistique ne peut en rien justifier l’injustice.  » Excuseer « , a martelé le ministre Weyts en commission parlementaire la semaine dernière,  » mais lorsqu’on part habiter en Région wallonne, on s’y intègre, on s’y adapte, et on envoie ses enfants dans l’enseignement francophone.  » C’est d’ailleurs ce que la Flandre attend de celles et ceux qui font le choix de venir s’y installer et  » qu’ils viennent du Pérou, de Wallonie ou d’Amérique du Sud, nous leur demandons de s’adapter et d’envoyer leurs enfants dans l’enseignement néerlandophone.  »

C’est là une bien triste vision du vivre-ensemble, fort dommageable à l’enrichissement en milieu scolaire, persiste à déplorer l’élu Stijn Bex. Sur les bancs N-VA, on préfère presser les écologistes flamands d’oeuvrer à la solution plutôt que de voiler le problème :  » Si ces gens qui viennent de Wallonie pour inscrire leurs enfants dans l’enseignement néerlandophone trouvent l’apprentissage du néerlandais tellement crucial, nous supposons que le parti que vous formez avec Ecolo travaille en ce moment à rendre le néerlandais obligatoire en Région wallonne.  » C’est, à ce stade, encore un peu vite supposé.

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