Bart Somers, Gwendolyn Rutten, et Alexander De Croo © Belga

« Pour l’Open VLD, le pouvoir prime sur le programme »

La réduction des impôts est, et reste, l’élément de programme le plus important de l’Open VLD. Le parti n’a pourtant obtenu aucun résultat.

L’informateur Paul Magnette (PS) a deux mois pour former un gouvernement fédéral. Le vendredi 29 novembre, on saura qui sera le président du MR : Georges-Louis Bouchez ou Denis Ducarme. Et une semaine plus tard, nous saurons si Joachim Coens ou Sammy Mahdi dirigera le CD&V. Ensuite, les négociations gouvernementales avec ces deux partis pourront vraiment commencer. Mais elles devraient être achevées début février 2020, car c’est alors qu’à l’Open VLD éclatera la bataille pour la présidence – l’élection aura lieu en mars. Et ce sera une lutte, parce que beaucoup de libéraux se sentent appelés, de Francesco Vanderjeugd à Bart Tommelein. S’il n’y a pas de gouvernement fédéral début février, il faudra attendre le printemps, au plus tôt.

Rédiger un accord de coalition en huit semaines : c’est possible. Mais ça devient serré. L’Open VLD a créé une ouverture importante pour Magnette. Bart Somers, vice-ministre-président flamand, a déclaré sur VTM qu’il est convaincu que la N-VA ne veut pas gouverner au niveau fédéral. Il ouvre ainsi la porte à un gouvernement de libéraux, de socialistes et de verts. Lorsque le bourgmestre Open VLD de Gand, Mathias De Clercq, a été le premier à se prononcer en faveur de l’arc-en-ciel au début de ce mois, il n’a pas été applaudi par la direction de son parti. Les déclarations du libéral numéro un du gouvernement flamand peuvent compter sur un soutien accru. Le vice-premier ministre fédéral Alexander De Croo, par exemple, a renoncé à son veto contre l’arc-en-ciel. La route qui y mène est ouverte.

Ici et là, on doute que l’Open VLD puisse conclure un accord de coalition avec le PS et Ecolo, qui reprennent le « retour du coeur », ce slogan lancé par le président du PS Guy Spitaels à la fin des années 80 après le « massacre social » du gouvernement Martens/Gol ce qui, selon son lointain successeur Magnette, vaut également pour « le massacre social » de la coalition suédoise. Le PS et Ecolo, par exemple, envisagent une pension minimum de 1500 euros pour tous. Ils ne veulent plus changer les systèmes de retraite anticipée tels que la prépension. Leur âge légal de départ à la retraite doit être ramené à 65 ans. Et ils plaident en faveur d’une réduction du temps de travail avec maintien de salaire. Les libéraux ne répugnent pas à un programme gouvernemental aussi ouvertement à gauche. En Wallonie, les libéraux francophones gouvernent déjà avec le PS et Ecolo, à Bruxelles, l’Open VLD gouverne avec les socialistes et les écologistes, alors que ce sont des accords de gauche. Les libéraux ne se soucient guère des importants déficits budgétaires et de l’augmentation de la dette qui en découlent.

Une coalition arc-en-ciel peut compter sur 76 des 150 sièges de chambre. Un seul siège excédentaire ne suffit pas à un gouvernement stable. Avec les 12 sièges du CD&V, il serait plus confortable. Mais pourquoi les chrétiens-démocrates participeraient-ils ? Ce qui reste de ce parti serait alors mis en pièces par la N-VA de l’opposition. De plus, les tensions entre le CD&V et l’Open VLD ont augmenté ces dernières semaines, parce que les libéraux, avec une majorité parlementaire de gauche, veulent étendre rapidement les lois sur l’avortement et l’euthanasie, ce qui ne disposera pas favorablement le CD&V.

L’arc-en-ciel pourrait également demander à Défi (2 sièges) et/ou au cdH (5 sièges) d’adhérer, afin d’obtenir une majorité plus large. Mais si le CD&V n’y participait pas, la formule ne retomberait plus que sur 29 des 87 sièges en Flandre. Juridiquement, ce n’est pas un problème, mais politiquement, c’est un défi majeur pour l’Open VLD. Ce serait la première fois qu’aucun des trois plus grands partis flamands (N-VA : 24 sièges, Vlaams Belang : 18 sièges, CD&V : 12 sièges) ne fait pas partie du gouvernement fédéral. Les libéraux flamands ne réussiront à vendre ça que s’ils peuvent peser lourdement sur l’accord fédéral.

L’Open VLD est le seul parti à avoir siégé sans interruption au gouvernement fédéral ces vingt dernières années. La réduction des impôts a été, et est toujours, son principal élément de programme. Le parti n’a rien fait dans ce domaine : la charge fiscale globale n’a pratiquement pas diminué et reste parmi les plus élevées d’Europe. Ces dernières décennies, notre régime fiscal est devenu encore plus complexe et opaque. Qui pense que l’Open VLD, avec les socialistes et les écologistes, réussira à agir dans les années à venir ?

À Bruxelles, on a vu que pour les libéraux flamands, le pouvoir prime sur son programme. Ce n’est pas différent en termes fédéraux. Depuis quelque temps déjà, le scénario circule dans les milieux politiques qu’en cas de gouvernement arc-en-ciel, l’Open VLD peut compter sur le poste de Premier ministre (que la présidente Gwendolyn Rutten peut s’approprier), deux ministres et la présidence de la Chambre. Ce n’est pas mal pour un parti qui n’a que 12 sièges au parlement. Par contre, on verra combien en resteront après cinq ans d’arc-en-ciel.

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