La pandémie a rendu plus évidente encore la précarité de certains secteurs, comme celui de la culture, qui manifestait le 21 janvier dernier devant la Monnaie, à Bruxelles. © belga image

Penser la relance autrement: anticiper l’impact sur la santé mentale

Laurence Van Ruymbeke
Laurence Van Ruymbeke Journaliste au Vif

La suspension des soutiens psychologiques en temps de crise peut avoir de lourdes conséquences. Autant prévoir, pour les éventuelles crises à venir.

Le coronavirus ne laissera pas des souvenirs que dans les anticorps de ceux qui l’ont abrité. Outre les corps, les mémoires et plus encore les esprits auront été marqués au fer rouge par cette pandémie. Alors que le virus empoisonne le monde depuis un an, les conséquences qu’il a sur la santé mentale se font de plus en plus évidentes. D’après Vincent Lorant, chercheur à l’UCLouvain, 52% des Belges ont souffert et souffrent encore psychologiquement du confinement.

« Chez certaines personnes âgées, on observe par exemple l’apparition du syndrome de la cabane, renchérit Laure Malchair, directrice de Confluences, l’asbl qui s’est chargée de récolter les témoignages de terrain dans le cadre du présent rapport. Elles n’osent plus sortir de chez elles. » Dans toutes les générations, on relève de l’angoisse, des idées noires et du stress, dont les professionnels de la santé mentale assurent de plus en plus qu’ils causeront davantage de dégâts à terme que le virus lui-même. Sont touchés, pêle-mêle, le personnel de première ligne, comme les soignants, les commerçants, les facteurs, les policiers, les éboueurs, ainsi que les salariés, élèves et professeurs contraints du jour au lendemain au télétravail. Mais aussi ceux qui ont perdu leur emploi ou qui sont réduits à l’inactivité, comme les artistes ou les coiffeurs. Et tous les orphelins des contacts sociaux…

Des supervisions et soutiens spécialisés devraient être assurés aux travailleurs les plus impliqués dans la gestion de la crise.

Augmenter le nombre de soins mentaux remboursés

Or, d’autres crises pourraient bien survenir, d’origines variées, qui exerceront la même violence psychologique sur la population. Pour s’y préparer, les pouvoirs publics devraient veiller à ce que les services de soutien psychologique restent accessibles pour ceux qui en ont besoin, même – et surtout – en période de crise. « La situation est dure pour tout le monde, mais certains étaient déjà au fond du trou avant, insiste Laure Malchair. Les gouvernements devraient y penser lorsqu’ils prennent des mesures standardisées, dans lesquelles certains – notamment en proie à des difficultés de santé mentale – ne peuvent absolument pas se retrouver. » En Australie, par exemple, une plateforme unique de cybersanté mentale a été lancée, pour garantir un accès à ce type de soins dans tous les cas de figure.

En attendant, pour répondre à la situation de désarroi mental que connaissent actuellement nombre de citoyens, notamment les jeunes, les auteurs du rapport préconisent d’augmenter le nombre des soins mentaux remboursés, principalement en situations post-traumatiques liées à la crise. Certains soins ne sont en effet pas ou peu remboursés, ce qui met en difficultés les ménages à revenus moyens ou faibles. Dans le même esprit, les chercheurs suggèrent de faciliter la déductibilité fiscale des soins médicaux non couverts par la sécurité sociale, y compris en santé mentale. Certains pays comme les Pays-Bas, l’Autriche ou le Canada l’appliquent déjà.

Enfin, des supervisions et soutiens spécialisés devraient être assurés aux travailleurs les plus impliqués dans la gestion de la crise, en particulier tous ceux qui se sont activés ou s’activent encore en première ligne.

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