© getty

Pourra-t-on bientôt toucher une allocation de chômage après une démission ?

Caroline Lallemand
Caroline Lallemand Journaliste

L’idée a été émise par différents partis politiques, dont Ecolo et le cdH : pourra-t-on bientôt quitter son poste tout en bénéficiant d’allocations de chômage ? La FEB n’est pas la seule à s’opposer à cette proposition.

Début avril, Maxime Prévot (cdH) a relancé l’idée d’octroyer une allocation de chômage à un travailleur qui renonce volontairement à son emploi. En quelque sorte, un « droit à la démission », qui pourrait être invoqué deux, voire trois fois au cours d’une carrière à condition que le travailleur dispose déjà du droit aux allocations de chômage (en raison d’un nombre de jours de cotisation suffisant), détaille Le Soir. « Et sans accord nécessaire de l’employeur », précise le président du cdH qui se dit ouvert à la discussion concernant les modalités pratiques. Une idée déjà mise sur la table par Gilles Vanden Burre (Ecolo) durant cette législature, ce dernier avait déposé une proposition de loi en ce sens.

Dans la législation en vigueur actuellement, une personne qui rompt lui-même son contrat de travail et devient demandeur d’emploi ne peut prétendre à une allocation de chômage dans l’immédiat. Elle se voit ainsi sanctionnée pour « abandon d’emploi ».

« De plus en plus de personnes sont en arrêt maladie suite à un problème au travail, souvent sous le motif de burn-out« , constate Maxime Prévot, le président du CDH. « Le salarié ne se sent plus valorisé au niveau de ses compétences, perd de l’estime de soi mais ne va pas quitter son emploi car il perdra alors son droit aux allocations de chômage. Ce que nous proposons est un win-win pour l’employeur et le salarié.

« Des réformes plus urgentes »

L’idée n’est pas bien reçue par la FEB notamment, qui est d’avis qu’il y a des réformes plus urgentes. Elle plaide plutôt pour l’activation plus poussée de l’assurance chômage ou pour la dégressivité accrue des allocations, peut-on lire dans Le Soir. « Si c’est le travailleur qui démissionne, il opte volontairement pour le chômage et ne peut prétendre à une intervention solidaire de la sécurité sociale. Une condition de base pour bénéficier de l’assurance chômage obligatoire est le caractère ‘involontaire’ de la situation. La FEB ne souhaite pas modifier cela. La proposition revient à lutter contre les symptômes (du burn-out/bore-out) et comporte un risque important d’abus« , déclare la Fédération des travailleurs qui plaide plutôt pour une amélioration continue du management des compétences et des talents et pour accompagner au mieux le travailleur dans sa carrière, notamment en prévention du burn-out.

Blocage aussi du côté de la CSC qui juge qu’il y a d’autres manières de lutter contre le burn-out. « Aujourd’hui, l’assurance chômage est prévue pour couvrir le risque lié à la perte d’emploi et non des choix individuels« , estime Marie-Hélène Ska, secrétaire nationale de la CSC citée par le quotidien francophone. «  Ce serait rompre avec la logique assurantielle de l’allocation de chômage « , estime-t-on du côté de la FGTB. La problématique du financement de la Sécurité sociale, mise sous pression si une telle mesure est implémentée, surgit également.

L’UCM y est favorable, pour davantage de fluidité du marché du travail. La mesure vise à répondre aux situations de blocage où un travailleur veut être licencié car il souhaite conserver son droit aux allocations de chômage mais où son employeur refuse. La proposition comporte toutefois un risque important d’abus sont d’avis les employeurs. « Laisser la porte ouverte en permanence sans restriction vers les allocations de chômage garanties serait insécurisant pour les employeurs « , convient l’UCM dans Le Soir qui plaide pour permettre trois abandons d’emploi sur une carrière, avec un intervalle de cinq ans entre deux « jokers ».

De plus en plus d’abandons d’emplois

L’abandon d’emploi a connu un pic en 2018, un phénomène beaucoup plus fréquent au nord du pays. L’an dernier, 12.828 personnes se sont inscrites auprès de l’Onem comme demandeurs d’emploi après avoir cassé leur contrat de travail, note Le Soir. Il s’agit d’une hausse de 1.893 unités par rapport à 2017.

Ces chiffres sont incomplets: ils ne reprennent pas les situations où le salarié a claqué la porte de l’entreprise pour aussitôt franchir le seuil d’une autre. Ou celui d’une personne renonçant temporairement à travailler.

Ce phénomène d’abandon d’emploi est plus fréquent au nord du pays, un marché plus dynamique. En 2018, 7.546 salariés ont ainsi quitté volontairement leur employeur en Flandre. Dans le même temps, ils étaient 3.503 en Wallonie et 1.657 à Bruxelles. Une différence qui peut s’expliquer par l’état du marché du travail flamand, proche du plein-emploi. La création de postes y est importante et les salariés qui disposent déjà d’un contrat et d’une expérience peuvent valoriser leurs compétences en changeant d’employeur ou en créant leur propre activité, quitte à passer par une brève période de chômage, explique le quotidien francophone.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire